Vidyuta

32/ Voir le jour se lever

Féodor ne devait pas être très loin du château. Ne connaissant pas les alentour, il avait dû rester dans les endroits qu'il avait déjà vu. Il n'y en avait pas beaucoup. Le jardin où nous avons célébré le mariage de Noah, la salle de réception et les chambres d'invitées. Je traversai en courant le dédale de couloir vide et pour arriver en trombe dans les cuisines qui jouxtaient la salle de réception. Un hurlement aigu me parvint. Courant en direction du cri, j'atterris dans l'un des couloirs principaux. La petite fille pleurait. Agé d'à peine trois ans, elle déambulait dans les couloirs en appelant sa mère. Quand elle me vit, elle s'arrêta de pleurer, ne sachant pas si j'étais un ami ou un ennemi. Méfiante, elle me fixa, serrant contre elle une peluche immonde.

-Bonjour, commençai-je en essayant de paraître le plus amical possible. Je suis le Prince Atlas, tu me connais ? Je suis un ami. Comment tu t'appelles ?

Elle renifla, me fixa encore un moment avec ses grands yeux marron, puis murmura :

-Jill, je m'appelle Jill. Mais maman elle m'appelle Jilly.

-Et tu sais où est ta maman ?

-Elle fait la cuisine.

-Ici, au château ? Demandai-je en songeant que sa mère pouvait être une cuisinière travaillant ici, où ayant été réquisitionnée pour le mariage de ma sœur.

Elle réfléchit un instant puis secoua la tête embêtée en faisant la moue. Ses longs cheveux châtains fouettèrent son visage d'ange rougit par les larmes.

-'sais pas.

Je soupirai et m'accroupis.

-Aller, viens dans mes bras. On va essayer de la retrouver, ta maman. Mais il faut aussi que je cherche quelqu'un.

Elle accepta et enroula ses bras autour de mon cou, à la manière de Gimel quand il était triste. Mon petit frère étant le dernier de la nombreuse famille Primvaley agissait souvent de manière très mignonne pour avoir les faveurs de sa fratrie. Sa petite bouille cachait une grande intelligence, comme la petite qui se serrait contre moi.

-Tu as perdu ta maman toi aussi ? S'enquit-elle curieuse en fourrant son pouce dans sa bouche.

Ma mère... Oui, je l'avais perdu, en quelque sorte. Je ne l'avais jamais vraiment connu. Madween m'avait dit qu'elle faisait partit du Labyrinthe, et qu'elle s'appelait Eva Nasta mais en me donnant cette information, il m'avait aussi dit de ne jamais aller la voir. Ma mère avait eu un autre enfant, et était passé à autre chose. Comment aurais-je pu être suffisamment égoïste pour retourner la voir et lui infliger les souffrances que ma présence engendrerait.

-Non, dis-je pour la rassurer. Elle m'attend dans ma maison.

Jill ne chercha pas à en savoir plus et posa sa tête sur mon épaule, son doudou en forme de carotte d'un orange délavé contre son cœur. Elle devait faire moins d'une quinzaine de kilos ce qui ne gêna pas ma marche alors que je cherchai encore Féodor. Quand j'eus fais le tour des pièces qui m'avaient semblé importantes, je commençai à me demander s'il n'était pas sorti dehors pour essayer de trouver de l'aide ailleurs.

-Merde... Pestai-je.

-Maman elle dit faut pas dire des gros mots, me disputa Jill avec un sérieux qui me fait sourire.

-Ta maman doit te dire de ne pas en dire, mais moi je suis une grande personne, et les grandes personnes elles peuvent faire ce qu'elles veulent, l'embêtai-je en lui donnant une petite pichenette sur le nez qui la fit rire.

-Moi aussi je veux être une grande personne, grommela-t-elle en croisa les bras.

-Un jour, et ça arrivera plus vite que tu ne le crois, lui souris-je en apercevant du mouvement devant moi.