Kenny : behind the scenes - Partie 2

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Quelque part dans le Nevada, 20 mai 2001

Un terrain artificiellement plat au sol naturellement sec : voilà ce qui se présentait sous les yeux de Kenny. La petite base composée de quelques bas blocs et de deux grands hangars, séparés par des allées assez larges pour faire passer un camion, était certes juste devant lui, mais ce n'était pas elle que ses yeux étudiaient. Entre eux, il n'y avait rien de moins que Marion, qui peinait terriblement à courir sous les trente-quatre degrés qu'elle devait supporter.

Elle avait attaché ses cheveux, et retiré ses lunettes ; avec ce relooking de l'enfer, son visage paraissait trois fois plus délicat. Toutefois, les apparences étaient loin d'être une préoccupation pour elle. Elle s'était faite une queue-de-cheval pour son exercice physique, point barre. Simple, efficace, légèrement décevant.

Les officiers avaient tout de même été sympathiques avec elle. Elle devait bien évidemment porter le fameux pantalon militaire, mais ils avaient été assez laxistes pour lui ôter la peine du haut à manches longues. L'homme suspectait un traitement de faveur, sans pour autant le reprocher. Si elle était mieux dans un t-shirt kaki, grand bien lui fasse.

Non, le petit souci qui se posait venait des gardes.

Puisqu'ils n'avaient rien d'autre à foutre, ils n'avaient de cesse de la mater allègrement. Même lui ne se le permettait pas, alors qu'il la suivait vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Il n'était pas aveugle non plus, il avait bien remarqué du coin de l'œil sa poitrine et son fessier bien placés... Toutefois, de là à baver dessus, très peu pour lui. Il était certes un connard, mais un connard d'élite, c'est-à-dire qui ne s'abaissait pas à une quelconque pratique libidinale non-consentie, ce même si elle se « résumait » à dévorer avec les yeux. Et, dans tous les cas, Marion n'était plus dans sa liste de souffre-douleurs depuis environ un mois et demi.

Elle lui avait mis une mandale dans la tronche, avec le terrassement dont elle avait fait preuve au premier pas qu'il avait fait dans le bureau de Rebecca. Elle lui avait éventuellement expliqué la situation, comme quoi elle avait subi un transfert spatio-temporel et l'avait connu dans sa trentaine...

M'enfin, il comptait rester un salaud jusqu'à sa mort, et ne s'était probablement pas arrêté en déménageant en France. Et puis, une droite restait une droite. Il y aurait peut-être survécu, s'il ne s'était pas passé ceci un soir de mars.

Il était vingt-et-une heures, ils se trouvaient dans leur dortoir – ses supérieurs n'avaient pas blagué en disant qu'il allait devoir se la coltiner jour et nuit. Marion s'était déjà cassée dans son lit, la bougresse avait besoin de dix heures de sommeil. Il avait donc éteint la lumière, et s'était dit « ah, tiens, et si j'allais traverser la pièce dans le noir juste pour m'amuser ? »

Ce n'était qu'une reconstitution, bien entendu, son but premier avait été d'aller chercher un verre d'eau... Mais dans tous les cas, le bureau s'était mis sur son chemin. Ainsi son gros orteil avait-il amoureusement rencontré le coin du meuble, et le jeune homme était-il tombé à genoux dans une exclamation de douleur qu'il était tout juste parvenu à étouffer.

Seulement, l'adolescente l'avait quand même entendu, et s'était levée en beuglant un « ouah, Kenny, ça va ?! » très peu discret. Il s'était pris un coup de genou dans la face, elle s'était excusée trois fois, elle avait encore eu une réaction peu habituelle. C'est-à-dire, ne pas se marrer, lui tapoter le dos, et retourner dans ses draps.

Lui tapoter le dos. S'excuser. On ne les lui avait jamais faites, celles-là. Qui tapote le dos d'un enfoiré ? Personne, exactement. Il en était désormais certain, elle était un spécimen très curieux, et un poil trop compatissant. N'importe-quelle personne de l'espèce de Kenny se serait posée des questions.

ᴏʀɪɢɪɴᴇꜱ - ᴀᴛᴛᴀᴄᴋ_ᴏɴ_ᴛɪᴛᴀɴ&0.7 ⌜ᵗᵒᵐᵉ ³⌟Où les histoires vivent. Découvrez maintenant