Les Yeux du Pouvoir - Tome 4 : Vert Ombre [Terminé]

Chapitre 10 - Le procès de la Mort

Le retour s'était déroulé dans une lourde tension pesante, renforcée par le silence et l'expression sombre de colère que portaient Aurore et Liroy. Le calme de ce dernier, bien loin de son comportement habituel, inquiétait également beaucoup.
Parmi les membres de l'expédition, seuls les trois "généraux" de Victor y participant savaient exactement ce qu'il était arrivé, puisqu'ils avaient ordonné au reste du groupe de rester sur place pendant qu'ils intervenaient. Seul Jean, nécessaire pour soigner et sauver Nolwenn, avait eu l'autorisation de rejoindre les lieux de l'incident, mais il n'avait eu aucun détail sur ledit incident et n'en savait pas davantage que ses compagnons. Tout le monde dans le groupe exigeait donc des explications sur ce qu'il s'était passé.
En entendant ces interrogations, Aurore ne pouvait retenir un sourire amer et contrarié.
Ce qu'il s'était passé ? Comme beaucoup le redoutait dans la faction depuis son arrivée, Erika était devenue totalement incontrôlable, voilà ce qu'il s'était passé.
Évidemment, Erika avait toujours été inquiétante et il y avait comme un accord tacite en place pour l'éviter mais personne ne s'attendait réellement à ce qu'elle massacre de sang froid des personnes simplement parce qu'elle les avait croisées sur son chemin. Sans compter qu'elle s'était montré obstinée et presque impossible à raisonner.
Victor aurait pourtant dû le deviner. Après tout, cela faisait partie de son rôle que de cerner les gens avec efficacité et sûreté. Aurore considérait donc que le jeune homme britannique avait une part de responsabilité dans ce morbide incident, bien que la source principale de sa colère en cet instant restait évidemment Erika.
Si seulement elle avait pensé à conserver un œil sur Erika mais elle devait avouer que, dès qu'elle avait vu Léo au milieu de ce complexe commercial, elle avait oublié tout le reste et n'avait plus songé qu'à engager le combat, ce qu'elle avait fait sans tarder.
Seulement pour quelques minutes cependant car, alors qu'ils s'affrontaient au milieu de leurs camarades, tous deux séparés par quelques mètres où se déchainaient le feu et l'eau, un message, dont elle n'avait pas saisi les propos à cause du fracas du combat ambiant, avait jailli du téléphone de Léo, branché sur la fonction talkie-walkie. Le jeune homme avait dressé tout autour de lui un mur de flammes de façon à s'isoler et à se protéger durant quelques secondes pour écouter ce dont il était sujet.
À travers les flammes, il avait été impossible pour Aurore de distinguer précisément son expression. C'était pourquoi elle s'était pressé, entre autres raisons, de générer suffisamment d'eau pour les éteindre.
Là, elle avait découvert le regard jaune de Léo luisant de fureur. Ça avait été la première fois qu'elle voyait ses yeux malicieux refléter un pareil sentiment.
Sur le coup, la jeune femme avait cru que c'était son action qui l'avait ainsi enragé, il n'y avait pas d'autres termes pour définir cet état dans lequel il était entré. Ce qui l'avait étonnée car, depuis deux ans qu'ils s'affrontaient régulièrement, recherchant d'ailleurs souvent eux-mêmes la confrontation, du moins dans le cas d'Aurore, jamais elle ne l'avait vu réagir de la sorte, avec autant de fureur.
Fureur qu'il avait déchainé dans sa magie. Un véritable tunnel de feu dégageant un souffle ardent, qui avait éloigné tout le monde dans un mouvement de peur et un réflexe de survie, avait tourbillonné jusqu'à Aurore, créant un couloir amenant directement à elle.
Stupéfaite, la jeune femme n'avait aucunement été capable de réagir alors que Léo s'était rué vers elle pour la saisir par le col de son blouson, qu'elle portait toujours par-dessus son haut de maillot de bain, et approcher son visage du sien, les collant presque l'un à l'autre.
Avec cette proximité, Aurore avait remarqué qu'il n'y avait pas que de la colère dans le regard d'or de Léo mais également beaucoup d'inquiétude, cependant, elle avait été trop effrayée en cet instant pour réellement l'analyser.
À cette minute, elle avait pris conscience de quelque chose qui l'avait faite trembler de tous ses membres mais qui, présentement, lui faisait serrer les poings de contrariété. Dans tout les cas, elle avait été ébranlée car elle avait soudainement compris que, si il avait vraiment voulu, Léo aurait pu la balayer de ses flammes sans grandes difficultés. Il l'avait prouvé par cette action. Jusqu'ici, il n'avait fait que jouer avec elle.
Il ne l'avait cependant pas attaquée, même si c'était ce qui aurait semblé évident dans la position qu'il avait instaurée. À la place, il lui avait rapporté, sans se départir de cette expression, qu'Erika avait coincé plusieurs d'entre eux, qu'elle avait tué un homme inconnu et gravement blessé l'une d'entre eux et qu'elle avait donc intérêt à rapidement intervenir car il l'estimait responsable, comme c'était à elle de garder le contrôle de ses hommes.
S'étant remise de sa surprise, Aurore avait immédiatement ordonné la suspension des combats, rapidement imitée par Léo.
Après avoir rallié Liroy, dont l'attitude avait également radicalement changé lorsqu'elle lui avait expliqué la situation, elle avait suivi Léo sur les lieux de l'incident, dont ils s'étaient chargé.
Même si cet événement remontait à présent à presque une heure, Aurore ressentait toujours cette sensation d'impuissance et de petitesse qu'elle avait éprouvée face à Léo, quand ses yeux l'avaient transpercée. Cela se manifestait notamment par une certaine frustration qui se rajoutait à sa colère dirigée contre Erika.
A moins qu'elle ne détourne vers sa camarade les émotions normalement adressées à l'encontre de Léo. Effectivement, peut-être qu'elle se focalisait sur Erika pour éviter de songer au jeune homme mais elle comptait tout de même bien qu'Erika assume et porte la responsabilité de ses actes.
Arrivant dans l'immeuble que la faction occupait, le groupe se dispersa vers différentes tâches. Erika tenta de s'y mêler, peut-être pour se soustraire au jugement de Victor auquel Aurore et Liroy avaient l'intention de la soumettre. Le jeune homme usa de sa magie pour la tirer à eux, la faisant chuter et la trainant au sol, certainement volontairement.
Tout en la ramassant en lui serrant fermement le bras Liroy lui demanda dans un sifflement colérique, en une question purement rhétorique, si elle comptait aller quelque part. Erika lui répondit dans un grognement qui découvrit ses dents, la faisant encore davantage ressembler à une bête enragée.
La poigne de Liroy se resserra encore davantage autour de son bras et il entraina brutalement Erika à sa suite vers l'étage où se trouvait la pièce qu'ils utilisaient pour leurs réunions stratégiques et où Victor passait beaucoup de son temps, Aurore sur les talons. Le jeune homme ouvrit la porte à la volée d'un coup de pied, faisant sursauter Alana, Lavande et Victor installés à l'intérieur. Il jeta Erika contre la table où elle se heurta violemment avant de tomber à terre parmi les chaises, une main sur le crâne, quelque peu sonnée.
Se levant, les sourcils froncés, Victor commença :