Chapitre 37. Mon rêve, ma réalité.

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En plus du tourbillon d'inquiétudes qui me vrille le cerveau, le sol semble se dérober sous mes pieds. Je mets un bon moment à comprendre que ce n'est pas cette surface plane qui se révolte, mais la tête qui me tourne. Les coudes appuyés sur mon bureau, je respire profondément tout en me massant les tempes. Je dois garder la tête froide, et trouver la meilleure solution à ce traquenard.

—  Georges Washington. John Adams. Thomas Jefferson. James Madison. James Monroe. John Adams. Andrew Jackson. Martin Wan Burren...récité-je à voix basse, les yeux plissés.

—  ça va aller, me coupe Cheyenne. J'ai conscience que c'est entièrement de ma faute. J'aurais dû bazarder cet enregistrement quand tu me l'as demandé. Écoute-moi, même si je dois lui arracher les ongles un à un pour le faire parler, je récupèrerai cette vidéo.  Je te le promets.

—  Je sais Cheyenne. Et je ne te jette pas la pierre, c'est à moi que j'en veux... Mais je ne comprends pas. Que compte-t-il en faire? Qui est ce garçon revenu de Boston, hein? Je ne le reconnais pas.

— La jalousie, ça vous fait faire des trucs de dingue, Rose. Je sais de quoi je parle, répond Cheyenne, à juste titre.

Bien évidemment je n'ai pas oublié toutes les intrigues dans lesquelles elle m'embarquait jadis, tout cela pour récupérer un loser en manque d'affection.

— C'est bien ce qui m'inquiète.

Nous n'avons pas toujours évolué dans les mêmes milieux elle et moi. Cheyenne est née dans un berceau en or, dans un manoir qui était pour moi digne d'un château de princesse. Mon quotidien était beaucoup plus modeste, même si j'aimais notre menu appartement au moins autant que je rêvais d'une autre vie.

Cependant, quoi qu'il soit, nous nous sommes toujours soutenues l'une l'autre quand un obstacle nous barrait la route. Ce sont nos sujets tabous. Et cette vidéo en est un de taille! Nous avions tenté de gérer une crise, seules, qui s'était avérée bien trop extrême pour deux jeunes filles sans expérience telles que nous.

Elle se lève d'un bond, et pose deux mains sur mon bureau. Exit la fille abattue partageant mon désarroi, c'est Cheyenne la battante qui s'adresse à moi. Ses boucles blondes s'étalent sur ses épaules nues, et ses yeux d'un bleu électrique lancent des éclairs. Concentrée, elle cherche désespérément comment m'aider.

— Il y a bien une solution. Devance-le, me conseille-t-elle.

— QUOI!? Tu es folle? m'écriè-je.

— Rose, il y a une explication raisonnable à tout cela. Rends l'affaire publique.

— Une explication raisonnable? Je n'en suis pas certaine... Je ne sais vraiment pas ce qui m'est passé par la tête... Et les gens se foutent du pourquoi et du comment Cheyenne. Ils ne voient toujours que ce qu'ils veulent bien voir. Et ce qu'ils retiendront, c'est le scandale. Ils diront que j'ai bien caché mon jeu et que...

— Alors, il faut laisser mon père arranger cela. Tu sais qu'il peut le faire. Il nous a aidé dans le passé.

— Rose? intervient Allen, qui ne s'attendait pas à ce que j'ai de la compagnie, et plus que tout, qui ne pensait pas me trouver pâlichonne et frêle, à pleurer dans mon bureau. Cheyenne, la salue-t-il sur la réserve.

Sous son œil aguerri, je m'essuie vainement les yeux.

— Que se passe-t-il?

— Rien, Allen, un souci personnel. ça n'interférera pas mon travail.

— J'ai pourtant l'impression que c'est déjà le cas, affirme-t-il en prenant place près de Cheyenne. Tu veux en parler?

— J'y ai réfléchi et je...commence précipitamment un Carter en bien meilleure posture que tout à l'heure, en faisant irruption dans mon bureau à la volée.

L'ouragan de ma vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant