Au bout de sa troisième congélation, Zack comprit qu'il était vraiment dans la merde.
– On arrive bientôt ? Demanda-t-il en murmurant, la voix complètement cassée.
Le gars qui le fixait commençait à cailler, lui aussi.
– Bientôt, répéta-il simplement.
– Et on va où ?
– Pas très loin de Portch.
– Pourquoi ? C'est complètement débile ! Mieux vaut m'emmener loin de ma ville natale ! Sinon j'ai quelques connaissances qui vont débouler...
Son coloc de congélation ricana.
– J'en doute ! Ils sont tous occupés à faire autre chose. Plus important que ta propre vie.
Le jeune homme déglutit lentement, la gorge complètement asséchée. Il n'avait pas à répliquer...
– Tu seras bien étonné quand ils vont te tomber sur la gueule ! Cracha-t-il.
– Mon patron n'a pas peur. Il a déjà tout prévu... il sait approximativement quand ton meilleur ami va débouler et il estime qu'il y a un bon mois avant que cela ne se produise.
Un mois ? C'est beaucoup trop long !
– Qu'est-ce que vous allez me faire en attendant ? Demanda-t-il prudemment.
Pourquoi se ratatinait-il sur lui-même ? La peur était la responsable de ce comportement débile.
– En fait mon patron te déteste parce que tu as joué sur tous les fronts, sans pouvoir choisir ton camp. Il n'aime pas les indécis... donc tu vas devoir choisir de rejoindre son clan, sinon, tu meurs.
– Je ne choisis donc pas vraiment, marmonna Zack avec une envie de hurler de rage.
– Pardon ?
– Ah non, je disais : « J'espère qu'il n'a pas une tête de gland. »
L'homme lui lança un regard suspicieux et Zack haussa un sourcil en lâchant un" Quoi ?" hautain.
Le jeune homme entendit un nouveau vrombissement et eut peur qu'une nouvelle décharge d'air froid lui congèle les muscles ; au lieu de ça le camion s'arrêta et la porte s'ouvrit. Son coloc descendit du véhicule et une grosse armoire à glace le remplaça, tenant un ridicule sac opaque avec ses immenses paluches. Même si Zack l'avait voulu, à aucun moment il n'aurait eu la force de le combattre.
Il se laissa donc faire et fut rapidement dans le noir total, dès que le sac fut placé sur sa tête. Deux bras gigantesques le soulevèrent ensuite et il faillit hurler de douleur face aux réticences dont lui témoignaient ses membres. Porté comme un jambon, le jeune homme eut peur que ces abrutis aient oublié la chaise reliée aux menottes ; cependant il constata qu'aucun bip strident n'avait retenti lorsqu'il s'était fait porter et que rien n'avait explosé.
Les bâtards !
Quelques minutes plus tard, Zack fut reposé sur une chaise, plus confortable cette fois. La grosse brute lui retira son sac et le jeune homme se retrouva dans une pièce carrée, sombre sur les côtés et d'un gris terne effrayant. Les tuyaux qui parsemaient les murs et surtout le plafond donnèrent à Zack une sensation de claustrophobie qu'il n'avait encore jamais ressenti jusque là.
Peut-être était-ce à cause de l'humidité qui saturait l'air...
– Ah ! Zack ! S'écria quelqu'un en s'approchant.
La voix était étouffée, cachée derrière quelque chose. Le masque dégoutant apparu alors, écartant les trois mecs qui tendaient les mains vers leurs parties intimes, comme dans ces films débiles de bastonnades.
– Que je suis heureux de te voir à nouveau !
Ils se connaissaient ? Peut-être parlait-il de la caméra, lors du meeting.
Le jeune homme inspira un grand coup pour faire partir la sensation d'étouffement qui le parcourait.
– Tu mens, connard, cracha-t-il d'une voix rauque, tu me détestes.
Le masque, au niveau de la bouche, s'écarta en même temps qu'il explosa de rire, déformant un peu plus les traits horribles de la peau pendante.
– En fait je peux te détester et être heureux de te revoir ! Mon serviteur a dû te le dire, les circonstances me rendent agréablement joyeux ! Car un par un, les dirigeants de la ville se jette dans la gueule du loup.
