Ce que femme veut - Part 50 - LES 4 VÉRITÉS

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Ahmed a annulé. Pris sur un dossier il m'a annoncé qu'il ne pourrait pas être là mercredi soir et m'a proposé de décaler à jeudi soir mais j'étais trop déçue pour accepter.
Je m'étais apprêtée, j'avais lissé mes cheveux, mis du parfum en cachette dans la réserve du taf pour apprendre deux heures avant le date que ça ne servait à rien!
Pour me réconforter, ce soir-là j'ai mangé un kebbab de la même taille que moi et un magnum au chocolat au lait. Il fallait au moins ça pour me réconforter. Nique la cellulite. En voyant que je ne répondais plus, Ahmed m'a envoyé un autre message :
« Salut, j'ai l'impression que tu filtres mes appels ? Peut-être que je me trompe et que t'es tout simplement occupée, mais si j'ai raison, je tiens à nouveau à m'excuser, j'ai vraiment mal calculé mon temps. Si tu veux toujours qu'on se voie dans les jours qui viennent, fais-moi signe. De mon côté c'est toujours le cas. Bises. »
Auquel je n'ai pas répondu non plus. Je sais que ça ne se fait pas et que c'est nase comme attitude mais il m'a cassé dans mon élan et la déprime s'est réinvitée à ma table. J'étais pleine d'ambitions, le plan « oublier Erdem » était lancé et je voulais vraiment apprendre à connaître ce séduisant Ahmed mais là, j'ai plus de jus. Je suis soulée. Il a suffi qu'il me fasse faux bond pour que je me rende compte du ridicule de la situation! Je suis là à me voiler la face en mode femme détachée et à courir après des vieux mecs qui n'honorent même pas un premier rendez-vous et tout ça pour quoi? Rien. C'est très grave. Je me sens comme désespérée et je déteste cette sensation. Je vaux mieux que ça. Toutes les femmes valent mieux que ça. Enfin à part Fidan la sorcière. Je regarde son profil Instagram de temps en temps, j'attends de découvrir ses nouvelles fiançailles avec Erdem avant de la bloquer. Je suis un peu maso. Non mais pour être honnête, j'ai besoin de vacances. Je crois qu'il faut que je me barre au soleil avec ma meilleure amie pour me libérer de toutes ces tensions. J'ai hâte que les frontières rouvrent. J'ai besoin d'air, de soleil, de plage, d'espoir. Il faut qu'il se passe quelque chose là. C'est affreux de rester coincée comme ça au même endroit comme un rat en cage.
Karima est toujours d'avis que je parle à Erdem, elle trouve notre rupture immature.
- Ça sert à rien de courir dans les bras d'un autre mec si t'es amoureuse de ton ex. C'est idiot.
- C'est toi qui dis ça ?
- Oui. Moi je change de mec pour changer de mec, y a pas de sentiments forts comme toi. Tu te mens à toi-même. Si tu peux ne plus calculer un mec juste parce qu'il a un empêchement et décale un rdv c'est que t'es pas dedans. Tu essaies de te convaincre que tu peux passer à autre chose mais la vérité c'est que tu joues un rôle.
- Ta gueule, j'avais fait en m'avouant intérieurement qu'elle avait raison.
- Ben oui ma grosse, si tu veux pas voir la vérité en face, je vais te la coller sous les yeux. En plus, j'ai gratté quelques infos pour toi. Erdem ne m'a évidemment pas parlé de votre embrouille parce qu'il sait que je suis ta meilleure amie et que je suis bavarde, en revanche il s'en est ouvert à Julien, un collègue journaliste et visiblement il est tristounet.
- Triste de quoi ? j'avais bégayé.
- Ben triste que ce soit fini, il lui aurait dit « on est tellement brisés qu'on en devient incompatibles. »
- J'imagine mal Erdem dire ça.
- Ben moi aussi mais les mecs quand ils ont de la peine, ils deviennent poètes, ces bitchs. Et Julien lui a demandé si c'était rattrapable, il lui a dit « bof, pas sûr parce qu'on a deux forts caractères et elle m'a mis à la porte de chez elle, donc je reviendrais pas. »
- Ouais et donc ?
- Ben je pense que si tu changeais ta photo de profil sur WhatsApp et que tu tombais malencontreusement sur lui dans le quartier, ça pourrait faciliter votre reprise de contact.
- Non mais Karima, t'as pas compris. Je ne ferai plus rien pour lui faciliter la tâche. Il est hors de question que je déclenche quoi que ce soit.
- T'es sûre de toi ? avait demandé ma meilleure amie, parce qu'à la rédaction je peux te dire qu'il y en a deux, trois qui sont déjà sur le dossier et des bombasses qui sortent de Sciences Po... Des bails d'Agathe Auproux façon ...
- Pourquoi tu me dis ça avec mépris ?
- Oh Inès ! elle s'était esclaffée, t'es relou à jouer la carte du complexe d'infériorité. C'est soulant.
- T'es sérieuse ? J'avais demandé agacée. Quelle amie dit à sa pote « y a des meufs plus belles que toi et plus diplomées que toi qui veulent soulever ton ex » ?
- De vraies bonnes amies qui essaient de booster leur pote ! Tu n'arrêtes pas de geindre, je te dis juste que si tu laisses passer trop de temps, ton Erdem ce sera de l'histoire ancienne.
- Ben c'est le mektoub ! j'avais balancé avec hypocrisie. Ce qui n'est pas à toi, n'est pas à toi. T'es là à me dénigrer sous couvert d'encouragement, tu crois que je vais le prendre comment ?
- Oh tu sais quoi, va te faire foutre, elle avait éructé, en deux minutes tu m'as soulée, j'imagine même pas comment tu dois être en couple.
- Waouh, en fait il suffit que je me plaigne un peu trop pour que tu vides ton sac ? MachAllah la meilleure amie.
- T'es tellement en stress de ne plus être mariée et de ne pas être encore maman que tu te rends pas compte que tu ne vis pas, tu survis ! Tu te mets des chaînes mentales toute seule comme si t'étais une petite rebeu des années 60. Ouvre les yeux, y a plein de choses super à vivre avant de clamser !
- C'est ultra facile pour toi de juger une meuf comme moi ! Tu fais tout ce que tu veux toi ! Tu couches avec un mec différent tous les mois, tu bois, tu fumes, tu te mets aucune limite, toi-même tu ne sais pas si tu veux un enfant, t'as aucune deadline, aucun but dans la vie, c'est normal que mon stress te paraisse absurde.
- Aucun but dans la vie ? Tu dois confondre avec toi, madame je veux monter une chaine Youtube que j'alimente tous les deux mois et je veux travailler en indé mais je suis toujours chez Séphora alors que je déteste mon taf ! Non, non, meuf moi j'ai géré mes buts, je voulais être journaliste, vivre à Paris et avoir mon indépendance, j'ai atteint mes buts, c'est juste que ma définition du bonheur n'inclut pas nécessairement le mariage et les mioches. Toi toute ta life tourne autour de ça au point de faire fuir les mecs. Pose toi des questions.
- Tu sais quoi Karima ? Tout ce que tu viens de dire là crois pas que je vais l'oublier et dis-toi bien que si en amour j'ai beaucoup pardonné, en amitié c'est pas pareil.
- Ben les meufs comme toi, qui vivent que pour la vie de couple, c'est votre mode de fonctionnement, je le sais, pour une bite et une bague à l'annulaire vous devenez conne mais les gens qui vous aiment et vous supportent no matter what, ils ont pas le droit à l'erreur. Sauf que j'ai un scoop pour toi, je suis ta seule amie donc si tu veux la jouer rancunière parce qu'on s'embrouille pour de la sémantique, vas-y mais je pense qu'on y perdra toutes les deux.
- Une bite ? Moi je deviens conne pour une bite ? Tu confonds pas nos lifes ? Combien de fois tu m'as laissé seule en soirée sur Bourges pour aller faire tes affaires ? Combien de fois t'as repoussé des rdv alors que j'avais besoin de me confier à toi parce que t'avais un date ? Combien de fois tu m'as dit « je te rappelle » et tu ne l'as jamais fait parce que t'étais dans ton love avec Johan, Sébastien, Martin, Louis ou Paul ? Celle qui fait passer la bite avant les potes, c'est TOI et pas moi.
- Oh oui il faut dire « le cœur » parce que princesse Inès n'aime pas parler de sexe ! Meuf quand tu t'es mariée, il fallait passer par ton tocard d'ex-mari pour accéder à toi ! Si j'avais pas été un peu patiente et tolérante, à cette heure-ci on ne serait plus amies. Le mariage ça t'a aveuglé, tu voyais plus ce qui se passait autour. Peut-être que j'ai tendance à consommer des hommes, je le reconnais, mais même si je laisse une amie en lu, je reviens toujours vers elle. Toi t'es la reine du no-calcul quand ça va bien dans ton couple et même si tu ne veux pas l'entendre : l'Inès que j'aime le plus, c'est l'Inès célibataire parce qu'elle est lucide.
- Genre là je suis pas lucide ?
- Non t'es aigrie et t'es menteuse ; tu te mens à toi-même. Tu l'aimes Erdem mais tu vas faire la meuf têtue et pleurer en cachette. Continue à vivre avec des dogmes : un mec ça doit faire ça, une meuf ça doit pas faire ça. Tu vas te réveiller à 45 ans, sans enfant, malheureuse et sous barbituriques. Que tu ne veuilles pas coucher avec des mecs de passage comme moi, je le comprends très bien, à chacune sa libido, mais que tu sois aussi peureuse de vivre et d'essayer d'être heureuse et de te dire « bon OK j'ai fait ce que je voulais faire tant pis si ça foire » juste parce que dans ta petite tête c'est à l'homme de s'excuser de nanani nanana ! Non je suis désolée, ça me gonfle. T'es une adulte Inès. Comporte-toi comme tel.
- Et c'est la meuf qui n'a pas tenu plus d'un mois en cohabitation avec son ex qui me dit ça ...
- Ben OK, elle a confirmé, on est toutes les deux immatures sur certains aspects de la vie adulte mais en attendant moi je suis bien dans mon petit appart solo avec ma bouteille de vin et mon CD de Snoh Aalegra. Est-ce que tu peux en dire autant ? Sans mentir ?
- ...
- Non, voilà ! Parce que toi tu vis dans la peur : peur de ne pas être mariée, peur de ne pas être maman, peur de ci de ça, c'est pas ça la vie. Je suis désolée, je préfère mon excès de liberté à cette vie de prisonnière que tu t'infliges.
- OK MERCI KARIMA, je pense que j'ai eu ma dose.
- Un jour tu verras que j'avais raison.
J'ai raccroché au même moment et j'ai ruminé devant mon plat de penne. Oui elle avait raison sur certains points mais pourquoi tant de violence dans ses propos ? Ce n'est pas ce que j'attendais d'une amie. En fait, plus je vieillis et plus je me dis que les relations humaines il n'y a rien de pire.
J'ai remis mes penne dans le micro-ondes et j'ai été dormir à 20 heures un samedi soir.
Soulée !

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