7 • SAMUEL • des entendant∙es

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Le poids de cette journée se condensa autour de Samuel et se rétracta au loin sous ses coups de brasse vigoureux. La chaleur de ses muscles était compensée par la fraîcheur de l'eau. Samuel adorait nager. Il adorait cette résistance, comme si le temps se transformait en une mélasse qu'il fallait combattre. Il adorait cette liberté de mouvements contrôlés, il adorait cette lenteur, il adorait sentir le poids de sa respiration. Plus que tout, il adorait pouvoir ignorer le monde et qu'on lui foute enfin la paix.

Enfin, peut-être pas. Samuel s'accouda au bord de la piscine, souffla profondément et se passa la main sur le visage. Il était à demi émergé, l'eau le supportant grâce au rare frétillement de ses jambes immergées. Il se sentait comme une sirène. Hadrien lui signala qu'il était déjà passé cinq heures et demie et qu'il voulait rentrer. Sam détourna la tête avec un dernier souffle et se hissa hors de l'eau. La sirène redevenait une Ariel volontairement muette. Et sourde. Et moche. Il se sentait presque instable sur ses jambes devenues si frêles.

« Ça te dérange si je rentre avec toi ? J'ai pas envie de prendre le bus. Mon père peut venir me chercher plus tard. » signa maladroitement le blond.

« Non, c'est bon, ma mère nous ramène. »

« Goûter ? » proposa sa mère, de retour à la maison.

« Non merci. » signa rapidement Samuel avant de grimper les escaliers qui menaient à sa chambre.

Il avait faim, pourtant, comme toujours après la piscine, et sa barre chocolatée ne lui avait pas suffi. Mais la journée avait été longue, et pour autant qu'il aime sa mère, il n'avait pas envie de traverser un interrogatoire interminable sur la vie d'Hadrien. Il n'avait surtout pas envie qu'elle lui demande, à lui, quels étaient ses devoirs. Il n'avait juste pas envie de discuter, en fin de compte.

Hadrien le suivit - évidemment.

Sans un mot, Sam lui tendit une manette et alluma l'écran. Un petit cercle se mit lentement à tourner tandis que l'écran noir absorbait le visage impatient chevauché d'une touffe sombre de cheveux humides. Il y voyait aussi le garçon blond qui s'était étendu dans son lit, adossé au sommier. Il avait toujours cet air fatigué dans la faible amplitude entre ses paupières. La commissure de ses lèvres avait tendance à plonger vers le point de beauté sur son menton. L'implant cochléaire au câble transparent était revenu se percher sur son oreille. Pour quoi faire, ici ?

« Ça faisait longtemps que j'étais pas venu. Depuis les vacances. J'oublie toujours que ta mère signe.

-Ça limite ses paroles, sinon elle parle beaucoup. Et elle galère encore.

-Moi aussi.

-Ouais. Tu devrais passer plus de temps avec les sourd∙es.

-Je connais pas beaucoup de sourd∙es, de toute façon.

-Moi je suis quoi ? Un poisson ?

-T'es un pote de la piscine.

-Je suis un poisson alors. »

Samuel détournait de manière répétitive son regard vers l'écran d'accueil à présent allumé et approchait ses mains de sa manette. Hadrien ne semblait pourtant pas comprendre ses sous-entendus et continuait à causer pour son plus grand énervement. Il avait laissé ses mains reposer et remuait à présent les lèvres, comble de l'ironie.

« Toi tu devrais voir plus d'entendants par contre.

-Pour quoi faire ? » signa résolument Samuel, n'adhérant pas au caprice de son ami.

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