Une semaine plus tard, nous étions toujours logées au même endroit et nous pouvions enfin commencer « l'entraînement ».. J'avais le sentiment que j'aurais pu aboutir dès la première fois au point de rendez-vous, mais Hannah et Téa étaient complètement perdues à cause de cette nouvelle cécité et je ne pouvais pas les laisser se débrouiller seules, quand bien même c'était ce que l'on m'avait conseillé de faire, à plusieurs reprises.
Je pensais à ma sœur, qui devait très certainement vivre la même chose, pas loin de moi, et j'espérai de tout cœur qu'elle était avec des filles qui se soutenaient comme nous essayions de le faire avec mes deux colocataires.
— Vous avez enfin réussi à nous rejoindre, clama une des sorcières.
Je levai les yeux au ciel. Je les trouvai très désagréables et pédantes. Elles se sentaient vraiment au-dessus de nous, juste parce qu'elles avaient des pouvoirs. Parfois, j'avais très envie d'appeler Reed grâce à la formule que m'avait apprise Lowri « Lorg mi, a ghràidh. Thig thugam" et qu'il vienne les remettre à leur place. Je me répétais cette phrase en boucle chaque matin, en ouvrant les yeux et chaque soir, au moment de m'endormir. J'avais trop peur de l'oublier et je la tournai encore et encore, m'y accrochant de toutes mes forces, consciente qu'elle était ma porte de sortie.
Je n'avais aucune idée du temps qu'il faudrait à Reed pour me retrouver, mais j'étais en tout cas persuadée qu'il y arriverait.
— Asseyez-vous.
— Comme ça, par terre ? s'enquit Hannah d'un ton acerbe.
Elle poussa un gémissement et je sus aussitôt qu'elle avait été punie pour son impertinence. Elle nous avait expliqué qu'elle préférait endurer ces petites tortures que de se taire devant ces femmes. Je devais reconnaître que j'admirais sa force de caractère.
J'obéis à l'ordre qui nous avait été donné et m'assis en tailleur. Je pouvais sentir un tapis d'aiguilles en dessous de moi, qui permettait de faire une couche d'isolation avec le sol, mais je ressentis quand même l'humidité qui commençait déjà à traverser le tissu rêche de mon pantalon.
— Qu'est-ce que vous attendez de nous ? demandai-je alors.
— Restez-là et patientez jusqu'à ce qu'on vienne vous chercher.
Il y eut de l'agitation autour de nous, puis le silence. Il n'y eut plus que le son du vent qui soufflait dans les feuillages des arbres et des oiseaux qui chantaient du haut de leurs branches.
— Elles nous ont vraiment laissées ici, toutes seules ? paniqua Téa. Mais qu'est-ce qu'on va faire ? Tu saurais retrouver le chemin jusqu'à la cabane, Elia ?
— Je ne sais pas du tout... De toute façon, la consigne est claire, non ? Il faut les attendre, alors faisons comme elles ont dit.
Une goutte tomba sur le bout de mon nez, puis une autre sur ma joue.
— Évidemment, il fallait qu'il se mette à pleuvoir, râla Hannah.
Je restai en position assise et tentai de me concentrer sur ce que je ressentais autour de moi. J'avais eu le temps d'établir ma petite théorie concernant le fait qu'on nous enlève notre vue. Reed m'avait expliqué, quand j'avais appris pour ses pouvoirs, qu'il en tirait leurs sources dans toute la nature qui l'entourait. Aussi, j'étais assez persuadée désormais que si ces sorcières nous avaient rendues aveugles, c'était pour nous forcer à communier avec les éléments qui nous environnaient. Privées de notre vue, nous étions obligées de nous en remettre à notre ouïe ainsi qu'à notre toucher, à faire plus attention à une multitude de petits détails à côté desquels nous serions sûrement passées en tant normal. J'étais donc assez convaincue que si leur cérémonie marchait, nous récupèrerions notre sens perdu à ce moment-là. Mais est-ce que nous aurions toutes des pouvoirs ? Était-ce aussi facile que ça de nous « transformer » ?

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DALL
ParanormalQuand elle se réveille à l'hôpital, Elia découvre qu'elle a perdu la vue. Elle ne se souvient de rien. La dernière chose dont elle est sûre est qu'elle était allée se coucher dans son lit, après une soirée un peu arrosée. Ses nuits sont bercées du...