Les paysages ensevelis sous la neige d'Ecosse défilaient devant ses yeux passifs. Une secousse du train termina de faire s'échouer sa valise sur le sol de la cabine dans un bruit sourd. Elle souffla puis s'occupa d'hisser à nouveau son bagage dans les filets prévus à cet usage. Un préfet, celui de Poufsouffle, passa la tête par l'entrebâillement de la porte qu'il fit d'abord coulisser.
-Tout va bien ? J'ai entendu du bruit.
-Hm.
Il s'éclipsa, tout semblait en ordre après un furtif coup d'œil et elle n'avait pas l'air d'être d'humeur à utiliser les mots. Pearl s'enfonça de nouveau dans la banquette. Le train était plein à craquer mais par miracle, elle avait réussi à trouver un compartiment désert. Sa mine sévère dissuadait quiconque de se proposer comme compagnon de voyage, même si cela voulait dire passer des heures debout dans le corridor car il n'y avait plus aucune place à bord du convoi.
La jeune fille n'avait pas sommeil, c'est pourquoi elle se saisit d'un carnet à la couverture en cuir délavé et d'une plume avec de l'encre avant de tracer une suite de mots sur une page
J'ai embrassé un souvenir
Prometteur, déchu depuis
Délicieux et impitoyablement accablantC'était aberrant et regorgeant de stupidité, pourquoi avait-elle gaspillé cette encre ? Tonna-t-elle intérieurement en projetant son livret sur la banquette latérale. Elle plongea des yeux de poisson mort dans le vide pour le reste du voyage.
Plusieurs heures plus tard, le train arriva à destination dans des sifflements furieux et l'agitation de la foule extérieure et intérieure penchée aux fenêtres. Pearl, elle, se contenta de se saisir de sa malle avant de quitter sa voiture.
Devant celle-ci, elle croisa Rosier. Ils échangèrent un bref regard. Le jeune homme hésita, desserra le col de sa chemise sous son paletot d'un air préoccupé avant d'esquisser un pas dans sa direction, mais elle avait déjà quitté le quai, suivie par sa longue masse de cheveux ébènes fouettant impétueusement l'air étouffant de la gare.
Miss déboula hors de King's Cross, valise en main. La dernière fois qu'elle avait vu ce lieu, c'était en rêve, un rêve fidèle à la réalité qui n'avait pas tant changée depuis toutes ces années. Elle s'élança dans les rues londoniennes maussades en cette mi-décembre, emmitouflée dans des vêtements assez épais pour supporter les bourrasques glaciales et assez fins pour qu'elle frissonne à intervalles régulières.
Elle descendit dans une bouche de métro à l'angle d'une rue, tendit, une fois sur le quai, une pièce moldue à une jeune femme recroquevillée, derrière les regards, dans son coupe-vent troué. Elle prit le premier train, descendit quelques arrêts plus tard, puis remonta de sous terre jusqu'au quartier des prolétaires.
La jeune fille s'engouffra enfin, quelques instants plus tard, dans sa maison où régnait un silence caractéristique d'une trêve de deux mois. Combien de temps avant qu'elle ne soit rompue de nouveau ?
A cinq heures, elle devait aller chercher Eliot à son pensionnat. C'est en s'accrochant à cette idée qu'elle eut la force de monter déposer sa baguette, ses quelques exemplaires de La Gazette du Sorcier, une plume à papote et son manuel de Métamorphose avancée dans l'« armoire à babioles de taré ».
Elle entra ensuite dans sa chambre, se dévêtit de son paletot qu'elle balança sur sa commode défraîchie avant de s'écraser sur son lit, épuisée, laissant son baguage et le reste de ses affaires près de la porte grinçante. Elle ferma les yeux pour se reposer un instant.
Alors que le soleil embrasait le ciel avant d'émettre ses derniers figements crépusculaires, Pearl émergea de sa torpeur. La première pensée qui lui vint en tête fut la suivante : elle allait revoir Eliot, son petit frère, sa perle à elle. Elle refusa cependant de songer pour l'instant à tout ce que sa présence ici durant les deux prochaines semaines entrainait.
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Mélodie damnant |T.E. Jedusor|
FanfictieDans une pièce sordide A l'abri des regards Ivre de partitions Elle lui montre ce que l'Homme a cru voir /Cette fiction contient de la violence, un langage parfois cru et autres joyeusetés. Ne la lisez pas si vous êtes jeune ou sensible !/