Il émit un nouveau rire, en ouvrant un peu plus la bouche et en balançant sa tête en arrière. Une fois de plus Zack ne pu s'empêcher de regarder si le cou exposé était bien fait d'une peau saine et lisse. Il devait avouer qu'il avait la trouille.
– C'est qu'ils sont vraiment aveugles pour pouvoir sauter là dedans, railla Zack en montrant d'un signe de menton son masque.
L'intention de le vexer ne marcha pas.
– Tu aimes ? S'enquit-il comme s'il parlait de saucisson. Je suis plutôt fier du résultat ! C'est moi qui l'ai fait ! Y'a un peu de viande, je t'avoue, mais comme ça quand j'ai faim, hop ! Un petit morceau pour moi !
Zack allait vomir, même s'il n'avait plus rien dans l'estomac.
– Vous êtes malade, souffla-t-il, les yeux écarquillés.
– Non, simplement un peu trop excentrique pour toi. Au fait... si tu te demandes, c'est moi qui t'ai frappé, hier soir, avec une poêle.
Une poêle ? C'est une blague ?
– C'est assez irrespectueux de ma part, n'est-ce pas ? Gloussa-t-il en frappant dans ses mains gantées.
Le bruit fut donc étouffé et inutile. Zack n'allait rien dire, pas la peine de le faire baver davantage.
– Bon, je vais te laisser ici du coup !
Le jeune homme se mit à grogner, involontairement.
– Relâchez-moi, ordonna-t-il.
Les hommes devant Zack émirent des rires plus ou moins accentués, chacun à leurs tours. En une seconde l'horrible masque se trouva à quelques centimètres de son nez. Il lui prit les menottes d'une main ; Zack ne se souvenait pas de les avoir devant lui. Il commençait vraiment à fatiguer...
– Tu vois ça ? Elles clignotent ! Alors non, elles ne sont pas reliées à une chaise comme tu as pu le remarquer mais plutôt à cette porte que tu ne vois pas derrière moi. Elle est dans le noir, c'est pas de ma faute... bref, si tu sors de cette pièce, tu exploses ! Pouf ! Comme ça !
Le gars mima son geste avec ses mains en s'éloignant légèrement. Zack se leva d'un bond, avant que sa tête ne se mette à tourner.
– Montre moi ta sale gueule ! Hurla-t-il en se précipitant sur son geôlier.
Les trois gardes se jetèrent sur Zack pour le retenir et malgré de gros efforts, le jeune homme s'avoua vaincu et fut reposé sur sa chaise. L'unique meuble de sa nouvelle chambre.
– J'aime le suspens, déclara le con, tu vas donc devoir attendre un peu. De toute manière tu as un mois pour te préparer, si ce n'est plus...
Il ne savait pas de quoi il parlait, sa tête tournait trop, il voulait en finir.
– Compte sur moi, répliqua-t-il en crachant par terre.
Ils avaient de la chance que son corps n'aie toujours pas récupéré de sa congélation à répétition, sinon Zack n'en aurait fait qu'une bouchée. Il semblait pourtant être percé à jour.
– Ne salit pas ta nouvelle maison, Zack, gloussa le masque de plus en plus décomposé.
À moins que ce ne soit l'esprit du jeune homme qui commençait à flipper.
L'homme sortit de la pièce tandis que deux autres rentraient à sa place. Il se retrouvait face à cinq personnes beaucoup plus baraquées que lui, mais moins que l'autre armoire de tout à l'heure. Il avait donc des chances de parvenir à s'échapper.
Pour l'heure, il devait vraiment se reposer et reprendre un peu de force. Il avait confiance en ses amis, ils ne tarderaient pas à venir. Dans l'autre cas, un mois passerait vite, finalement.
Zack ferma les yeux et commença à compter les secondes.
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Zack & Chloé [TERMINÉE]
General FictionZack habite depuis sa naissance dans le quartier mal réputé de Portch : le Quartier des Déby. Chloé réside à l'opposé de la ville, dans le fameux Quartier Cody, réputé pour son luxe et sa richesse. Tout les oppose, jusqu'au soir où une rencontre est...