Qu'est-ce que ça a dans sa poche ?

112 16 44
                                    

Quelques mois s'étaient écoulés depuis que j'avais fait mon ultime demande en mariage. La venue du père de Túrin Turambar s'était peu à peu effacée de mon esprit comme le lointain souvenir d'un mauvais songe. J'avais tant de pensées plus réjouissantes pour m'occuper l'esprit ! L'officialisation de mes fiançailles avec Galadriel par exemple ; la coutume voulait que les futurs époux s'échangent des anneaux d'argent pour marquer comme réel leur engagement. Un an jour pour jour après cela, au cours d'une grande fête organisée par les proches des fiancés, les anneaux d'argent étaient remplacés par des anneaux d'or, et le mariage prononcé. Aussi, un soir, Galadriel m'avait convié dans ses appartements, et dans le secret de notre intimité, nous nous étions confiés nos alliances.

Le lendemain au cours du repas, Galathil et Oropher ne manquèrent pas de remarquer ce nouveau bijou qui ornait ma main droite. Et comme je n'étais pas un amoureux des ornements, ce détail avait aussitôt attiré leur attention.

Je m'étais donc retrouvé dans l'obligation de leur révéler la vérité. Et je me rappelle encore bien leurs réactions...

Ravennë qui écoutait discrètement notre conversation lors du repas avait lâché un : « Il était temps ! », pendant qu'Oropher me contemplait, bouche bée, comme s'il avait vu apparaître Morgoth en personne devant lui. Galathil n'était pas dans un meilleur état, ne cessant de balbutier : « Non... Tu l'as fait... C'est une blague ? », tout en se pinçant, croyant qu'il était en train de rêver.

Le comique de cette situation avait été achevé par la réaction de Thranduil : « Ah... » avait-il lâché en haussant les épaules, son assiette semblant bien plus passionnante que mes fiançailles. D'ailleurs, il n'avait pas tardé à baisser la tête et, la bouche pleine, avait fait remarquer à son père : « Fait attention ada, tu baves... ». Ce qui avait eu pour résultat de nous faire éclater de rire, Ravennë et moi, attirant indubitablement l'attention de toute la tablée sur notre petit groupe bruyant.

Je remarquais que Melian, aux côtés de Galadriel, avait pris sa main dans la sienne et contemplait son anneau d'argent avec un sourire en coin. Apparemment, le couple royal était au courant de nos fiançailles. Ou tout du moins la reine. En effet, cela faisait plusieurs semaines que le roi n'avait pas donné signe de vie et son trône était la plupart du temps vide. Son absence commençait sérieusement à se faire ressentir ; son frère Elmo avait dû prendre en main la maîtrise de la paix intérieure du royaume, et mon père Galadhon, premier lieutenant, avait la charge des coordinations des patrouilles surveillant les frontières nord.

Tandis qu'autour de moi, Oropher et Galathil exprimaient leur plus profonde stupéfaction, mon esprit divaguait à une pensée des plus préoccupantes : la coutume voulait que le fiancé offre un présent à sa promise en gage de sa foi, et j'ignorais tout à fait ce qu'offrir à Galadriel. Puis soudain, je me rappelais que Hurin avait ramené à Menegroth le Nauglamir appartenant jadis à Finrod. Il me semblait plus que légitime que sa sœur en hérite. Aussi, sans déblatérer davantage, je quittais la table et pris le chemin des appartements royaux.

Calmement, je toquais à la porte, mais personne ne répondit. Supputant que le roi devait être sorti, je pris mon mal en patience et attendis.

Après deux heures d'attente, la reine passa dans le couloir et, surprise de me voir, elle me demanda ce que je faisais devant la porte des appartements royaux. Embarrassé, je lui expliquai que j'attendais le roi pour une affaire personnelle. Comme elle semblait curieuse, et qu'elle était après tout concernée de par sa proximité avec Galadriel, je lui exposai mon projet. J'eus la surprise de voir Melian pincer les lèvres, d'un air presque contrarié, avant de reprendre tout aussi prestement une expression neutre.

D'une voix où je sentis tressaillir une émotion inexplicable, elle déclara qu'elle allait chercher le roi de ce pas et l'informer de ma requête, même si, de son point de vue, il n'était pas certain qu'il accepte... Quand je lui demandais pourquoi, elle se contenta de se détourner pour s'engager dans le couloir. Mais il me sembla entendre sa voix murmurer : « Il n'est plus lui-même... »

Les tribulations d'une plante verte - livre 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant