A ta place

Trou noir

Lorsqu'ils arrivèrent Square Grimmaud, Harry se tendit, inquiet. Sirius s'en rendit compte puisqu'il posa une main rassurante sur l'épaule de son filleul.
- Ne sois pas inquiet, gamin. Quand Dumbledore t'a envoyé chez tes moldus alors que je pouvais te garder en sécurité, je me suis légèrement mis en colère. Suffisamment pour le virer de ma maison lui et son ordre... Si toi tu n'es pas en sécurité, alors eux non plus.

Le brun écarquilla les yeux, stupéfait.
- Tu as... interdit à Dumbledore de venir ici ? Pour moi ?
- Dumbledore et les autres. Étrangement, Molly a été tout à fait d'accord avec moi quand elle a appris pourquoi j'étais aussi furieux. Elle a passé un sacré savon au Directeur...
Harry gloussa de ravissement, les yeux pétillants à l'idée que son parrain qu'il idôlatrait ait pris sa défense de cette façon.

Scorpius observait l'interaction en silence, toujours intéressé d'en savoir plus. Son père ne lui avait jamais parlé de cette histoire d'Ordre, il avait juste dit que la lutte contre Voldemort avait été majoritairement menée par un petit groupe proche de Dumbledore...

Le Serpentard grimaça en entrant dans la maison sombre et poussiéreuse, un peu surpris de découvrir que Sirius Black vivait dans un tel endroit. S'il devait qualifier la maison, il dirait qu'elle était lugubre et déprimante. Et les têtes d'elfes empaillées accrochées aux murs ne faisaient que renforcer ce sentiment d'oppression.
Sirius dût voir son regard puisqu'il eut un petit sourire d'excuses.
- C'est la maison de ma famille. Ils étaient... et bien, à l'image de cet endroit maudit. Mais je n'ai nulle part ailleurs où aller, où rester en sécurité. Ici le Ministère ne pourra pas venir me débusquer puisqu'elle est sous fidelitas.

Harry renifla, l'air mécontent.
- Mais tu détestes cet endroit ! Il doit bien y avoir d'autres possibilités pour te mettre en sécurité...
Sirius eut un sourire triste et pressa doucement l'épaule de son filleul. Puis il soupira et afficha un large sourire, redevenant le Sirius joyeux habituel. Celui qui avait l'air de ne rien prendre au sérieux...
Ce n'était qu'une façade, un moyen de se protéger probablement.

Sans un mot de plus, Sirius conduisit les garçons dans leurs chambres et les laissa s'installer pendant qu'il repartait leur préparer un dîner.

*

Ils étaient en train de manger avec appétit les sandwichs rapidement confectionnés par Sirius, quand d'un coup Harry se raidit. Il laissa échapper un gémissement de douleur et avant d'avoir pu expliquer ce qui lui arrivait, il glissa de sa chaise et perdit connaissance.

Scorpius se précipita vers lui, le coeur battant, affolé. Sirius s'assura rapidement que son filleul ne s'était pas blessé et il s'installa près du petit brun, le surveillant attentivement, l'oeil sombre.
Le Serpentard paniquait de plus en plus en voyant que le jeune homme ne se réveillait pas, d'autant plus qu'il semblait souffrir, s'agitant et grimacant.
- Qu'est-ce qu'il a ? Pourquoi...
Sirius soupira, résigné, son regard gris empli de souffrance alors qu'il veillait le jeune homme à terre.
- Harry est lié à... Tu-sais-qui. J'ignore de quelle façon, bien que je soupçonne Dumbledore d'en savoir plus qu'il ne le dit. Dans ces cas là, sa cicatrice le fait souffrir. Lorsque tu l'as empêché de foncer au Ministère, il avait eu une vision envoyée par... Enfin. Il n'y a rien à faire, juste s'assurer qu'il soit en sécurité et être là pour lui. J'ai beau chercher je n'ai pas encore trouvé ce que je pouvais faire...

*

Lorsque la douleur avait explosé dans son front, Harry s'était crispé. Il avait perdu connaissance avant même de se rendre compte qu'il tombait au sol, et qu'autour de lui deux personnes s'inquiétaient. Après la désagréable sensation de tomber dans un trou noir, Harry avait ouvert les yeux en pleine réunion de Mangemorts.

