41 • LEOPOLDINE • d'un Baiser

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À son plus grand étonnement, l'épuisement
des premiers jours avait ouvert les valves
d'une réserve presqu'infinie d'énergie.

Tant de choses à voir, à absorber, à vivre...
Les pensées de Léopoldine se fanaient
sous ces bourgeons luxuriants de nouveauté
et ces amitiés devenues si étroites
qu'elles formaient un bois ombré sur sa tête.

La jeune fille avait visité son palais :
le Schönnbrunn avait réveillé ses rêveries
les plus folles, avec ses jardins immenses.

Elle s'apprêtait à présent à visiter
le château de tous les rêves de Mélissa.

Le cœur de celle-ci frémissait dans ses doigts.

Le Belvédère tout de blanc les attendait.

« J'arrive pas à y croire. » murmura Mellie, des ventouses dans les yeux.

« Et pourtant c'est là. C'est la réalité. »

Les statues soutenaient les colonnes avec
juste assez d'efforts que pour les laisser passer.

« Eh, Miel, Klimt c'est tout droit, apparemment ! » cria Axell, engagé∙e dans l'escalier.

« Allons à droite. » répliqua aléatoirement Mélissa,
qui serait la main de Léo en attendant
Jun Jinzai devant l'ascenseur. Jun si radieux
qu'il faisait oublier à son cœur de battre correctement la mesure.

Même sans Mellie, Léo aimait les musées,
et les musées d'art particulièrement.

Au-delà de leur histoire ou de leur contexte,
-et elle adorait fouiller les références-
les œuvres réveillaient en elle des courants...
d'apaisement, de beauté, qu'en savait-elle ?

Elle en avait pleuré devant les Nymphéas
de Monnet, éternel favori à son cœur.

« Léo, oh mon dieu regarde. C'est un tableau incomplet. De lui. Regarde ces couleurs. Ce bout de peau ! Du bleu, du rose, du jaune... On voit la trace de son crayon, et le nu sous le début de vêtement. Oh mon dieu. C'est comme s'il était là devant nous, à nous montrer, chaque étape. Il est là, Léo, tu te rends compte ?

-Ces regards... on dirait qu'ils nous transpercent. » remarqua Léopoldine, hypnotisée.

« Mais oui ! Sa façon de présenter les corps est tellement unique, tellement différente. Mais ils sont vivants, vivants malgré tout.

-Nom d'une cacahuète, Mélissa, si t'es déjà dans cet état là, on va devoir te ramasser à la cuillère quand tu verras les tableaux complets. J'ai déjà fait une fois le tour, on avancerait pas ?

-Axell, on respecte la passion des autres. » intervint Jun, qui observait en silence.

« Je t'ai rien demandé Jinzai. Mais maintenant je te demande. Tu avances avec moi ?

-Si tu touches à mon fauteuil tu vas te retrouver sous les roues.

-C'est qu'il montre les griffes le chaton. » rit Axell, entraînant son escorte plus loin.

Au bout du couloir trônaient des paysages.

Rien ne les préparait, en tournant à gauche
à se confronter si brillamment au Baiser.

« LÉO. Léo Léo Léo Léo Léo Léo Léo. C'est lui. » s'étouffa Mélissa, se couvrant la bouche. « Léo, oh mon dieu, il est tellement plus... tellement plus que les photos... C'est comme si... comme si Klimt se foutait de nous. Comme s'il nous disait « vous croyiez que vous pourriez capturer mon œuvre avec vos appareils photos ridicules ? » C'est impossible. Impossible de... Léo, la lumière ! Le mouvement, l'éclat de l'or, la texture... Est-ce que tu as vu ces spirales ? Et les éclats de ciel ? C'est beaucoup plus que... Oh mon dieu. On est vraiment là, Léo ? On est vraiment là ?

QU'ART'ZOù les histoires vivent. Découvrez maintenant