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Journal d'Anna Harlington, 2075, date précise inconnue (extraits)

Cher journal, je ne t'écrirai plus dans un cahier, mais dans une cachette secrète que j'ai ménagée dans mes mémoires cybernétiques. À partir d'aujourd'hui, tout va changer.

Hier soir – enfin je crois que c'était hier soir – je me suis endormie d'un coup, sous l'effet d'un gaz somnifère très puissant selon l'analyse de mon CC – cerveau cybernétique. Je me suis réveillée allongée sur une surface dure et froide. Je ne comprenais pas où je me trouvais, mais ce n'était pas l'orphelinat. Les odeurs de mes camarades emplissaient l'air et j'entendais quelques chuchotements.

J'ai analysé la situation en faisant semblant de dormir, comme on me l'a appris. Nous nous trouvions dans une grande salle, à entendre comment les chuchotements résonnaient. Je n'entendais pas de mouvements, juste quelques froissements de tissu, donc les autres devaient être immobiles.

Je ne pouvais pas en savoir plus en faisant semblant de dormir, alors je me suis redressée et j'ai ouvert les yeux.

J'étais en cage.

Je suis restée sous le choc, bouche bée et yeux écarquillés, tandis que mon cerveau cybernétique me donnait des infos sur ma prison. Deux mètres de large et de haut, 2,5 de long, des barreaux d'un diamètre de 1,5 centimètres.

Je suis en cage.

C'est quoi cet endroit, encore ? La surprise laissa place à de l'énervement. Pourquoi rien ne se passe normalement dans ma vie !? Pourquoi suis-je ici !?

Je regarde autour de moi et vois que mes camarades sont en cage aussi. Un frisson remonte le long de ma colonne vertébrale : nous somme tous là, tous réunis. Nous portons tous la même tenue : une sorte de combinaison grise une pièce. Nous sommes dans une grande pièce dont les murs, le sol et même le plafond sont entièrement constitués de métal. Il y a cinq rangées de treize cages ; nous sommes seuls dans la notre.

Je mets à haleter, les poings serrés à m'en faire blanchir les jointures. C'est encore un mauvais coup des adultes, mais...

Ils ont décidé de passer à la vitesse supérieure après ce qui s'est passé, je comprends avec effroi.

Au fait... depuis combien de temps suis-je ici ? Je veux consulter mon horloge interne, mais elle ne fonctionne plus... Comment ? Elle ne s'est jamais détraquée avant. Les adultes y sont pour quelque chose... c'est sans doute pour qu'on se sente encore plus perdus.

Et ça marche super bien, ricané-je en moi-même pour tenter de dissiper la tension.

Tout ceci pue à plein nez. Il faut que je sorte d'ici et vite.

Poussée par un sentiment d'urgence, je me précipite vers la porte. Je saisis les barreaux et m'efforce de les faire céder. Il ne me faut que quelques secondes pour me rendre compte que je n'y arriverai pas. Je veux alors analyser la serrure, et découvre avec stupéfaction qu'il n'y en a pas ! Les portes doivent s'ouvrir à distance, me souffle mon CC.

Ils avaient pensé à tout, ces sales manipulateurs ! Ils nous ont rendus plus forts, et maintenant ils nous emprisonnent ! Je tape du pied par terre. Ils veulent nous utiliser comme avec leurs tests, là !

J'éprouve le besoin de me confier à quelqu'un. Mais qui ? Mes deux voisins étaient des quasi-inconnus. Mon journal intime ! Je souris. Je pouvais continuer à écrire grâce à mon CC ! Je crée alors une cache secrète dans mes mémoires. Ça me prend un certain temps – je préfère ne plus trop me fier à mon horloge interne pour le moment. Puis je vais chercher les images de ce que j'avais déjà écrit sur papier et qui avait été filmé par mes caméras oculaires, et j'y recopie dans cette cachette, avant de me remettre à rédiger.

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