Chapitre 3

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Deux heures et trois bus plus tard, j'arrive à destination, je cherche les clés et active l'ouverture du coffre de la voiture que j'ai loué il y a trois mois. Je balance mon gros sac à côté des valises faites au cours de ces derniers mois : trousse de toilette, vêtements, chaussures... J'ai tout ce qu'il faut pour démarrer une nouvelle vie loin de ce salaud !

20h03, il ne faut pas que je traîne ! Je récupère mon sac à main et échange mes nouveaux papiers : passeport, permis, cartes bancaires et les glisse dans mon portefeuille. Je ne suis plus Mia JONES, mais Allyana DAVIS née le 27 janvier 2003 à Paris, brune aux yeux bleus, de mère française et de père américain.

Je m'installe au volant, ferme les yeux quelques secondes pour profiter du sentiment de liberté que je ressens à l'instant, j'ai la sensation de respirer vraiment de nouveau.

Après avoir mis le contact, un fou rire me prend. Alexi n'a jamais su que j'avais appris à conduire avec Igor, le mari de Soli, pendant qu'il gérait ses trafics.

Je n'ai jamais pu passer le permis car mon emploi du temps était trop surveillé et minuté, mais avec de l'argent et mon réseau dans le dark web, j'ai pu m'acheter de faux papiers sur supports officiels.

Après m'être calmée je démarre direction l'aéroport de Nice, j'en ai pour au moins une heure de route. Il faut que je passe chez le loueur pour rendre la voiture et que je file au terminal 1. Mon vol est prévu à 23h28, le temps d'enregistrer les bagages et de passer les contrôles ça va être juste...

— Bonjour, j'ai réservé un vol pour Dallas au nom d'Allyana Davis.

L'hôtesse me dévisage les yeux écarquillés, argh j'avais oublié mon apparence... Même si ça a dégonflé depuis tout à l'heure, mon visage reste bien marqué, je n'ai pas pris le temps de camoufler comme j'ai l'habitude de le faire. Avec un sourire qui se veut rassurant sur mon état, je lui demande de nouveau :

— Pouvez‑vous regarder s'il vous plaît ? Voici mon passeport.

— Bien... bien sûr Mlle DAVIS, avez‑vous des bagages ? me demande‑t‑elle en bafouillant de gêne.

— Oui juste là, en lui montrant de la main le chariot à bagages.

— Très bien, l'embarquement a commencé, je les préviens que vous arrivez, c'est à la porte F18.

Je lui souris et la remercie.

Heureusement les contrôles de sécurité se passent sans problème. Rapidement, je peux monter dans l'avion. À peine installée, j'aspire une grande bouffée d'oxygène, j'y suis presque, je vais pouvoir dire adieu à cette vie.

Plus de 17 heures d'avions m'attendent. Après une escale à Paris, je suis dans un direct jusqu'à Dallas.

Je suis épuisée, dormir un peu me fera du bien, je prends la couverture, abaisse mon siège et m'assoupit.

— Seigneur Mia, que s'est-il passé ?

Maman me secoue, me parle mais j'ai la tête lourde, j'ai du mal à reprendre mes esprits. Je l'entends mais je n'arrive pas à parler, tout est noir autour de moi. Elle appelle quelqu'un au loin. Il y a d'autres voix, je les connais c'est Igor et Soli.

— Faites quelque chose, elle ne se réveille pas !

Je me force à ouvrir les paupières.

— Mon bébé ouvre les yeux ! Oui c'est bien, comme ça.

Elle me sourit, les larmes roulent sur ses joues. J'essaie de parler mais les mots restent bloqués dans ma gorge. J'ai la tête sur ses genoux, je vois Solinea partir et revenir aussitôt avec un verre d'eau. Je bois quelque gorgée, ça fait du bien.

— Alexi, lui dis‑je d'une voix rauque presque étouffée.

— C'est lui qui t'a fait ça ?! Oh mon dieu, il m'avait juré de ne jamais lever la main sur toi, je suis tellement désolée ma chérie. Est‑ce qu'il t'a... ?

Elle cherche ses mots et je sais ce qu'elle me demande, je la rassure.

— Non pas comme ça Maman.

Elle souffle de soulagement, et me dit ces mots tremblants :

— Tant qu'il s'en prenait à moi je pouvais le supporter mais là...

Son regard est empli de chagrin.

— Je vais le quitter, je ne sais pas encore comment mais on va partir avec Dimitri, il est petit mais il...

Je ne lui laisse pas finir sa phrase car je sais que c'est dur pour elle malgré tout. La peur est tellement présente, des années d'intimidation, de soumission... Je pose ma main sur la sienne et hoche la tête.

Depuis ce jour‑là, maman s'organise dans le dos d'Alexi pendant que je m'occupe de Dimitri, dès que j'ai fini les cours.

Elle doit venir me récupérer au lycée, nous partons ce soir, elle a mis son avocat et ami au courant, il doit lancer la procédure de divorce et la demande de garde de Dimitri dès que nous serons loin, en sécurité. Ça fait une heure que j'attends, elle n'est toujours pas là; je vérifie mon portable, aucun message. Je vois une voiture au loin arriver, je me rapproche doucement sur le bord du trottoir et me raidis quand je vois qui en sort : Alexi ! Il a le visage grave, un mélange de colère et de peine.

— Mia monte dans la voiture ! Tout de suite !

— Pourquoi c'est toi qui viens me chercher ?

Il me regarde avec animosité, tout son visage se crispe d'irritation quand il colle son visage au mien.

— Ta mère a eu un accident avec Dimitri, ils sont morts tous les deux ! Dans sa tentative de fuite, elle roulait si vite qu'elle a raté un virage et a fini dans le ravin ! Si tu avais fermé ta putain de bouche, elle n'aurait jamais essayé de me quitter ! C'est de ta faute Mia ! J'ai tout perdu et je vais te le faire regretter, tu vas...

Je n'entends plus rien, mes oreilles sifflent, mes jambes ne me tiennent plus, je tombe au sol et je hurle, je hurle si fort que ma gorge et mes poumons brûlent.

— NONNNNN MAMANNNN, DIMITRIIII

Je me réveille en sursaut, le souffle haché, le visage trempé de larmes; ce cauchemar me hante depuis deux ans. J'essaie de retrouver mes esprits et observe ce qui m'entoure. Respire Mia ! Je suis dans l'avion, en fuite, mais toujours en vie. Mon voisin de siège me considère avec stupeur, je tente un sourire rassurant :

— Désolée, l'avion me rends toujours nerveuse.

L'hôtesse nous informe que nous allons bientôt atterrir, je vérifie l'heure; j'ai dormi 10 heures d'affilée. C'est parfait, je ne me suis pas rendu compte du trajet interminable.

Enfin débarquée, il est 23 heures, je suis sur le sol américain. Même si j'ai bien préparé mon départ, une légère angoisse apparaît, me faisant stoppée net quelques secondes aux pieds de la passerelle. Ai‑je fait le bon choix ? Est‑ce que je vais trouver celui que je cherche ?

DARK ANGELS - TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant