Heartbreaking dance - TOME 1-

Chapitre 18

Jayden glisse sa main dans la mienne et m'entraîne sur le côté droit de la scène. Il sait à quel point je suis stressée et que la présence de Nicolas n'arrange rien, mais il ne me lâche pas et ne me laisse pas tomber, comme il me l'avait promis.

Je ne peux m'empêcher de jeter un coup d'œil dans la salle. Ce n'est pas mon père que je vois, et ça me fend le cœur, mais Brenda qui a dû arriver il y a à peine quelques minutes. Elle devait nous rejoindre après avoir conduit sa mère à l'aéroport, elle a évidemment tenu parole. Elle me sourit et lève ses deux pouces en l'air. Je lui rends son sourire, tout de même contente d'avoir mon amie dans la salle pour me soutenir. Ce n'est pas pareil, mais sa présence compte tout de même pour moi.
Je repose mon regard sur Jayden et il dépose un baiser sur mon front.

- Comme aux répètes, murmure-t-il juste avant que la musique ne démarre.

Telle une machine, je me mets en marche et commence à répéter chacun des pas que j'ai appris durant ces trois dernières semaines. C'est mécanique, presque trop impersonnel. J'ai parfois l'impression de ne pas habiter mon propre corps, de ne pas le posséder. C'est comme si je me voyais danser sans pouvoir agir et contrôler mes gestes. Je me regarde tourbillonner, vaciller quelques fois et me laisser tomber dans les bras de Jayden. Je reproduis la chorégraphie avec précision, verrouillant chacun de mes sentiments comme je l'ai toujours fait. Ce n'est pas aussi libérateur que je l'aurais imaginé. Cette boule au ventre ne me quitte pas une seule seconde et la musique peine à s'infiltrer dans mes veines comme à la salle. Je n'étais peut-être pas prête à revenir sur scène et à danser devant d'autres personnes. Chaque pas que je fais semble ajouter un boulet au bout de la chaîne attachée à ma cheville. Chaque geste que j'effectue agit comme un poids supplémentaire qui comprime ma poitrine et m'empêche de respirer. Jamais, auparavant, je n'avais ressenti une telle douleur en dansant. Je n'étais définitivement pas prête.

Lorsque nous effectuons la pause finale et que la musique s'arrête, mon stress s'évapore enfin et je laisse échapper un soupir de soulagement. Je ne suis pas tombée et je n'ai oublié aucun pas, c'est tout ce qui m'inquiétait. Même si je ne suis pas satisfaite de ce que j'ai fait, j'ai le sentiment que notre prestation s'est plutôt bien déroulée et que nous nous en sommes bien sortis.
Un silence pesant s'abat dans la pièce, comme pour le groupe précédent. Jayden me dépose au sol et nous retournons au milieu de la scène, attendant le verdict. Le stress reprend sa place au creux de ma poitrine qui se comprime à nouveau. Je tente un regard vers le jury et la gymnaste me sourit en hochant la tête.

- Je suis pour, déclare-t-elle doucement, brisant enfin le silence.
- Je suis d'accord, acquiesce le cinquantenaire.
- Moi aussi, ajoute la championne du monde.

Jayden attrape ma main et la presse doucement. J'aimerais me tourner vers lui et lui sourire parce que c'est plutôt bien parti, mais tous les regards sont à présent posés sur Nicolas, toujours silencieux. Il relève la tête de ses feuilles et me fixe durant de longues secondes. Je connais ce regard, il ne présage rien de positif.

- Pas moi. Je suis contre, décrète-t-il. Complètement contre même. On ne peut pas laisser passer ça en quart de finale.
- Pourquoi ? lui demande le cinquantenaire à l'autre bout de la table, visiblement surpris.
- On ne ressent rien quand ils dansent. Il n'y a aucune technique, on ne comprend pas où ils veulent en venir avec cette chorégraphie. Ils dansent avec leur tête, pas avec leur cœur, déclare-t-il sans me lâcher du regard. Je n'appelle pas ça de la danse.
- Je ne suis absolument pas d'accord avec toi, Nico, intervient la gymnaste. Ok, la technique peut encore être améliorée, mais comme pour tous les groupes. On a accepté des personnes beaucoup moins performantes qu'eux. Il y a un vrai truc à tirer de ce duo.
- Je suis tout à fait d'accord, ajoute la championne du monde. Ils ont des progrès à faire, mais il y a déjà une bonne base. Il suffit de travailler un peu, on doit leur laisser et chance et voir ce qu'ils peuvent faire d'autres.