Chapitre 45. Semer le trouble, un jeu d'enfant!

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— As-tu déjà eu l'impression d'être dos au mur, et de n'avoir aucune issue? demandè-je en le regardant dans le blanc des yeux.

— Tu étais dos au mur il y a moins d'une heure, et tu ne t'en plaignais pas, ironise-t-il.

— Carter, le réprimandé-je, avec une moue amusée.

— Désolé. Je n'ai pas pu m'en empêcher, susurre-t-il en cherchant mes lèvres.

Ses dents viennent doucement happer ma lèvre inférieure, et alors que je m'apprête à jouer avec lui une minute, une sonnerie déplaisante rompt le silence de la pièce.

Tût. Tût. Tût.

Ce bruit strident vient de son interphone dont la lumière orange clignote par intermittence. Sans plus tarder, la voix monocorde de Susie raisonne dans la pièce.

— Monsieur Lobs, Allen vous fait dire que vous et Mademoiselle Lewis êtes attendus à Playmouth dans une heure.

Nous nous regardons mi-sourire. Après l'exaltation du ballet que nous venons de danser tous les deux, et devant l'appréhension de cette discussion naissante, portés par cette annonce, nous éclatons de rire. Mes épaules sont secouées de tremblements, et je glousse comme une adolescente, tout en passant dans la salle d'eau privée de monsieur pour une toilette intime rapide.

Je ne sais pas ce qu'il en est pour Carter - et Dieu sait que j'aimerais lire en lui - mais mon hilarité est porteuse d'un mélange étrange d'émotions dont la plus vivace est bien évidemment la peur de me livrer et de faire face à son jugement. J'étais jeune et stupide, et surtout j'étais effrayée. Maman avait beau cumuler les emplois, les charges étaient trop élevées, et elle n'arrivait pas à s'en sortir.

Nous manquions nous retrouver à la rue.

J'ai trouvé une alternative.

Pas la meilleure.

Cheyenne avait entendu parler de cette fameuse boîte de nuit V.I.P à Vegas, et d'un grand concours organisé suite au retour d'une célèbre chanteuse qui avait fait ses débuts dans ce club. La gagnante recevrait pas moins 5000$, et jouirait d'une consommation illimitée au bar jusqu'à la fin de sa vie. Je me rappelle encore la tête que j'ai fait quand elle m'en a parlé.

Je veux dire, vous imaginez la scène ? Moi? Miss Maladresse en personne? Me trémousser devant un public? Faire de mon corps une arme de séduction massive?... Si aujourd'hui je suis certaine que pour Carter, je pourrais envisager une danse lascive et sexy, la jeune fille fragile que j'étais jadis ne pouvait même pas l'envisager. Cela lui semblait tout simplement au dessus de ses forces.

Et pourtant...

— Nous reprendrons cette discussion plus tard, propose Carter, en me prenant dans ses bras pour m'étreindre longuement, sa manière de me dire que peu importe le problème, il est là pour moi.

Je lui en suis infiniment reconnaissante, même si je me demande comment il réagirait si je lui dévoilais toute l'histoire. Je lisse mes vêtements et me recoiffe, intimement persuadée que le personnel doit être attroupé à l'entrée de l'office, chronométrant avidement le temps que nous mettons à en sortir. Mais contre toute attente, Susie ne me jette même pas un coup d'œil, ce qui me soulage grandement.

Je vais d'un pas rapide dans mon bureau pour récupérer le dossier Prestige, puis je rejoins Carter et nous gagnons Playmouth en voiture, "un studio que nous louons à l'occasion, et dans lequel nous tournons nos spots publicitaires", m'explique-t-il. Sa main n'a de cesse de venir caresser ma joue, effleurer mon sein, ou se poser sur ma cuisse, quand le levier de vitesse de cette automatique ne requiert pas son attention.

L'ouragan de ma vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant