L'un de mes écuyers avait eu la bienveillance d'amener Ardadel à la soirée et je pus alors partir sans prendre la calèche dans laquelle nous étions arrivées avec les filles. Je pris le sac que j'avais laissé dans la calèche et enfila une combinaison jaune pour être plus à l'aise en me contorsionnant dans le véhicule pour cacher ma nudité. Le style n'était pas très esthétique, surtout la couleur, mais cela serait plus confortable pour monter à cheval. La couronne de fleurs toujours sur la tête, je posai mon pied dans l'étrier et grimpai sur le dos d'Ardadel qui souffla avec ses naseaux.
-J'ai un peu bu, avouai-je à ma monture en riant au vue de mon incapacité à être gracieuse.
Enfin, trois verres de liqueur de Riava, deux coupes de vin Sudiste, un jus de fleurs d'iris connue pour ses vertus euphorisantes, ce n'était pas « un peu bu » mais j'étais certaine que mon cheval ne s'en formaliserait pas.
Une fois bien installée sur ma scelle, je donnai un coup de talon et Ardadel partit au galop dans les rues pavées et désertes de Caravelle.
Le claquement sonore des sabots de mon cheval et le son du vent dans mes oreilles me donnait l'impression d'être un oiseau virevoltant où bon lui semblait. J'inspirai une grande goulée d'air, appréciant à sa juste valeur le parfum que libéraient les fleurs disposés un peu partout dans la Place Soleil. Cette sortie au clair de lune me fit le plus grand bien. Caravelle était une très belle ville, certainement plus belle que les trois autres capitales. Elle était harmonieuse, très colorée, et... musicale ?
Je tirai sur les rennes d'Ardadel pour le faire ralentir. Des saxophones et des trompettes faisaient résonner leur musique dans une rue du centre de la Place Soleil. Il y avait beaucoup de monde qui s'amusaient en se trémoussant alors que je m'approchais avec mon cheval. L'ambiance était à la fête et l'alcool dans mes veines m'invita à me joindre à eux. Je descendis du dos d'Ardadel et l'attachai à une rambarde de bois devant le petit resto qui avait installé un petit espace de danse en plein milieu de la rue. C'était convivial et à peine j'eus le temps de m'approcher qu'une fille me prit par la main et m'entraîna dans le rythme Jazz. Je la suivis et ne mis pas longtemps à me déhancher sur le groove qui se dégageait des musiciens. J'étais enfiévrée. Je ne connaissais personne et personne ne semblait m'avoir reconnu. C'était tellement agréable que je me laissai entraîner par les pas chorégraphiés d'un Charleston connu dans notre région. Cela faisait longtemps que j'en avais plus fais mais le souvenir de mes moments de danse avec Ether me revenait très vite en mémoire.
Je bougeais sans prêter attention à ce qu'il y avait autour de moi, retrouvant l'allégresse qui m'avait quitté quelques jours plutôt. J'étais certaine que l'alcool fort dans mes veines ainsi que mon manque de sommeil contribuaient à ce relâchement dans mon comportement mais qu'importait, j'étais heureuse.
C'est au bout d'une petite demi-heure que je ressentis la chaleur typique d'une cuite me monter aux joues. Je fis un petit tour sur moi-même avec grâce pour sortir de la zone où les gens dansaient et me dirigeai vers mon cheval. Un homme lui caressait les nasaux. C'est avec surprise que je reconnus Nero, adossé à la rambarde en bois, un costume décontracté sur le dos et les cheveux en bataille.
Son visage radieux se tourna vers moi alors que je m'étais arrêtée, un peu perdue.
-J'espère avoir l'occasion de te revoir danser quand nous serons dans le Sud, ma douce, susurra-t-il en se passant une main dans les cheveux. Je n'ai que très rarement eu l'opportunité de te voir ainsi. Je dois dire que je ne suis pas déçu.
Je me remis à avancer vers lui et le regardai un instant. Je ne sais pas ce qui me prit mais la seule chose que je trouvai à lui dire c'est :
-Alors allons danser.
Il fut si hébété qu'il se laissa tirer jusqu'aux autres personnes. Le Jazz n'avait pas cessé de déversé sa magie. Je me mis à bouger devant lui, lui tournant autour dans un but limpide.
-Noah, tu es éméchée, balbutia-t-il en me suivant dans la danse. Ce serait incorrect de profiter de ta faiblesse momentanée.
Je lui mis un doigt sur la bouche.
-Oui, mais ce serait un crime de dire « non » à ta femme, soufflai-je.
Ses pupilles se dilatèrent tellement que je ne voyais presque plus ses yeux bleu. Ma remarque avait dû lui faire beaucoup d'effet. Il me fit tourner sur moi-même, un peu plus libéré.
-Tu vas littéralement finir par me tuer, Noahlia, murmura-t-il alors que je me pendais à son cou, une envie terrible de l'embrasser me picotant les lèvres.
Il passa sa main dans ma nuque et plaqua sa bouche sur la mienne. Il sentait le vin rouge et le citron. Sa langue traversa le rempart de mes lèvres et s'engouffra dans ma bouche si violemment que j'écarquillai les yeux, étonnée. La soif de Nero était incontrôlée en comparaison de la mienne. Sa passion brûla mon corps si bien que j'eus l'impression que la température avait grimpé d'une dizaine de degrés. Il se recula un peu précipitamment, un sourire étrange sur le visage et sa main toujours dans mon cou.
-Tu me fais disjoncter, Princesse.
Je souris de toutes mes dents, désinhibée. C'était si bon de ne pas comprendre les conséquences de ses actes et de ne plus avoir peur. Oui, je n'avais plus peur. Affranchie de toutes mes limites, je me redécouvrais.
-Ne serait-il pas le moment de rentrer ? Me signifia Nero en regardant le château qui se découpait au loin.
-Je n'en ai pas envie, fis-je d'une moue boudeuse en me remettant à me trémousser.
-Je crois que tu as oublié que nous nous marions demain à onze heures, et je ne pense pas que tu vas réussir à te lever avant cinq bonnes heures de sommeil alors je pense qu'il est temps, s'amusa-t-il en me tirant par la main alors que je traînais des pieds. Aller, monte sur ce cheval Noahlia.
Je m'exécutais non sans lui tirer la langue avant.
-Tu n'es pas drôle, me plaignis-je alors qu'il montait derrière moi.
-Et moi je n'arrive pas à croire que ce qui ce passe est réel, dit-il hilare. Je ne suis pas près de t'oublier dans cet état.
-Tu m'aimes moins maintenant ? Lui demandais la mine triste d'une toute petite voix.
Il rit de plus belle et m'embrassa sur le haut du crâne tandis qu'il attrapait les rennes d'Ardadel et lançait le cheval au galop direction le château. Je ne comprenais pas pourquoi il semblait si heureux mais j'étais contente qu'il le soit.
-Je t'aime encore plus, chuchota-t-il à mon oreille.
-Pourquoi ? M'enquis-je.
-Parce que maintenant je sais vraiment qui tu es, Princesse.
Je lui jetai un regard offusqué par-dessus mon épaule.
-Quoi ? Une alcoolique et une fan de Jazz ? Répliquai-je un peu amer.
Et bien...L'alcool me faisait vraiment passer par toutes sortes d'émotions.
-Non, bien évidement que non, soupira-t-il avec douceur en ralentissant le cheval. J'ai compris que tu étais une jeune femme qui avait beaucoup trop de responsabilités, qui s'efforçait de paraître sérieuse et rigide devant les autres mais qui n'était en réalité qu'une enfant qui n'avait envie que de s'amuser. Et sache que j'en suis ravi. Je vais t'arracher à ta vie stricte Noah. Avec moi tu ne seras pas obligée de te forcer à être le mur insensible que tu essais d'être tout le temps, mais tu pourras être la femme heureuse et joyeuse que tu rêves d'être en secret. La femme qui va s'amuser avec le peuple à une fête improvisée, qui sait faire un Charleston en fermant les yeux et qui n'arrête jamais de sourire. J'aime te voir sourire, ma Princesse.
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Vidyuta
FantasiElle est née pour sauver le monde d'une épidémie horrifique. Elle est née pour gouverner un peuple incompris. Elle est née pour être celle qui fera tomber la barrière de l'impossible. Elle est née pour chevaucher la Foudre. Elle est née pour gag...