Chapitre 83 - Carter fait son cinéma.

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- Roooose ! Roooose ! crie Cheyenne, depuis le salon.

- Pourquoi hurles-tu ? m'égosillé-je en arrivant à sa portée.

Elle n'a pas besoin de me répondre. Carter passe à la télévision. Filmé devant la porte à double-battant de mon immeuble. Il est divin dans son costume noir, agrémenté d'une cravate grise aux reflets luminescents. Il fixe la caméra avec aplomb, et tout son charisme crève l'écran quand il répond aux questions des vautours.

- Monsieur Lobs, comment qualifieriez-vous votre relation avec Mademoiselle Rose Lewis ?

Une photographie de Carter et moi, à la soirée Hitchner apparaît en haut, à gauche de l'écran. Une foule d'images me reviennent en mémoire: sa main dans la mienne pour la première fois, notre baiser fichtrement désiré, follement apprécié. Mais ce bon souvenir est occulté par un cliché volé de la moi adolescente, quasiment dénudée, sur une scène de ce bon vieux Las Vegas. Je comprends mieux pourquoi Stephen King voit cette ville maudite comme l'antre du diable !

- Rose Lewis est la femme de ma vie, scande-t-il.

- Vous ne craignez pas que son passé vous fasse de l'ombre ?

Journaliste à la manque ! Attends que j'ouvre tes placards pour en ressortir de vieux squelettes !

- Si vous parlez de cette adolescente qui a bravé sa timidité légendaire pour gagner 5000$ pour aider sa mère célibataire à payer ses traites, alors la réponse est non, en aucun cas. Rose a d'abord été conceptrice-réalisatrice chez Carter-Média, et elle a démissionné dans le secret absolu parce que nous sommes tombés amoureux. Non seulement, c'est une jeune femme forte de ses convictions, mais elle peut être fière de tout ce qu'elle a accompli. Moi, je le suis.

- Vous avez dit amoureux ? relève Wynona Sinclair, qui s'est faite remarquer lors des conférences de presse de la Maison Blanche, si bien qu'elle y est persona non grata depuis deux bonnes années.

- C'est bien ce que j'ai dit. Et si vous cessez de camper devant sa porte, peut-être bien que je vous transmettrais la date du mariage en exclusivité ! clame-t-il en riant, en happant un taxi.

J'écarquille les yeux. A-t-il évoqué le mariage comme je l'ai entendu ? Il est tombé sur la tête !

- Cet homme est une perle, ma chérie. Il fait tout ce qui est en son pouvoir pour te faciliter la vie.

- Oui, Cart est adorable, éludé-je.

Comme à notre habitude, nous débriefons ensemble la journée d'hier, nous concentrant davantage sur mes mauvaises décisions que sur l'amour qui a unit le couple Max-Mona. Cheyenne rigole de mes mauvaises décisions, et s'enthousiasme de la manière dont Carter a réagi. Il est vrai qu'il s'est montré particulièrement chevaleresque, calme et patient.

Après ces petites confidences, elle accepte de m'accompagner chez Liam, puis à Millenium2000, avant de faire un petit peu de shopping pour préparer la soirée à laquelle l'on me traîne - de force - ce soir. Nous prenons la sortie de secours, et nous nous rendons à Greenwitch Village. Un amoureux de Jay Charles et de Keith Jarett ne pouvait décemment pas s'installer ailleurs !

Je ne suis donc pas très étonnée que Cheyenne m'y traîne ! En plein bouillonnement New-yorkais, les rues paisibles et verdoyantes de ce quartier offrent une atmosphère plus sereine, plus authentique. C'est un de mes quartiers préféré, coloré, jazzy et frais. Liam vit au Patchin Place. Je prends un moment pour admirer cet havre de paix. De premier abord, ce bâtiment n'a rien d'exceptionnel.

Sauf qu'il s'en dégage une atmosphère olympienne intense. Les briques d'un jaune noirci par les années font écho aux fleurs qui agrémentent les fenêtres des appartements, en parfait contraste avec les ténébreux balcons et les échelles de secours de la même couleur. La porte verte attire l'oeil, comme une invitation à entrer, une invitation silencieuse, ouverte aux murmures du temps passé et des secrets que ce lieu renferme.

L'ouragan de ma vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant