Camila tint le poisson par la tête et gratta les écailles avec le bord d'une cuiller. « De la queue jusqu'aux branchies, avait dit Simon. Donne de petits coups rapides et courts et fais attention autour des nageoires, elles sont coupantes. »
Camila ne l'écoutait que d'une oreille. La plus grande partie de son attention était concentrée sur son téléphone portable, qu'elle avait réglé sur vibreur avant de le faire disparaître dans sa poche. Elle avait déjà laissé trois messages à sa mère mais elle ne l'avait pas rappelé ; Camila avait laissé dix messages à Lauren et elle ne l'avait pas recontacté non plus. Elle ne savait si elle devait être soulagée ou inquiète. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles, tout ça, mais si sa mère se réveillait tôt et décidait d'appeler Gillian, alors tout pouvait arriver. Or elle était coincée au boulot.
Camila nettoya le poisson à l'eau du robinet puis le passa à Simon qui le retourna, ventre à l'air, sur la planche à découper avant de l'ouvrir de la queue à la tête à l'aide d'un couteau. Du sang et des entrailles se répandirent partout quand il ouvrit le poisson et en sortit les entrailles. Il jeta dans la poubelle béante cette masse bulbeuse et luisante, d'une étrange couleur pastel, crème, jaune et rose, des couleurs estivales. Simon lava le poisson une seconde fois, passant son pouce de long en large, dans son ventre, le débarrassant du sang qui s'accrochait aux arêtes et à la grande arête dorsale, ôtant les dernières écailles.
« On va garder la tête, dit-il. Il y a des poissons qu'on coupe derrière les branchies, mais pas celui-ci. »
Le poisson les regardait froidement tandis que Simon expliquait que ses yeux devaient être brillants et ronds et non pas déshydratés ou creux. Camila s'attendait presque à le voir cligner des yeux ou ouvrir sa bouche pour se plaindre d'avoir les entrailles en vrac et nulle part où se cacher. Simon le jeta sur l'égouttoir et attrapa le suivant dans un seau qui se trouvait à ses pieds.
« Ceux-là, ils ne sont pas pour le pub, dit-il, mais pour Sue et moi, plus tard, un petit cadeau de ta part, Camila. Pour faire la paix. Dis-lui que tu y as pensé toute seule et que tu es désolée. » Il lui fit un clin d'œil en lui tendant le poisson. « Et voilà, à ton tour. »
Camila le tint au fond de l'évier et gratta les écailles avec la cuiller, l'eau engourdissant ses doigts. Simon se tenait derrière ses épaules et l'encourageait. Il lui expliquait comment un peu de thym, une feuille de laurier, un peu de citron et du sel pouvaient transformer un poisson en un festin. Cela rappela à Camila l'époque où elle bêchait les pommes de terre, à l'école primaire, sa surprise quand elle avait découvert que les chips venaient d'une racine et qu'elles étaient couvertes de terre. Et, des années plus tard, les mains collantes d'écailles de poisson, elle continuait d'en apprendre sur la nourriture.
« Est-ce qu'il y a des choses que tu ne sais pas, Simon ?
- Pas beaucoup. »
Ils se sourirent et Camila se demanda comment ce serait d'avoir Simon comme père, quelqu'un qui se tiendrait à ses côtés, qui lui montrerait des trucs et lui donnerait des conseils quand elle ne savait plus quoi faire. Mais elle n'aurait pas voulu de Sue comme mère. La voilà qui déboulait à nouveau dans la cuisine, pour la deuxième fois depuis ce matin, et toujours furieuse.
« Qu'est-ce que tu fiches ici ? Aboya-t-elle en pointant un doigt vers Camila.
- Je vide un poisson.
- Pile au moment où mes toilettes doivent être nettoyées et que mon bar est sur le point d'ouvrir ?
- C'est ma faute, dit Simon. Cette fille voulait te préparer un festin, Sue. Elle voulait te montrer à quel point elle est désolée. »
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toi contre moi
Teen FictionCamila cabello et Lauren Jauregui sont amoureuses. L'une a 16 ans, l'autre 18. C'est leur premier grand amour. Pourtant, rien ne les destinait à se rencontrer. Lauren, issue d'un milieu aisé, bonne élève, se préoccupe avant tout de réussir ses exame...