Chapitre 23

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Lowri me soutint pour ressortir de l'enceinte du château. J'avais laissé Reed à l'intérieur, tout seul. Mais je ne pouvais pas me permettre d'hésiter, la vie de Camille était en jeu, c'était bien trop important.

Dites, si vous êtes une sorcière, vous pouvez m'aider à changer mes habits ? J'ai pas vraiment l'habitude d'être vêtue ainsi, d'ordinaire, alors si je dois me retrouver comme ça pour les prochaines semaines... comment dire : ça va pas être possible.

Celle qui me soutenait par le bras ricana doucement et deux secondes plus tard, je sentis que j'avais dorénavant un pantalon, des baskets et un gros pull sur le dos.

Merci, soufflai-je.

Je faillis trébucher et m'agrippai un peu plus à elle. Dire que j'avais enfin retrouvé ma vue, mais que cela n'aura duré que quelques jours. Des larmes se formèrent et je m'efforçai de les retenir. Je ne voulais pas pleurer, pas maintenant.

Ne vous en faites pas. Je l'aiderai à vous rejoindre et il pourra à nouveau vous rendre la vue, susurra Lowri.

Je m'arrêtai aussitôt de marcher, le cœur battant.

Comment ça ? Comment pourrait-il me rendre la vue ? jouai-je à l'idiote.

Oh, ne vous en faites pas, Elia. Cela fait quelques années, maintenant, que je suis au courant que Reed est un sorcier. Je le connais depuis qu'il est tout petit. J'ai connu sa mère, d'ailleurs. Son secret est entre de bonnes mains avec moi, je ne le dirais à personne.

Gentiment, elle m'enjoignit à redémarrer et je la suivis, réfléchissant à toute allure.

Est-ce que vous êtes la seule à être au courant ? m'enquis-je alors.

— Il me semble. À ma connaissance, personne d'autre ne sait qu'il a des pouvoirs. Et c'est mieux ainsi, pour le moment. Mais, même si on s'en prenait à lui, Reed est devenu très puissant avec les années. Je ne pense pas qu'il ait du souci à se faire.

Tant que ça ? la relançai-je.

C'est simple, je n'ai jamais connu qu'une seule personne, en dehors de lui, capable de défaire le sort de quelqu'un d'autre.

Tout en marchant, j'essayai de deviner où nous nous rendions. Mais maintenant que j'étais à nouveau dans le noir, c'était compliqué. J'avais, une fois de plus, perdu tous mes repères, sauf que cette fois-ci, je savais que c'était temporaire. En tout cas, je m'y accrochais.

Où est-ce qu'on va ? finis-je par demander.

À la gare. Il y a un wagon spécialement affrété pour vous.

Par « vous », je compris qu'elle parlait des jeunes femmes enlevées un peu partout en Europe.

Qu'est-ce qu'il va se passer, pour moi ?

— Ça, je l'ignore... Mais ne vous laissez pas marcher sur les pieds, tout en sachant garder votre place quand il le faut, pour ne pas vous attirer des ennuis. J'espère que vous retrouverez rapidement votre sœur.

J'entendis le bruit d'une locomotive et me figeai. C'était une chose de foncer dans le tas, c'en était une autre de faire face à ses responsabilités. Lowri s'arrêta et prit mes mains dans les siennes.

Quand vous l'aurez récupérée, prononcez ces mots à haute voix : « Lorg mi, a ghràidh. Thig thugam". Vous vous en souviendrez ?

Je répétai sa formule plusieurs fois dans ma tête pour être sûre de m'en rappeler et acquiesçai en même temps. Lowri posa ses doigts au niveau de mon coeur et je ressentis un léger pincement.

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