18 - Ils se marièrent et eurent...

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Nda :
On a jamais vraiment parlé du personnage de Claire dans les commentaires. J'aimerai avoir vos avis sur la jeune mariée après la lecture de ce chap. J'adore lire vos réactions 😉

Les boucles de laine caressaient ses chevilles dénudées. Assise sur le tapis du salon, Margot réfléchissait à la bonne formulation à intégrer à sa dissertation. Elle tournait entre ses doigts les brins duveteux et tamponnait la gomme de son crayon sur ses lèvres. Un détail dans un coin de la pièce la distrayait cependant de ses devoirs. Un sac à grandes attaches ainsi qu'une couverture roulée en boule complétaient la décoration près d'un tuya. La lycéenne appuyait son crayon dans le creux de son menton quand elle tourna la tête vers le balcon.

L'éclairage public venait de se déclencher. Les halos réguliers quadrillaient la ville tandis que le ciel orange se fondait lentement dans un mauve angoissant. Mais les yeux bleus de Margot ne captaient pas la beauté du crépuscule automnal, ils se concentrèrent exclusivement sur celui dont la silhouette découpait le ciel assombri.

Cela faisait cinq jours que Léo était revenu chez Gio et Claire. Enfin, il n'était pas revenu par ses propres moyens, évidemment. Margot se rappelait avec exactitude comment elle et monsieur Lagno l'avaient retrouvé. Elle se remémorait la force dont elle avait dû faire preuve pour le descendre jusqu'au rez-de-chaussée sans le faire tomber dans l'escalier. Le souvenir le plus frappant restait les larmes qui coulaient le long de sa cuisse à chaque battements de cils de Léo. La jeune fille s'imprégnait de la détresse de son professeur. Comment était-il possible d'être aussi malheureux ? Telle une éponge empathique, elle sentit un sanglot monter. Tout en lui caressant les cheveux, Margot se pencha lorsqu'elle entendit ses murmures :

_ Je suis désolé... Tellement...

_Tout va bien, calmez vous, murmura-t-elle à son tour.

_Pardonne moi.

_Ça va aller, on va s'occuper de vous monsieur.

Léo articula les doigts autour des mèches blondes qui lui chatouillaient le visage. Il se redressa et croisa le regard de celle qui le tenait fort :

_Me lâche pas.

Il la regardait dans les yeux mais Margot n'était pas convaincue qu'il s'adressait à elle.

_Ok.

_Me quitte jamais.

C'était sûr, il ne savait pas à qui il s'adressait. Était-il même conscient de ses paroles ?

_Ok, répéta Margot émue.

Seulement l'émotion disparut dès le lendemain, dès que Léo se rendit compte que ses meilleurs amis seraient ses geôliers. Ben, Gio et Claire avaient décidé de garder Léo en isolement à l'appartement. Ben s'était arrangé le lundi suivant pour faire passer l'absence de son collègue en congé maladie. Et il l'était réellement, malade.

Margot s'interrogea sur cette façon de faire. Elle se demandait pourquoi ils ne l'avaient pas placé en clinique ou confié à sa famille. Très vite elle devina la réponse : un lien particulier les unissait. Ils partageaient une amitié, un passé commun et surtout, ils avaient été témoins privilégiés de la dernière relation amoureuse qui avait conduit le professeur au chagrin. Qui de mieux pouvait l'aider, trouver les mots pour soigner ses maux ?

Léo ne voyait pas sa captivité comme une aide altruiste. Il avait crié. Il s'était battu. Il fallut un coup de poing sur l'arcade de la part de Gio pour qu'il écoute leur idée. Léo allait rester quinze jours enfermé, à des kilomètres d'une bouteille et surtout il ne resterait jamais seul. Cette dernière règle était la pire pour lui. La présence des autres le cloîtrait davantage dans son mal-être. Depuis quand confronter un dépressif à un couple de jeunes mariés pouvait adoucir son chagrin ?

L'art de la Nudité - tome III {Terminé}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant