Les Peuples des Ombres

Chapitre 52

Elle venait d'avoir tout juste dix-huit ans.

Jeune, insouciante, coupable d'avoir voulu rêver dans un monde où ce n'était plus permis.

C'était un soir obscure, semblable à celui qu'elle venait de vivre.

Ils étaient tous à table: Sa mère, son père et son frère. Comme d'habitude, une bonne partie de la discussion était focalisée sur Riffin et sur ces prouesses au tournois qu'il venait de remporter dans sa catégorie. Etna écoutait silencieusement la conversation rêvant secrètement que sa mère la complimente, elle aussi, sur son parcours à elle.

Tout tournait toujours autour de Riffin.

Riffin le fils parfait, Riffin le petit player au visage d'ange qui faisait sourire toutes ses interlocutrices, Riffin le jeune garçon extraverti que tout le monde adulait.

Etna n'avait pas le droit à des compliments venant de ses parents. Elle avait beau aimer profondément son frère, un sentiment destructeur d'injustice la consumait peu à peu.

Puis sa mère a divagué sur un autre sujet, en lui rappelant qu'elle était conviée à une soirée pour la jeunes filles de la haute société. Sauf qu'Etna avait déjà quelque chose de prévu. Elle restait persuadée que sa mère le savait pourtant très bien et qu'elle faisait exprès de prétendre le contraire, pour donner aucune estime à ce qu'elle avait prévu à la place. Etna lui a alors rappelé qu'Elijah organisait ce même jour une réunion « post tournois » pour faire le point avec tous les membres de l'armée.

« Encore cette prétendue fonction au sein de la l'armée? Tu sais très bien qu'il faudra penser un jour à grandir, pour construire un véritable avenir », lui avait-elle répondu.

Riffin n'avait pas eu le droit à la même réflexion.

Pourtant il participait comme elle a cette réunion, dans le même but.

Ce n'était pas juste. Encore une fois.

Etna avait renchéri que cette réunion était importante pour sa carrière, et que sa présence y était fortement conviée.

Sa mère a alors toisé sa fille d'un regard condescendant, en pinçant ses fines lèvres recouvertes d'une couche écarlate de rouge à lèvres.

« Ce n'est pas une carrière, ce que tu fais. C'est un passe temps inutile, qui te dévie de ce qui devrait être ton occupation principale, c'est à dire construire un foyer et soigner ta réputation », lui avait-elle répondu dans une froideur absolue.

La jeune fille avait alors baissé les yeux, fixant tristement le contenu de son assiette encore intact.

« C'est pourtant ce que je veux faire comme métier plus tard », avait-elle répliqué doucement.

C'était une époque où la jeune femme paraissait encore calme et docile face à sa mère. Elle ne lui répondait jamais.

« Regarde-toi, Etna. Tu te crois vraiment que tu es la capacité de faire ce que font ces hommes? Soit réaliste, pour une fois. » Avait renchérit sèchement Asidis.

Sauf qu'Etna avait envie, ce soir-là, de convaincre sa mère que ce qu'elle faisait lui convenait.

« Rod dit que j'ai les capacités de devenir une grande guerrière...» Murmure-t-elle, les yeux humides.