Sans surprise, Voldemort était fou de rage. Il allait et venait devant ses Mangemorts agenouillés devant lui. Nagini était lovée à ses pieds, indifférente au remue-ménage, probablement en pleine digestion, et Harry ne voulait vraiment pas savoir qui elle digérait.

Soudain, le Mage Noir s'immobilisa et commença à parler d'une voix sifflante et doucereuse.
- Où est ton fils, Lucius ?

Harry comprit immédiatement ce qui se passait, et il continua d'observer la scène, essayant d'occulter la douleur qui le rendait fou.
- Maître... Il n'était pas à la gare. J'ignore où il se trouve. Il aurait dû...

Il reçut un Doloris puissant, et il s'arqua, hurlant à s'en déchirer les cordes vocales. Lorsque Voldemort cessa le sort, l'aristocrate gisait au sol, haletant, incapable de se relever.
- Il devait être marqué ! Il était essentiel à mes plans ! Tu le savais et tu l'as laissé s'échapper !
Le Mage noir reprit ses allées et venues en marmonnant, jetant de temps à autres un sort à un Lucius au bord de l'inconscience.

Une dernière fois, il s'immobilisa devant le blond et se pencha vers lui.
- Trouve le moi Lucius. Trouve le moi rapidement ou tu en paieras le prix !

Puis, sans états d'âmes, Voldemort commença à torturer Lucius Malefoy, alternant Doloris et sorts de découpes jusqu'à envoyer son Mangemort aux portes de la mort.

**

Harry ouvrit péniblement les yeux, nauséeux, pour tomber sur deux prunelles grises familières. Drago Malefoy était penché au dessus de lui, visiblement inquiet.
Le Gryffondor sentit son coeur accélérer, et il força un sourire rassurant.
- Ça fait combien de temps ?
La voix de Sirius, un peu plus loin, lui répondit pleine d'inquiétude.
- Une demi-heure. Tu nous as fait peur gamin...

Harry se redressa, appréciant l'aide de Drago. Il s'éclaircit la gorge et saisit avec reconnaissance le verre d'eau fraîche qui lui était tendu. Puis, après s'être désaltéré, il soupira.
- Voldemort était furieux. Réellement furieux. Il voulait marquer Drago et... apparemment il avait prévu de te donner une mission qui lui tenait à coeur.

Scorpius se figea et écarquilla les yeux. Puis il secoua doucement la tête et souffla.
- Il voulait que je tue Dumbledore. C'est...
Harry lui posa une main rassurante sur le bras, permettant à Scorpius de se reprendre et de s'empêcher de trop en dévoiler, et lui sourit.
- Tu es à l'abri, personne ne te trouvera ici !

Sirius intervint doucement.
- Ce n'est pas tout, n'est-ce-pas Harry ?
Le brun hésita et regarda d'un air désolé son camarade qu'il appréciait de plus en plus malgré leurs années de rivalité. Il prit une voix douce, tout en laissant sa main sur le bras de son camarade, comme pour l'apaiser au mieux.
- Je suis vraiment désolé Drago. Mais il a torturé ton père. Il... il lui a ordonné de te retrouver au plus vite et il s'est acharné sur lui, encore et encore.

Scorpius resta silencieux, incapable de savoir comment réagir. Il n'avait jamais connu son grand-père Lucius. Quand il était né, l'homme était déjà mort à Azkaban. Son père en parlait peu, et Scorpius savait qu'il avait aimé cet homme distant et pas vraiment affectueux malgré tout, parce qu'il était son père. L'homme qu'il avait découvert l'été précédent avait été trop absent et trop occupé pour qu'il puisse vraiment s'attacher à lui.
Il se sentait touché que Lucius ait été blessé par sa faute, évidemment. Mais il était bien plus soulagé d'avoir évité la marque.

Le jeune homme soupira et ferma les yeux. Une fois de plus, l'image de son père Drago, ivre mort, baignant dans une mare de son propre sang, son bras mutilé par ses propres soins apparut derrière ses paupières et il finit par dire, tristement.
- Il a fait ses propres choix, et il en paie le prix.

Puis, d'un ton neutre, il s'excusa et quitta la pièce pour aller s'isoler dans sa chambre, pour digérer tout ça et tenter de démêler ses sentiments sous le regard inquiet de Harry.

Prompt de demain : Hystérie