21 • MÉLISSA • d'un fuchsia

37 7 55
                                    

Le marché de Noël de Bruxelles dégageait un profond violet pourpre, entre le mauve et le rose. Presque du fuchsia. Mélissa aimait tellement mieux la capitale vaste et cosmopolite que le petit Namur bourgeois, blanc et conservateur. Ici, elle pouvait presque voir scintiller les paillettes de ses rêves et ses nouvelles opportunités.

« Meuf, tu viens ? demanda Cindy.

-J'arrive. » répliqua Mélissa en glissant son bras sous le coude de son amie pour rejoindre son groupe de potes. « Alice elle vient pas ?

Alice était la copine de Cindy, qui étudiait le droit. Les deux vivaient dans le kot de Mélissa quand elle était arrivée et l'avaient adoptée en quelque sorte. Depuis qu'elles étaient parties pour leur Master, se voir était plus compliqué, mais elle ne comptait pas perdre le contact de ces deux filles dorées.

« Nan, elle est passée la semaine dernière mais là elle est chez sa famille, elle bloque pour ses exams et elle arrive pas à se concentrer avec moi.

-Tu m'étonnes. Ça doit être difficile de rester sur le bureau quand la chambre est si petite et le lit si près... taquina Mélissa.

-Ouais, c'est plus difficile maintenant que tu ne fais pas irruption dedans toutes les trois minutes, soeurette.

-T'avais le meilleur wifi et le meilleur maquillage, j'y peux rien.

-Je dois avouer que l'élève a surpassé le maître. Je suis jalouse de ton make-up.

-Je t'apprendrai, si tu veux. »

Cindy fit mine de lui donner une tape alors qu'elle se dégageait en riant. Non, elle n'avait rien à envier à Mélissa. La femme dégageait une aura d'un pourpre sombre que Mellie ambitionnait depuis des années. L'or de ses grandes boucles d'oreilles faisaient ressortir l'ébène de sa peau. Son crâne rasé rehaussait sa féminité et lui donnait un air presque autoritaire, souligné par son regard rouge-bronze. Cindy était la dignité et l'élégance incarnées. Mélissa ne donnait pas cher de ses adversaires au tribunal quand elle aurait passé le barreau.

Pour la deuxième année consécutive, elles passaient une partie des vacances d'hiver ensemble (même si ce n'étaient pas des vacances à l'université), et Mélissa avait une reconnaissance jaune-orange de l'avoir dans sa vie. Quand elle était arrivée dans ce kot à Namur, désemparée, Cindy l'avait aussitôt prise en main et permis à son propre rose puissant de se développer. En plus de ça, elle l'avait aidée à changer d'école et l'avait éclairée sur les futures démarches administratives. Elle et Alice étaient devenues plus que des amies et les deux filles riaient en l'appelant leur fille adoptive. C'était dans ce début rose-orange-jaune qu'elle avait le plus pleinement embrassé son identité. Maintenant, elle avait ses propres chatons à veiller.

« C'est assez vide sans vous, dans le kot.

-J'espère bien. On n'était pas du papier peint, non plus ! Nan mais en vrai il reste qui encore ?

-Pamela, Magali, Bastien et Yourik. Puis les nouveaux.

-Ouais, je me souviens. Pamela chantait comme une casserole dans la douche et Bastien faisait jamais la vaisselle, insupportable. Magali est si choue même si elle stressait autant qu'Alice pour les examens, c'était un enfer de l'entendre réviser la nuit.

-Ça ne s'est pas arrêté mais ça ne me dérange pas. Je ne dors jamais tôt. Je les aime bien mais je me vois mal m'incruster dans leur chambre et leur parler toute la soirée comme vous. Et puis je bosse beaucoup plus et avec le portfolio... je sors moins de ma chambre.

-Tsss. Tu en sortais pas tant que ca avant, tu participais même pas aux rallyes kot.

-Je participe de loin. Mais tu sais que je bois pas et vos folies étudiantes... ça ne m'encourage pas plus. En même temps leurs soirées et les sorties au bunker en semaine c'est pas trop faisable avec l'école le matin. Je pourrais rester plus avec elleux mais je commence sérieusement à me lasser de Namur donc autant y laisser le moins d'attaches. Je préfère me concentrer sur mon indépendance.

QU'ART'ZOù les histoires vivent. Découvrez maintenant