Chapitre 4

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Lorsque je quitte le bar ce soir-là, il est un peu plus tôt que d'habitude, mais je suis épuisée. Je passe la porte de chez moi, les yeux déjà à moitiés clos. Je dépose mes affaires dans un coin du salon et me fige lorsque j'entends des pas dans l'escalier. J'allume la lumière du salon et tombe nez à nez avec ma petite sœur, Addison. Elle s'arrête net quand elle me voit et fuit mon regard. Ça alors, je ne m'attendais pas à la croiser.

- Salut, souffle-t-elle simplement.

Elle porte un sweat et un jean noirs, ses baskets et un sac sur le dos. Il est évident qu'elle ne compte absolument pas passer sa soirée avec moi, mais dehors avec je ne sais qui.

- Je te remercie d'avoir pris la peine de répondre à mon texto, marmonné-je d'un ton rempli de reproches.
- Je... Euh...
- Ne te fatigue pas, Addie. J'ai bien vu que tu m'évitais ces derniers mois. Je ne sais pas à quel jeu tu joues, mais sache qu'il ne m'amuse pas. Je n'y suis pour rien si tu ne peux sortir que le soir, alors cesse de me reprocher des choses dont je ne suis pas responsable. Cesse de me faire culpabiliser, bon sang, clamé-je sans élever la voix afin de ne pas réveiller notre mère.

Ma petite sœur me fusille du regard et remonte sa capuche sur sa tête. J'aurais peut-être dû trouver un autre moyen de lui parler plutôt que de m'énerver tout de suite. Elle se referme telle une coquille d'huître et se braque.

- C'est facile à dire quand on a une vie de rêve comme toi ! réplique-t-elle avant de quitter la maison, non sans claquer la porte d'entrée.

Je reste quelques minutes à fixer le bois de la porte qu'elle a refermée derrière elle, puis je m'écroule dans le canapé. Je ne peux contenir mes larmes plus longtemps. Comment peut-elle penser ce genre de choses ?

Je me recroqueville sur moi-même tandis que mes sanglots emplissent la pièce et brisent le silence qui règne depuis qu'elle est partie. Je n'arrive pas à croire qu'elle pense que je vis une vie de rêve sous prétexte que je peux sortir. Si j'avais pu le faire, j'aurais pris sa maladie sans hésiter, mais je ne peux pas. Elle n'a pas le droit de déverser sa haine sur moi. Je n'y suis pour rien ! Elle ne se rend même pas compte de tout ce que je fais pour elle. Si elle savait que, parfois, au bar, je me fais tripoter par des mecs en manque, elle ne dirait pas que j'ai une vie de rêve. Les étudiants de la fac, eux, rentrent chez eux à la fin de la journée et bossent leurs cours jusqu'à très tard le soir pour réussir leurs examens de fin d'année. Moi, je vais travailler dans un bar pour subvenir aux besoins de cette maison et je sais que nous serions déjà à la rue si mon patron n'était pas aussi cool avec moi. Depuis mes dix-huit ans, je fais passer ma sœur et ma mère avant tout pour qu'elles vivent dans un minimum de confort. Je les fais passer avant mes études, avant ma propre vie et elle ose me dire que j'ai une vie de rêve ?

Je suis blessée par ses propos et déçue qu'elle ne soit pas capable de voir plus loin que le bout de son nez. Ma petite sœur a changé avec le temps. Je sais ce qu'elle ressent. Elle se sent seule et exclue, certes, mais ça ne lui donne pas le droit d'être blessante envers moi, ni de se comporter de cette manière.

Mon téléphone vibre sur la table basse. Je sèche mes larmes, m'allonge dans le canapé et attrape mon smartphone. Sans surprise, c'est un message de Jayden qui s'affiche sur mon écran.

** Tu m'enverras ton adresse. Je serai là à 14 heures. **

J'esquisse un sourire devant son message. J'ai passé un très bon moment avec lui ce midi, mais je ne peux pas sortir demain. Je compte bien profiter de la matinée pour récupérer mes heures de sommeil perdues et de l'après-midi pour rattraper les cours que je manque lorsque je me rends au bar. De plus, je travaille demain soir, alors il n'est pas question que je sorte.

Heartbreaking dance - TOME 1-Où les histoires vivent. Découvrez maintenant