Partie IV/4

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        Les deux monts sous-marins se distinguaient au loin. Thelma impulsa sa nageoire en comprenant que le voyage touchait bientôt à sa fin.

        Elle surplomba les massifs puis plongea, s'engouffrant entre les deux parois. Son corps passait dans la fente. Elle descendit en diagonale, tandis que la luminosité chutait au fil des mètres.

        L'étroit couloir qui constituait les fonds marins était tapissé de plantes bioluminescentes qui diffusaient un éclairage doux mais suffisant. Thelma stabilisa sa position quand elle s'en rapprocha. Elle poursuivit ensuite son chemin droit devant elle, le corps parallèle au sol.

        De petits poissons prirent la fuite en apercevant la sirène. Les araignées de mer étaient quant à elles moins farouches, continuant à gambader sereinement au fond du précipice en déployant avec lenteur leurs pattes rouges, longues et fines.

        Thelma ralentit devant une impasse. Face à elle, le mur était vertigineux, s'étirant en altitude sur plusieurs centaines de mètres. Elle repéra soudain l'entrée qu'elle cherchait, dissimulée dans la pénombre. Elle s'y faufila aussitôt, en faisant onduler rapidement sa queue de poisson à l'instar d'un serpent des mers.

        La sirène traversa la cavité sous-marine dans laquelle elle venait de s'aventurer. Son corps paraissait minuscule au milieu de ce vaste espace. Il y avait une certaine lourdeur dans les flots. Les sons étaient étouffés, plus que d'ordinaire, rendant l'atmosphère enivrante. Quant au décor, il était magnifique. Des caustiques dansaient sur les parois revêches. Dans le clair-obscur, des rayons de lumière transparaissaient entre les galeries. C'était précisément vers cette lumière que la sirène se dirigeait.

        Elle battit de la nageoire, remontant à la verticale jusqu'au lit de la surface. Le visage de Thelma émergea des flots et son regard se posa sur l'intérieur d'une nouvelle petite grotte, ou plus exactement sur la fin de la précédente.

        Tout à coup, la tête de la jeune fille pivota sur la gauche quand elle entendit des rires lointains. Le rideau d'eau d'une cascade s'était invité dans son champ de vision, s'interposant entre elle et l'extérieur lumineux. Elle s'en approcha lentement, puis quitta les lieux en le franchissant.

        Les yeux de la sirène s'écarquillèrent soudain. Elle parut vite stupéfaite. Ce n'était pas la première fois qu'elle voyait de beaux paysages mais celui-ci était sans pareil.

        Les immenses montagnes circonvoisines gardaient le repaire secret. Elles s'élevaient sur une cinquantaine de mètres, drapées d'une verdure luxuriante. C'était un endroit de rêve, un vrai lagon paradisiaque. Les eaux étaient cristallines et partout autour des cascades grondaient. Insectes et oiseaux butinaient les plantes, bioluminescentes pour la plupart, dans une ambiance exotique et quelque peu féerique.

        Des bruits d'éclaboussements précédèrent d'autres rires. Deux personnes venaient de jaillir des flots. Thelma les avait entendues sans les voir, un homme et une femme d'après les voix discernables. Son attention se porta sur la cascade derrière laquelle ils étaient cachés.

        « Arrête ! »

        La demoiselle inconnue contestait tout en s'esclaffant, tandis que des bribes de son corps agité émergeaient du rideau d'eau par intermittence. Ses paroles se transformèrent ensuite en baragouinages. Thelma comprit que son partenaire s'amusait à la plonger dans le jet de la cascade.

        « Lucius, stop ! Elle est là ! »

        À ces mots, Thelma se figea. Elle fut étonnée sur l'instant que la sirène eût pu déceler sa présence, sans pour autant l'avoir vue. Mais les choses tombèrent très vite sous le sens. Il s'agissait de l'Oracle.

Aquatilia ~ Le secret de la perditionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant