Chapitre vingt-sept.

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Je plaque Loïck contre l’arbre le plus proche, collant nos corps l’un contre l’autre. Un instant, il reste immobile avant de s'abandonner dans mes bras et de pleurer. La pluie continue de se déverser sur nous alors qu'Estella perd connaissance sur le sol. Mais nous nous retrouvons comme seuls au monde avec Loïck. Tous deux, glissons doucement sur le sol. Lui vient s'asseoir sur ses fesses, ses cuisses au dessus des miennes, moi mes genoux à terre à le prendre contre moi. Je peux le sentir respirer contre moi et pleurer sur mon épaule. Désespérément, il prononce mon prénom en se raccrochant à mon dos, les doigts serrés si fort que les jointures sont blanches. Je reste impuissant face à ma situation, face à Loïck dans mes bras et à son corps qui tremble. Mais surtout face à son odeur qui me rend vulnérable.

Quand nous mettons fin à notre étreinte, la pluie disparaît pour laisser place à la nuit. Une fois que j’aide Loïck à se relever, je viens soulever le corps d’Estella. Le garçon a perdu connaissance et Daeron va très probablement se déchaîner contre moi. Mais j’en assume cette entière responsabilité. Je n’ai pas été assez fort pour arrêter la colère de Loïck. Et presque naturellement, nous allons tous les trois au palais afin d’administrer les premiers soins aux deux princes. Si Loïck s'en sort mieux, il reste quand même blessé. Et nous devons également soigner ses blessures en plus de celles du garçon que je tiens. Alors dans un silence pesant où seuls nos bruits de pas se font entendre, nous rentrons.

À cette heure ci, le palais et relativement calme. Recevant du monde pour ses audiences, Louis ferme déjà les yeux et quelques chevaliers d’élites sont encore présents pour monter la garde. Aucun d'eux ne croisent notre chemin lorsque nous arrivons à destination. Rapidement, nous mettons Estella dans un lit et Loïck se charge de le changer et de l'essuyer. Je ferme les yeux en tournant mon dos afin de ne pas voir sa peau. Puis, une fois le travail de Loïck terminé, je m'occupe des blessures sur son visage. J'essuie le sang et désinfecte les plaie. Puis je mets des compresses là où il est nécessaire d'en mettre en plus de bandages autour de son crâne. Estella reprend des couleurs et peut enfin se reposer au calme.

- Je te demande pardon pour cet élan de colère, je ne sais pas ce qui m'est passé par la tête. S’excuse Loïck en regardant le visage endormi de son vis-à-vis.

Ces mots ne me sont pas adressés. Je n’ai pas besoin de la moindre excuse. Notre relation est vouée à l’échec. Plus rien ne me retient ici à présent. Je vais donc réaliser le souhait de Loïck et disparaître de sa vie. Je ne reviendrais pas non plus sur la tombe d’Hugo pour que nos chemins se séparent à jamais.

Ma décision est prise, je quitte la chambre pour les laisser seuls, mais Loïck me rattrape silencieusement dans les couloirs pour me suivre. Il est certain qu'il souhaite avoir une conversation avec moi. Mais j'ai abandonné, je ne veux plus me battre en vain. Je n’ai plus la force de lutter contre sa réticence. Alors quand j'arrive dans la pièce qui me sert de chambre, je récupère mes dernières affaires sous le regard interrogateur du prince.

- Qu'est-ce… que tu fais ? Ose-t-il demander ?

Je reste silencieux en le regardant longuement dans les yeux. Puis je continue de préparer mon dernier sac en prenant le cadre photo d’Hugo. Puis je réalise à quel point c'est une idée de merde et retourne simplement ce foutu cadre sur la table à chevet pour ne pas croiser son visage figé dans le temps. Loïck remarque mon changement de comportement et réalise trop tard que ma décision est prise. Silencieusement, je descends les escaliers pour me diriger vers la porte principale, mais Loïck m’arrête en tentant de me retenir.

- Où est-ce que tu vas ? Répond moi Ridzac ! Crie-t-il en pleurant.

Il n'a pas le droit de me retenir, de réagir de cette manière alors qu'il me repousse. Je refuse de le voir tenir à moi seulement maintenant.

- J'abandonne, Loïck. Je ne suis plus ton gardien mais celui d'Estella. Lui dis-je en le regardant dans ses yeux larmoyants.
- Q-Quoi ?

Sa voix se brise, bouleversé par ce que viens de lui annoncer.

- Tu as fait de cet enfant… ton protégé ?

Loïck ne semble pas vouloir accepter cette évidence pourtant bien réelle. Il est perturbé et ne sait plus comment parvenir à me retenir. Mais je ne peux pas vivre cette vie plus longtemps. Il a raison, Nyia a besoin de son père.

- Tu as raison, prince. Je ne peux pas te perturber ton frère et toi plus longtemps.

Puis au seuil de la porte, je m’arrête en posant ma main sur la longue poignet pour le regarder par-dessus ma large épaule.

- S'il te plaît, prends soin de toi, de ton royaume et de Ksentar’aya. Transmet à ton père mes sincères excuses et mes profondes pensées à Ariane.
- Tu ne peux pas me demander une chose pareille, Ridzac ! Tu n’as pas le droit de prendre la fuite !

J’éclate de rire car il arrive encore à rejeter la faute sur moi sans être capable d'assumer ses responsabilités. Jusqu’à la fin, il reste un enfant. Et cette innocence va me manquer.

- J’abandonne, Loïck.
- Q-Quoi ?
- J’abandonne mes sentiments pour toi, tout est fini. Je te rends ta liberté, prince.

Puis quand j’ouvre la porte, je lui dis une dernière fois :

- Adieu, Loïck.

Le temps se fige et je peux deviner qu'il pleure en me regardant de dos.
Cependant, j’ai douté de sa détermination.

Loïck s'agrippe dans mon dos pour me retenir et crie dans sa folie. Je sens mon cœur se retourner dans ma poitrine a la fois bouleversé mais heureux. Heureux parce qu'il ne souhaite pas mon départ. Mais cela est douloureux parce que je sais que c’est éphémère.

- Ça suffit Loïck où je vais commettre l’irréparable

Bordel, son odeur est si puissante que j’en perd la tête. Mais je dois résister. Je dois résister contre cette attraction et mes pulsions pour ne pas le blesser et faire l'impardonnable.

- L’irréparable ? De quoi tu parles ? Demande-t-il si ingénument.

Un battement de cœur plus fort s’empare d ma poitrine alors que mon aura se fait plus intense. Mon odeur perturbe l'odorat de Loïck qui se met à tousser et quand il me regarde, il réalise déjà que c'est trop tard et que plus rien ne peut m’arrêter. Pas même les futures supplications qu'il va bientôt me faire.

- T-Tu es en ruts, Ridzac ! Constate-t-il alors que je l’attrape par son poignet fermement.

C’est trop tard Loïck, pensé-je dans un coin de ma tête avant de définitivement tomber dans la folie.

LOÏCK ET LE LOUP BLANCOù les histoires vivent. Découvrez maintenant