51 • MELISSA • d'un bleu et d'un rouge

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Une aube orangée se levait sur le champ dégagé de sa liberté. Mélissa avait l'impression qu'un énorme poids se levait de ses épaules comme une nuée de corbeaux à la vue d'un épouvantail. Bien sûr, la soirée de la veille pesait encore un peu sur ses paupières. Le stress du spectacle qui aurait lieu dans deux jours également. Mais oh, cette légèreté étourdissante, cette vue dégagée, ce temps à présent aussi infini que l'horizon !

La jeune femme sourit, ouvrit les yeux. Elle trouva face à elle ceux de Léo, aussi purs et flous qu'une goutte de rosée. Comme dans un accord tacite, les deux s'étirèrent en étouffant un bâillement. Elles ramenèrent sur elles la fine couverture rejetée par la chaleur, comme pour se couvrir d'une tente enfantine qui conserverait quelques instants encore la douceur du rêve.

« On a fini, Léo. murmura Mellie d'une voix barbapapa. Douze ans de tyrannie, de stress, de toilettes du troisième étage... c'est fini, tout ça.

-I did my waiting. Twelve years of it. In Azkaban. répliqua doucement Léo avec un petit sourire qui s'évanouit presqu'aussitôt. C'est pas encore fini n'empêche. On n'a pas les encore les résultats. Ni le spectacle. C'est pas la fin, Mellie. Juste deux journées pédagogiques pour que les profs corrigent.

-Ne soit pas si rabat-joie. Le spectacle est prêt. Enfin, presque mais ça suffira. Et pour les examens on peut plus rien faire maintenant. On les a passés et on stresse mais ça changera pas le résultat, c'est trop tard Et c'est pas comme si toi tu avais une raison de stresser.

-J'aurais bien aimé. répondit la jeune blonde en retombant sur l'oreiller.

-Comment ça, princesse ?

-L'école... c'est mon royaume. C'est pas parfait mais... je connais. Je connais les lieux, les profs, les élèves, le fonctionnement. Là-bas, j'apprends de tout, tous les jours, je dois pas faire de choix. C'est fou parce que... quand je suis à l'école je ne veux qu'en sortir. Mais avoir tout à fait fini... C'est impossible. Je ne l'ai jamais imaginé. Je ne suis pas totalement sûre d'exister, en dehors de l'école.

-Bien sûr que si, princesse. C'est la peur de l'inconnu, c'est normal. Mais il faut pas te laisser intimider, c'est trop bête de se contenter de quelque chose qui ne va pas juste parce que c'est ce qu'on connaît le mieux. Crois-moi, ça vaut la peine d'en sortir et de découvrir toutes ces choses qui te feront éclore. J'ai toujours rêvé de quitter l'enfer de l'école, même si elle a eu ses bons moments. C'est tout ce que tu retiendras, bien sûr, les bons moments. Mais ça suffit pas pour justifier tout le reste. 

-C'est vrai. Et au fond de moi je sais que ce sera sûrement mieux... après. C'est juste qu'il y a tant de voies possibles, c'est encore plus difficile que pour les options. Je déteste choisir, princesse des couleurs. On renonce à plein de choses et je suis tellement terrifiée de faire le mauvais choix. -Le mauvais choix pour toi, ou le mauvais choix pour ta mère ?

-Les deux.

-Le seul mauvais choix, princesse, c'est de ne pas en faire. »

Léopoldine sourit doucement, pleine de doutes, et enleva la couverture pour se coucher sur le dos.

« J'ai hâte d'aller à Bruxelles avec toi, aujourd'hui. J'ai hâte de découvrir ton monde. » dit-elle au plafond, lui adressant ensuite un regard complice.

Cette simple phrase leur avait donné la motivation de se lever, de chaparder un petit déjeuner chaotique entre le passage des différent.es colocataires. Aussitôt, elles coururent prendre le train vers Bruxelles-Centrale où elles laissèrent infuser le reste de leurs rêves. 

« On ne retrouve Cindy que l'après-midi, on fait quoi en attendant ?

-Mélissa, c'est merveilleux, on a une journée entière pour explorer. pétillait la jeune fille.

QU'ART'ZOù les histoires vivent. Découvrez maintenant