Quarante huit heures plus tard, je pus sortir de l'hôpital, accompagnée de ma sœur et mon petit ami. Mes parents, qui étaient en voyage à l'autre bout du monde à ce moment-là, avaient réussi à rentrer le dernier jour de mon hospitalisation. Bien évidemment, ils étaient dans tous leurs états et s'en voulaient énormément de ne pas avoir été là au moment de l'agression. Ma sœur, bien plus désabusée que moi, leur avait répondu que de toute façon, ils n'étaient jamais là, sans cesse à vadrouiller à droite à gauche et que leur présence n'aurait rien changé.
Pour ma part, ça m'était égal que mes parents soient là ou pas. Celle qui m'aidait, qui avait toujours été là, c'était Camille. Très vite, nous avions dû apprendre à nous débrouiller et ne compter que sur nous-mêmes.
Un inspecteur était venu pour m'interroger sur ce qu'il s'était passé, mais aucun souvenir n'avait refait surface aussi, je n'avais pas pu l'aider.
Je repartais au bras d'Aurel, Camille portant mes affaires, ainsi qu'une canne blanche qu'on m'avait donnée. Les infirmières avaient bien essayé de m'expliquer un peu comment m'en servir, mais j'avais refusé. Je n'étais pas prête. Je n'avais pas encore admis que c'en était fini pour moi. On m'avait aussi conseillé d'aller voir une psychothérapeute, qui pourrait « m'aider à accepter ce changement ». Je n'en avais pas envie non plus. Rien de ce qu'on me dirait ne pourrait alléger ma peine et ma peur.
J'avais dû batailler pour qu'on accepte de me laisser rentrer chez moi. Alors que le médecin qui avait été là à mon réveil m'avait dit que je le pourrais, ses collègues et les infirmières s'étaient montrés plus réticents. Ils voulaient absolument, en plus de m'apprendre à utiliser une canne, que quelqu'un vienne chez moi m'apprendre à me déplacer dans mon appartement... mais je n'en voyais pas l'intérêt. Ma vue pouvait revenir d'un jour à l'autre, on ne savait pas à quoi c'était dû, pas besoin de tout chambouler pour si peu. Je voulais juste rentrer chez moi, là où je me sentirais en sécurité. Ils avaient fini par céder, notamment grâce à mon petit ami, qui avait assuré qu'en tant qu'infirmier, il serait présent pour m'aider à m'acclimater chez moi et que je ne serais pas seule. J'avais quand même dû signer une décharge, mais au moins, je ne resterais pas plus longtemps dans cet hôpital.
Dans la voiture qui me ramenait chez moi, j'écoutai les bruits de la circulation et de la ville. Les gens continuaient leur vie, comme si de rien n'était. En soi, rien de terrible ne s'était passé, on m'avait juste ôté ma faculté de voir, cela n'avait aucun impact sur le reste du monde.
En entrant dans mon appartement, je lâchai automatiquement le bras de mon petit-ami, pour me diriger toute seule en posant ma main le long du mur. Je le suivis ainsi, jusqu'à ma chambre et me laissai retomber sur mon lit.
— T'as besoin de quelque chose, ma chérie ?
Je gardai les yeux clos, de toute façon, ça ne changeait plus grand-chose, maintenant.
— Non, merci Cam.
— Il faut que j'aille travailler, mais Aurel est là, tu ne seras pas toute seule, d'accord ?
J'acquiesçai lentement, n'ayant pas plus envie que ça de parler.
Des pas, quelques murmures dans le couloir, d'autres pas, le matelas qui s'affaisse. Des doigts qui glissent dans mes cheveux.
— Je vais aller faire quelques courses pour remplir ton frigo, je devrais m'absenter une heure environ.
— D'accord, grommelai-je.
— Ça va aller ?
— Oui, soupirai-je, ne t'en fais pas. Je ne suis pas mourante.
— Il y a quelque chose qui te ferait plaisir ?

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DALL
ParanormalQuand elle se réveille à l'hôpital, Elia découvre qu'elle a perdu la vue. Elle ne se souvient de rien. La dernière chose dont elle est sûre est qu'elle était allée se coucher dans son lit, après une soirée un peu arrosée. Ses nuits sont bercées du...