Nolwenn fut la première à quitter les lieux, les mâchoires contractées et sans prononcer un mot, rejoignant leur cachette à pas furieux et ravalant ses larmes qui n'étaient pas uniquement de rage. Adriel la suivit rapidement en jetant un regard plein de colère vers l'endroit où s'était tenu Liroy à défaut de pouvoir l'adresser directement à ce dernier.
N'ayant plus aucune raison de s'attarder après cette singulière entrevue qui leur laissait les sourcils froncés, les autres leur emboîtèrent le pas, excepté Irwan. Restant sur place, il gardait les yeux bas et une expression sombre masquée par l'obscurité ambiante.
Le remarquant, Monsieur Belforde stoppa pour se tourner vers lui mais, avant qu'il ne lui demande pourquoi il ne venait pas en s'assurant que tout allait bien, Irwan expliqua qu'il voulait seulement vérifier encore une fois que Liroy était bien seul et qu'il les rejoindrait dès que ce serait chose faite. Ils n'avaient donc pas à l'attendre ou à s'inquiéter.
Monsieur Belforde acquiesça sans être pour autant totalement serein et il lui conseilla de faire attention et de ne pas trop s'attarder. Etre seul à l'extérieur, surtout en pleine nuit, dans les circonstances de la guérilla était risqué. D'un ton peu concerné, semblant songer à autre chose, peut-être déjà concentré sur ses pouvoirs, ou alors répondant par convenance à une phrase qu'on ne cessait de répéter à tous pour toutes sortes de situations, Irwan promit d'être prudent et de se presser de terminer pour revenir le plus rapidement possible.
Même si il en aurait fallu davantage – de simples mots ne suffisaient plus vraiment en terme de sécurité depuis longtemps – pour qu'ils soient rassurés, les autres le laissèrent pourtant, ils jugeaient étrange cette soudaine volonté de s'assurer à plusieurs reprises de l'absence de complices, surtout alors que Liroy était déjà parti, mais ils avaient trop d'autres préoccupations en tête pour réellement se questionner et avaient, pour l'instant, surtout envie de se coucher pour dormir.
L'unique question posée à ce dernier fut donc celle de Monsieur Belforde et Irwan se retrouva seul dans ce quartier industriel, entouré des silhouettes sombres et inanimées des hangars et des entrepôts, uniquement vaguement éclairé par la lueur blanche que projetait son téléphone portable et qui dessinait une flaque de lumière à ses pieds.
Le jeune homme se retourna pour être certain que plus aucun de ses compagnons n'était à portée d'oreilles, susceptible de capter ces mot, même seulement en partie, puis il revint faire face au coin qu'il observait depuis qu'il avait rejoint le groupe.
Il s'agissait d'un angle que formait un bâtiment anciennement utilisé par une entreprise de paysagisme entièrement noyé d'obscurité, si bien que n'importe quoi, ou qui, aurait pu s'y trouver sans que personne ne le soupçonne, même en se tenant à proximité. Ce qui était exactement le cas.
A défaut de pouvoir percer l'ombre de son regard, même avec un recourt à sa magie, et d'ainsi révéler la cachette qu'offrait la nuit, Irwan pouvait en revanche compter sur son ouï, qui était probablement le sens dont il usait le plus quelles que soient les circonstances.
C'était d'ailleurs grâce à ses oreilles qu'il avait repéré la huitième personne n'ayant pris part à la conversation que par sa présence discrète qu'elle s'était efforcé de dissimuler, avec un succès plutôt efficace, comme Irwan devait être le seul à l'avoir remarquée grâce à son écoute. D'ailleurs, même Liroy ne devait pas savoir qu'il avait été silencieusement accompagné.
Tout le monde aurait pu en être informé si, après son repérage, Irwan n'avait pas choisi de taire cette présence en la gardant sous silence, mentant plus ou moins par omission aux autres.
Il ne s'en sentait guère coupable car il savait que cette décision ne représentait pas un danger, pour le moment et qu'il n'en représenterait pas non plus dans quelques temps. Sans compter qu'il avait également l'intention d'entamer une discussion, étant ainsi certain de désamorcer une éventuelle conséquence désastreuse qui aurait mis le groupe en danger, provoquée par son silence.
A présent qu'il se retrouvait face à son interlocutrice, il se sentait cependant beaucoup moins assuré ou confiant, ne trouvant pas ses mots, peinant à formuler ses pensées ou ne trouvant même pas ce qu'il voulait dire exactement.
Qu'escomptait-il précisément en taisant le fait qu'une huitième personne assistait à la conversation ? Quel était donc son but ?
Irwan n'avait pas vraiment de réponse. Ça avait presque été une pulsion que ce désir de lui parler seul à seule à l'abri des regards d'autrui et de leur jugement.
Que voulait-il lui dire ? Que pouvait-il lui dire ? Qu'y avait-il encore à se dire ?
Il n'allait néanmoins pas rester ainsi piqué au milieu de la rue en se demandant quel sujet aborder. Il refusait également de rebrousser chemin vers le quartier général en feignant que son affirmation sur la solitude de Liroy était bien la vérité pour lui comme pour ses compagnons car il considérait que ça aurait été de la fuite, ni plus ni moins, qu'il en aurait emporté des regrets et que, face à lui, elle aurait parfaitement deviné qu'il avait noté sa présence et qu'il feignait pourtant que ce n'était pas le cas.
Si il s'opposait donc à ces deux premières possibilités, il ne lui en restait plus qu'une seule : faire ce qu'il comptait faire en s'attardant dans les parages et engager la conversation.
Le jeune homme serra les poings en inspirant profondément pour se donner du courage et il lança, semblant, pour quelqu'un d'extérieur, s'adresser au vide :
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Les Yeux du Pouvoir - Tome 4 : Vert Ombre [Terminé]
ParanormalTrois ans se sont écoulé depuis la mort de Lucille. Traumatisé par celle-ci, Victor a refusé de se rendre et Saint-Théophile est aujourd'hui une véritable zone de non-droit désertée par sa population où s'affrontent les suprématistes magiciens, men...