Aquatilia ~ Le secret de la perdition

Partie II/7

        Le bûcher auquel Constantin avait tenté si énergiquement de mettre le feu se trouva abandonné, au même titre que le tas de poissons. Au beau milieu de la nuit, le jeune homme avait pris une décision. Il s'engouffrait maintenant dans la forêt noire, s'éloignant du sous-bois où il avait trouvé refuge. 

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        Sur le chemin qui la dirigeait vers le temple, Thelma tourna le visage sans s'arrêter en lançant un rapide regard vers l'entrée de la cité. Comme elle s'en était doutée, deux guerrières montaient la garde pour empêcher quiconque de quitter Aquatilia. La sirène écourta vite cette vision contrariante, puis accéléra le rythme de sa nage.

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        Constantin ralentit à l'orée de la forêt. D'un geste de la main, il écarta une branche qui entravait ce qu'il voyait. Le jeune homme observa la plage à distance, tapi dans l'ombre.

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        La sirène entra dans la lumière du temple. Elle sonda le vaste lieu, en retrait. Les aciers claquaient par dizaines. Les guerriers profitaient activement de cette nuit pour s'entraîner.

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        Les pirates jouissaient d'une bonne nuit de sommeil, que la symphonie des ronflements attestait sans mal. Les positions grotesques de bien des hommes laissaient présager qu'ils s'étaient effondrés, la tête dans le sable, avant même d'avoir pu envisager le confort d'une tente. Les plus malchanceux somnolaient, luttant corps et âme pour rester éveillés, comme leur ronde de nuit l'exigeait.

        Constantin posa un regard préoccupé sur ceux qui ne dormaient pas, tout ensachant qu'il n'avait pas d'autre choix que celui d'agir. Il réfléchissait, passant en revue toutes les possibilités. Il scruta le feu en se concentrant, puis repéra plusieurs affaires qui semblèrent l'intéresser, notamment un gros sac rempli de filets.

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        Les yeux de Thelma cessèrent brusquement de s'agiter quand elle trouva enfin celui qu'elle cherchait. Argos était présent, aux côtés des jumeaux avec qui il s'entretenait. Artemus, quant à lui, semblait absent. Thelma patienta. Elle s'efforçait de transformer sa nervosité en motivation, en attendant le moment opportun.

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        Constantin souffla fort, luttant contre un stress de plus en plus envahissant. Il avala une dernière fois sa salive, puis s'élança.

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        Thelma s'avança, nageant en direction d'Argos, désormais seul. Le dirigeant de Xenoria n'avait pas remarqué la présence de l'Aquatilienne. Cette dernière se manifesta malgré tout. Argos fit aussitôt volte-face au son de sa voix.

        -J'ai à vous parler Argos, murmura-t-elle. Demain, retrouvez-moi dans ma chambre, dès que vous le pouvez. Vous saurez où me trouver. Je laisserai ma grille ouverte tout le jour.

        L'homme-sirène n'avait rien manqué à ce discours, aussi franc que concis. Il observait maintenant Thelma s'éloigner en sachant pertinemment que la conversation à venir s'annonçait délicate. Sa mine était devenue soucieuse. Il semblait dans l'embarras.

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        L'île, jusqu'alors blottie dans les bras de Morphée, s'anima brutalement. La végétation fut secouée de part en part, dans une humeur de révolte. Des hurlements s'élevèrent, terrorisant les animaux à peine tirés de leur somme.

        Une torche à la main, un sac dans l'autre, Constantin courait à grandes enjambées. Il déguerpissait comme une furie pour tâcher de semer les pirates qu'il avait si fièrement volés. Le jeune homme gardait à l'œil ses poursuivants. La présence de quelques flammes qui éclairaient localement la forêt lui permit d'évaluer la distance. Il avait de l'avance, mais pas assez.

        Constantin tourna soudain sur sa droite, à angle droit, quittant le sentier pour un autre, nettement plus étroit. Il poursuivit sa course effrénée sur plusieurs mètres puis stoppa net, tendant l'oreille malgré son souffle assourdissant qui le parasitait. Il comprit que les pirates s'éloignaient. Ils avaient continué sur la voie principale, en toute logique.

        Mais alors qu'il croyait tout danger écarté, le jeune homme se tétanisa d'effroi au son de craquements de feuilles et de branchages. Un homme venait en sa direction, et rapidement. Constantin lâcha les filets et recula, prêt à affronter son adversaire. Il se cacha en bord de chemin, puis empoigna fermement sa torche des deux mains. L'éclat des flammes trahirait à coup sûr sa présence. Constantin le savait, il n'aurait que peu de temps pour agir. Les pas se rapprochaient. Sans crier gare, un pirate costaud apparut en trombe. Il s'agissait de Cuba. Au même moment, le jeune homme se précipita sur lui, puis le matraqua violemment avec sa torche. Le bois incandescent ravagea la joue gauche du pirate. Ce dernier trébucha dans un grognement atroce. Il perdit l'équilibre en tombant en arrière. Sa tête percuta un rocher, mettant fin à toute plainte.

***

        Constantin croqua dans la chair du poisson. D'autres cuisaient tranquillement, au bout d'une pique. Le jeune homme pouvait enfin se sustenter, se réchauffant au coin d'un feu qui gardait les ténèbres du sous-bois à distance. À ses pieds, filets et cordages entremêlés dépassaient négligemment d'un sac en toile sur lequel il veillait.

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