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Trois jours plus tard.

Lorsque le bruit cesse enfin aux alentours de six heures du matin, je termine rapidement ma cigarette et enfile des vêtements chauds ainsi qu'une casquette appartenant à Ken. Je déverrouille finalement la porte de la chambre et me faufile dans le couloir, avec une lenteur excessive afin de ne faire aucun bruit et donc de n'éveiller aucun soupçon. Je refuse que l'un des garçons me surprenne en train de leur fausser compagnie de si bon matin et surtout après une soirée improvisée où j'ai décidé de m'éclipser relativement tôt, ce qui m'a déjà valu l'étonnement de mes camarades et d'innombrables questions. Framal et Doums m'ont très clairement averti que je n'avais pas intérêt à déconner et j'ai simplement prétexté que j'étais fatiguée.

Lorsque j'arrive au rez-de-chaussée, toutes les lumières sont éteintes mais je discerne de nombreuses bouteilles vides et l'odeur du tabac froid est encore très présente. Je me stoppe nette en entendant le bruit d'une respiration forte et à la fois régulière. En tendant d'avantage l'oreille et en balayant la pièce du regard, je m'habitue à cette pénombre et parvient à discerner la silhouette de Sneazzy, profondément endormi sur le canapé ; à sa droite je devine Deen. Un bruit sourd retentit au premier étage mais un long silence s'ensuit. Les autres garçons sont sûrement dans les chambres réparties sur les deux étages. Je n'ai jamais vu l'appartement de Ken dans un tel état ; heureusement qu'il ne doit pas rentrer avant le lendemain matin. Je sens mon téléphone vibrer dans la poche arrière de mon survêtement et je devine qu'il s'agit de Aaron qui m'attend pour le rendez-vous convenu. En priant une dernière fois, j'actionne la poignée et m'empresse de quitter l'appartement en refermant la porte derrière moi. Lorsque j'entends l'ascenseur parvenir à l'étage où je me trouve, c'est la panique qui s'empare de moi ; peu importe de qui il s'agit, moins je croise de personne et mieux je me porte. J'emprunte donc rapidement les escaliers en échappant à la surveillance des garçons et de cette inconnu lorsque mon téléphone m'interrompt une fois de plus. Je me stoppe et m'empresse de décrocher en voyant le prénom de Easton s'afficher.

- Que se passe-t-il, East ?

- Bonjour Asa.

Ma respiration se bloque aussitôt et mes battements de cœur passent à la sixième vitesse en reconnaissant sa voix. Putain. Je mords violemment dans ma lèvre mais,tente de contrôler les émotions qui sont sur le point d'exploser, à savoir la panique et une colère destructrice.

- Où est-i l? Où est Easton, bordel ?

- En sécurité. Pour l'instant trésor.

- Ça fait bien longtemps que je ne suis plus ton trésor, Aaron. Où est-ce qu'il est ?

- En sécurité, répète-t-il d'une voix glaciale. 

Mon sang ne fait qu'un tour, la haine surmonte la colère, je vais le tuer. Les insultes déferlent dans ma tête, je meurs d'envie de lui cracher autant d'obscénités qui me viennent à cet instant donné. Mais la raison prend le dessus et en puisant force et courage dans toutes ces belles rencontres qui ont fait éruption ces derniers mois dans ma vie, je parviens à me contrôler et à rétablir une respiration convenable, un cœur régulier, des sueurs moins froides.

- Qu'est-ce que tu veux, Aaron ?

- Te voir sœurette, c'est évident, non ?

- Voilà des années que tu as fait le choix de ne plus me voir. Est-ce que les remords ont finalement pris le dessus ?

Silence au bout du fil mais je le devine en train de sourire, de ce sourire sournois qui le caractérise si bien. De tous ses défauts et de toutes ses peines. Je ressens amour et colère. L'amour du souvenir d'un grand-frère aimant et généreux. La colère de cette réalité si déplaisante, si incompréhensive. Mon frère me manque, il me manque si fort. Mais celui à l'autre bout de fil, celui-là je ne veux rien savoir de lui. Je ne le veux pas dans ma vie. Le véritable Aaron a bel et bien péri dans une fusillade.

À L'AUBE DE NOS ERREURS [NEKFEU]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant