Ce que femme veut - Part 37- Deuxième chance

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Je lui ai tourné le dos toute la nuit. J'ai dormi les poings serrés du style « ne me touche pas » et il l'a bien saisi et n'a rien tenté.
Ce matin, il s'est levé avant moi et a préparé le petit-déj, bleh tentative de reconquête.
- Il ne fallait pas, j'ai dit en bougonnant un merci.
Il a pris ces paroles pour un cessez-le-feu et a osé un baiser sur le haut de mon front en me prenant dans ses bras mais je suis raide comme un balai, toujours pas redescendu de l'escabeau de ma colère.
Après avoir englouti mon petit-déjeuner dans le silence et l'avoir entendu faire les cents pas dans le salon, j'ai pris une douche d'une demi-heure et me suis habillée comme un soir de fête juste pour descendre la poubelle.
- Jean et escarpin pour descendre une poubelle, il a raillé.
- C'est ma manière à moi de prendre l'air, j'ai fait le visage serré.
Lorsque je suis remontée, il m'a enfin demandé pourquoi j'étais si froide et si j'avais un amant qui m'attendait dans le local. Je n'ai pas ri à sa blague et j'ai avoué pour Fidan.
- Mais Inès, sa mère est à l'hôpital ! Il a répété deux fois comme si j'étais demeurée.
- Oui, j'ai compris ça, mais sois honnête, si on n'était pas confinés t'irais la voir.
- Qui, sa mère ?
- Non, Fidan.
- Non, pourquoi ?
- Pour la soutenir, la réconforter.
- C'est ça qui t'inquiète, il a dit en souriant. On reste ex, mais je peux avoir pitié, non ?
- Oui, tu peux compatir, tout ce que tu veux, mais faire les cents pas, le regard inquiet et les yeux rivés sur ton téléphone, moi ça me pose question.
- Tu crois quoi, il a postillonné agacé, que je vais la réconforter puis qu'on va déraper et se remettre ensemble ? C'est pas une télénovela la vie. On est des êtres humains, tu peux éprouver des sentiments nobles pour une personne. Elle a fait partie de ma vie cette femme, sa mère est malade, j'ai encore le droit, légitime, d'être chamboulé. Franchement ton attitude je la comprends pas. Flipper pour ça ... On dirait une ado en stress.
- Ben c'est ça le problème avec toi c'est que tu me rassures pas, j'ai fait la voix étranglée par les sanglots.
- Wow Inès ! Il s'est écrié. T'es sûre que tu veux t'aventurer sur ce terrain ? Parce que je pense que j'ai atteint mes limites niveau patience.
J'ai hésité quelques secondes puis j'ai éructé :
- Moi aussi j'ai atteint les miennes niveau passivité.
- Donc tu veux faire quoi, il a demandé passablement énervé.
- ...
- C'est le confinement qui te rend paro ?
- Non c'est pas le confinement, j'ai déclaré, c'est ton attitude. Tu ne me rassures pas, t'es trop accessible, j'aime pas ça. Une ex c'est une ex, sa vie ne te regarde plus, sa mère va mal, que Dieu l'aide, mais je comprends pas ton agitation. C'est bien d'être gentil mais c'est mieux d'être fiable. Et je ne vais pas te mentir, t'es adorable mais là, à l'heure où on parle, là, je ne te fais pas confiance à 100%.
Cette phrase l'a assommé. Il a passé une main sur sa barbe et a dit :
- Bon, tu sais quoi on va faire simple : t'attends quoi de moi ? Ça va faire un an qu'on se connait, je t'ai couru après comme un chien, j'ai fait les choses dans les règles, je te respecte, je suis franc avec toi pour que tu paniques pour une affaire de daronne en réanimation ?
- Ce que je voudrais, j'ai dit en tremblant, c'est que tu sois à moi, pas que je te partage avec tes collègues et ton ex, l'asperge brushinguée, qui se prend des cuites pour te déclarer son amour. Si la meuf t'a trompé et s'est mariée avec un autre sous tes yeux pourquoi tu la calcules encore ? C'est une attitude de bouffon !
Aussitôt prononcés j'ai regretté la dureté de ses mots. Instantanément les yeux bleu azur d'Erdem se sont teintés de noir. Il m'a foudroyé du regard et s'est écrié :
- OK miss je fais les courses avec mon ex, le gros porc qui a été engrosser une autre nana pendant notre mariage. Si je suis un bouffon, t'es une bouffonne aussi.
- Ben je dis pas le contraire, j'ai murmuré pour détendre l'atmosphère.
- Tu sais quoi, je vais rentrer chez moi, je pense que ça vaut mieux. Vivre l'un sur l'autre dans un si petit espace ça nous réussit pas, on n'est pas prêts.
Il a rejoint la chambre et a commencé à ranger ses affaires dans son sac de sport. J'ai commencé à paniquer et regretter d'avoir ouvert ma gueule. Je lui ai crié de se calmer, qu'on était juste en train de discuter et que ça ne valait pas la peine d'en arriver là. Il ne m'a pas calculé. Dans un élan de désespoir, je lui ai pris le bras et lui ai demandé de rester. Il n'a pas répondu. J'ai réitéré ma demande, il n'a pas répondu. Muet le mec. Plus bouffonne que jamais je me suis mise à retirer chaque vêtement qu'il tentait d'emmener avec lui.
- Tu te crois marrante là ? Il a demandé froidement au bout de deux minutes.
- Erdem, arrête s'il te plait.
- C'est toi qui devrais arrêter ! Tu joues avec mes nerfs un jour sur deux. Ça suffit. Le but c'est de construire une relation pas de choper une migraine.
- OK je suis en partie responsable. J'ai mes torts mais t'as les tiens, reconnais-le. Si demain je te parlais de la mère de Yanis ( que je ne peux pas me voir) et que je me triturais l'esprit à l'idée qu'il perde sa mère ( ce qui ne risque pas d'arriver puis mauvaise comme elle est, elle vivra sûrement cent ans), ben, tu le vivrais mal, autrement c'est que tu ne m'aimes pas.
- Ah parce que toi tu m'aimes ? Il a interrogé en souriant.
- Ben si c'est pas de l'amour c'est quoi ? J'ai demandé en m'allongeant sur le lit, ses polos dans mes bras.
- De la possessivité ? De la bêtise ... Tout est possible avec une meuf comme toi.
- Ouais OK. Mais même si je suis relou, je suis attachante.
- Qui t'a dit ça ?
- Mon intuition.
- Elle t'a menti, il s'est moqué en s'allongeant auprès de moi.
Face à face on s'est regardés un long moment, avant de se prendre dans les bras. Il m'a dit :
- Putain, c'est chaud tu m'énerves mais tu me fais fondre.

Notre relation est fragile, j'en ai conscience, mais elle a au moins le mérite d'être vraie. On vit tous les deux dans le passé parfois et c'est ça qui nous fragilise le plus. Fidan est toujours dans un coin de sa tête, il n'y peut rien, tout comme Yanis est toujours dans un coin de la mienne même si c'est le plus grand enculé que la terre de France ait porté. Il va falloir faire avec, au moins au début et voir où cette histoire peut nous mener. Plus on s'embrouille et plus j'aime ses réactions. Erdem a toujours les mots justes pour me rappeler que je vais trop loin. Quand je pétais des câbles sur Yanis au début de notre relation, il rompait avec moi, ne m'adressait plus la parole pendant des jours. Je me rendais en bas de chez lui, je m'humiliais mais il m'ignorait. Son attitude froide et distante me faisait pleurer comme un enfant qui a peur la nuit, je le suppliais de me reprendre, fierté au fond du caniveau et grâce à mon comportement de rebeu sans honneur, de cœur d'artichaut, il exerçait un peu plus sa domination émotionnelle sur moi. Il a été si fort que même après son infidélité dévoilée au grand jour j'ai voulu rester avec lui ... Avec le recul, je me rends compte à quel point c'était malsain dès le début, mais jeune et naïve, je n'avais rien vu.
Erdem n'est pas comme ça. Mais j'ai joué avec le feu, je le sais et il était à deux doigts de me quitter, peut être pour de vrai.
Maintenant je le sais, je suis trop attachée à lui pour laisser une telle chose se produire. Il faut que je calme mes peurs et mes doutes. Néanmoins je ne suis pas folle, j'ai du pif, cette Fidan est comme le coronavirus, pénible et indécrottable. Je suis convaincue qu'elle veut récupérer Erdem, et vu tout ce que je sais de lui maintenant, je comprends pourquoi...
Je suppose qu'elle a compris que je n'étais pas que de passage dans la vie de son ex et ça m'étonnerait même pas qu'elle ait inventé toute cette histoire de réanimation pour l'attirer à nouveau à elle. Si c'est le cas, quelle connasse ! L'être humain peut aller très loin pour récupérer ce qu'il a perdu.
Seulement, je ne laisserai pas ma part aux chiens, j'en ai fini de faire la pleureuse, désormais, Erdem est mon mec et je laisserai aucune Turque aux longues jambes me le voler.
Tu l'avais, tu l'as perdu, maintenant, décale à gauche et laisse la divorcée te montrer comment on gère une deuxième chance !

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