Une heure et demie passa dans la rue où était survenue cette tragique interruption dans la marche.
Une heure et demie durant laquelle les ambulanciers s'occupèrent des blessés, dont tous n'étaient pas uniquement dus aux balles tirées mais également aux mouvements de panique survenus dans la foule, les policiers évacuèrent les attaquants vers le centre de détention, à quelques kilomètres à l'extérieur de la ville, ainsi que les corps de victimes décédés, au nombre de deux, dont Shikou.
D'autres officiers se chargèrent de récolter les témoignages de toutes les personnes présentes, ce qu'ils n'avaient pas encore terminé au vu du nombre, participants à la marche ou curieux l'ayant regardée passer, et des caméras de télévision se pressèrent sur les lieux pour relayer l'incident, filmant les visages choqués et interviewant ceux qui acceptaient d'être interrogés.
Tout le monde était plus ou moins en état de choc, commençant tout juste à réellement comprendre ce qu'il était arrivé, encore plus pour les connaissances des deux victimes.
À cela se rajoutait la culpabilité, le sentiment que tout était de sa faute, sensation qu'Eléa ne pouvait s'empêcher d'entretenir en se répétant mentalement que, si elle n'avait pas souhaité organiser cette marche, une chose pareille ne se serait jamais produite, qu'elle n'aurait pas dû décider de faire l'itinéraire une seconde fois, ça n'aurait pas permis aux anti-magiciens de se poster à un endroit où les attendre pour leur tendre cette embuscade, qu'elle aurait dû faire autrement. Elle se considérait comme largement responsable.
Sans compter que les efforts qu'elle avait choisi de fournir, prenant grandement sur elle, après sa conversation avec Belladone, avaient volé en éclats, avec lesquels elle était incapable de reconstruire quoi que ce soit qui aurait pu lui permettre de tenir face à la violence et à la haine qui la détruisaient, lorsqu'elle avait découvert le cadavre de Shikou.
C'était certainement à cause de cette volonté qui l'abandonnait subitement qu'elle avait sombré dans l'inconscience face à la vision du corps sans vie de Shikou qu'on couvrait d'un draps.
Elle avait repris conscience il y avait quelques instants et, depuis, elle ne cessait de trembler de tous ses membres, pourtant, elle n'avait pas froid, du moins, pas d'une manière ordinaire. Elle avait froid à l'intérieur.
Probablement averti de son réveil par la secouriste qui avait veillé sur elle en vérifiant ses constantes vitales le temps de son inconscience, Gabriel monta dans l'ambulance où on l'avait installée. La prenant dans ses bras, il s'enquit de son état et elle ne put qu'éclater en sanglots, bouleversée et culpabilisant pour cette tragédie qu'elle s'imputait.
S'apaisant après de longues minutes à verser des larmes douloureuses, elle retourna la question à Gabriel, comme fournir une réponse à ce dernier paraissait plutôt inutile, mais que, lui, avait toujours cet étrange regard qu'elle lui avait remarqué lorsqu'il était sorti d'un des immeubles à la suite des policiers.
À l'interrogation d'Eléa, ses yeux se voilèrent un instant et il détourna le visage, l'expression fermée avec quelque chose de douloureux, puis, serrant les poings sur ses jambes, il confia à Eléa :« Dans l'immeuble, j'ai vu...une femme. Elle a braqué son arme sur moi et elle allait me tuer. Tanguy est intervenu juste à temps (Eléa se raidit à cette information, encore davantage bouleversée alors qu'elle venait d'apprendre que celui qu'elle aimait avait ainsi frôlé la mort il y avait moins de deux heures et comprenant pourquoi il portait une telle expression. Elle alla pour le prendre et le serrer dans ses bras en lui assurant qu'il était en sécurité à présent, se rassurant elle-même par la même occasion, pour le réconforter, mais il poursuivit, la stoppant :) Cette femme, je la connais.
- Quoi ? Comment ça ? S'étonna Eléa.
- (Gabriel prit une profonde inspiration avant de lâcher :) C'était ma mère.
- Quoi ? S'exclama Eléa, sa voix montant dans les aiguës.
- Je sais à quoi elle ressemble parce que j'avais trouvé une photo dans le téléphone d'Adriel. J'ai fouillé dedans, j'en suis pas fier mais j'étais curieux. C'était elle. Je suis tombé face à elle et j'ai été incapable de réagir. Heureusement que Tanguy était là. Elle m'aurait tué, j'en suis sûr. Et elle m'a reconnu aussi, je le sais, mais elle aurait tiré quand même. Elle savait que j'étais son fils mais elle m'aurait abattu quand même sans aucune hésitation.
- Je veux pas avoir l'air d'être cynique ou quelque chose comme ça mais, avec ce que tu savais de cette femme, tout ce qu'Adriel nous a raconté, t'attendais réellement quelque chose d'elle ?
- Non, pas vraiment, mais ça m'a quand même...fait quelque chose...
- Je comprends. C'est normal. »
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Les Yeux du Pouvoir - Tome 4 : Vert Ombre [Terminé]
ParanormalTrois ans se sont écoulé depuis la mort de Lucille. Traumatisé par celle-ci, Victor a refusé de se rendre et Saint-Théophile est aujourd'hui une véritable zone de non-droit désertée par sa population où s'affrontent les suprématistes magiciens, men...