La Trinité Poitevine - Partie 2

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Shiganshina, la nuit même

Deux jours. Cela faisait deux jours que Marion avait refusé d'aller voir Erwin. Depuis, elle souriait presque chaque minute, faisait les choses avec entrain, et riait même, parfois. Quelle bonne nouvelle, s'était dit Livaï. Elle avait dû faire un sacré bond pour en arriver là. C'était merveilleux, ses efforts avaient payé, elle avait retrouvé le bonheur...

En somme, il avait rarement vu un masque aussi beau. Il aurait presque voulu y croire, si elle ne s'était pas levée il y avait de cela une fraction de seconde avec un air complètement vide sur la face.

Ils se trouvaient dans le dortoir. La nuit était tombée. Il était assis à son bureau, Annie, sur son lit. Son geste venait de nulle part, et la probabilité qu'elle se dirige vers cette porte uniquement pour aller sur le trône était faible. Alors, dès qu'elle fut sur le point de franchir le palier, la blonde lui attrapa le bras. « Où est-ce que tu vas ? »

Ce contact seul fit sursauter la chercheuse. Elle ne répondit pas. « Où est-ce que tu vas ? » Silence. Un long moment passa. L'ex-ennemie parut juger qu'elle avait fait assez, et desserra légèrement son emprise. A cet instant précis, l'autre tenta brusquement de s'en défaire.

Le caporal-chef se leva immédiatement, mais sa garde lui bloquait déjà le passage. « Tu ne sortiras pas. » Elle posa ses mains sur ses épaules, et plongea deux yeux durs dans les siens. « Je peux t'assommer. »

Elle aurait tout aussi bien pu lui mettre une torgnole : l'effet fut presque le même. Marion s'immobilisa, les paupières écarquillées. Voilà qui est fait... Il s'apprêta à retourner à sa place, lorsqu'il vit ses mains se mettre à trembler. Oh.

Elle se laissa tomber à genoux. Annie l'accompagna, sourcils froncés. « Marion ? » L'intéressée tenta d'articuler quelque chose, mais seul un sanglot sortit de sa gorge. Puis, il y en eut un second, et un troisième, et d'autres, qui se transformèrent bientôt en de faibles plaintes. Celles-ci eurent tôt fait de se faire désespérées.

Il n'eut pas besoin de paroles pour comprendre ce qu'elles voulaient dire. Sa fameuse fuite lui était coupée. Elle avait commencé à nager en plein délire, et s'était persuadée qu'elle allait enfin pouvoir se barrer de là... Mais on l'avait de nouveau « faite prisonnière ». Et là, la douleur accumulée depuis il ne savait quand était devenue particulièrement insupportable, tant et si bien qu'elle ne pouvait plus la retenir.

La scientifique s'accrochait au pull de sa garde comme si sa vie en dépendait. Ses épaules – non, tout son corps, était secoué de soubresauts incontrôlables. Ce n'était pas beau à voir. Mais comme d'habitude, ça va passer, et elle va retourner gentiment dans son lit pour...

Le hurlement qu'elle poussa coupa sèchement le fil de ses pensées.

Ce fut avec un terrassement inattendu qu'il regarda sa subalterne s'égosiller aussi bien que si on lui avait arraché un membre. La ressemblance avec son alter-ego était si frappante que, pendant quelques secondes, il se retrouva dans l'incapacité de bouger. Il finit cependant par s'avancer vers elles.

La face d'Annie était marquée par une stupeur sans égale : il comprit sa douleur lorsqu'il arriva à leur hauteur. Il venait certainement de perdre vingt points d'audition. Ses cris résonnaient talentueusement dans le corridor, et, déjà, il pouvait entendre quelques soldats s'agiter dans leur chambre.

« Marion », articula-t-il entre ses dents serrées. « Arrête de beugler. » Aucun résultat, si ce n'est un regard menaçant de la blonde. Il l'avait anticipé, mais il ne savait pas vraiment quoi dire d'autre. Tuer des titans ou décapiter des américains, pourquoi pas, mais gérer une suicidaire en crise...

ᴏʀɪɢɪɴᴇꜱ - ᴀᴛᴛᴀᴄᴋ_ᴏɴ_ᴛɪᴛᴀɴ&0.7 ⌜ᵗᵒᵐᵉ ³⌟Où les histoires vivent. Découvrez maintenant