CHAPITRE 9 : IDÉE AMBITIEUSE

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La semaine s'était écoulée lentement, de manière maussade. Les jours s'étaient suivis, aussi monotones les uns que les autres. À présent, Hinata était juste reconnaissant que son jours de repos soit enfin arrivé. La journée était déjà bien entamée et il n'avait même pas encore quitté son lit.
Depuis son appel téléphonique avec Kageyama quelques jours plus tôt, Hinata se sentait vide. Le soir même, il avait eu l'impression que la souffrance qu'il ressentait allait le dévorer de l'intérieur mais le lendemain, cette douleur insoutenable avait disparu, ne laissant derrière elle qu'un grand vide. Depuis, Hinata, totalement anesthésié, avait l'impression d'avoir activé une sorte de mode automatique. Chaque jour, il s'était levé, était allé travailler puis était rentré, avant de recommencer. Chaque jour, il ne faisait ni plus ni moins que ce qu'on attendait de lui. Il avait cette horrible sensation d'être une coquille vide dénuée d'émotions, de sentiments.
Et aujourd'hui, alors qu'il n'avait aucune tâche à exécuter machinalement, ce vide semblait vertigineux. Il en était paralysé, là, ainsi allongé sur son lit, incapable du moindre mouvement.
De plus, tout au long de la semaine, sa jambe droite l'avait fait souffrir à chaque pas, chaque jour un peu plus que la veille. Cela ne l'avait pas franchement aidé à se sentir mieux. Il n'avait rien dit, ni à Kenma, ni à Amaya. Il avait simplement subi sa douleur en silence, en essayant de boiter le moins possible en leur présence. Il savait qu'il aurait dû de nouveau sortir ses béquilles, mais il se l'était refusé. Travailler dans un café avec des béquilles était encombrant. Et puis il n'avait plus l'habitude de devoir les ressortir après les avoir rangées si récemment.
Hinata soupira longuement, brisant le silence qui régnait dans le petit studio. Il changea de position en faisant attention à sa jambe et s'enfonça un peu plus sous la couette. Il n'avait envie de rien. Cette journée ne l'intéressait pas. Et actuellement, toute la vie qu'il avait devant lui ne l'intéressait guère plus.

*

La veille

Kenma était soucieux. En cette fin de matinée, il venait de quitter le café de Hinata. Ce dernier ne semblait pas lui-même. Il avait l'air complètement déconnecté de la réalité. Ce n'était pas qu'il était distrait comme il avait pu l'être quelques temps auparavant, c'était plutôt qu'il semblait vide de toute émotion. Et Kenma n'avait pas réussi à l'atteindre. Ni aujourd'hui, ni deux jours plus tôt quand il était passé au café. Cela lui rappelait une période qui avait été bien sombre pour Hinata, et cela ne lui plaisait pas du tout.
Pour ne rien arranger, il avait remarqué que la démarche du jeune homme avait changé, malgré ses efforts apparents pour cacher ce changement. Kenma avait tout de suite compris ce que cela voulait dire. Sa jambe faisait de nouveau des siennes et Hinata préférait l'ignorer ou était tout simplement dans le déni.
Quitter Tokyo deux à trois semaines en laissant Hinata dans cet état ne l'enchantait guère, mais il n'avait pas vraiment le choix.

En effet, plus tôt dans la journée, Kenma avait reçu un appel de sa mère. Celle-ci s'était fracturé une côte lors d'une mauvaise chute. D'après ce qu'elle lui avait dit, elle allait bien et ne subissait aucune grave conséquence si ce n'était une intense douleur. Ceci dit, pour son bon rétablissement, il lui fallait rester au lit pendant deux à trois semaines, et elle avait besoin de Kenma pour l'aider à s'occuper d'elle et de la maison. Kenma avait évidemment accepté sans hésiter – après s'être arrangé avec son employeur pour travailler à distance – et avait voulu en parler à Hinata à l'instant, mais celui-ci n'avait pas semblé ouvert à la discussion, et Kenma avait alors eu une idée.
À vrai dire, il n'était pas sûr que ce soit une excellente idée. Mais Hinata allait avoir besoin d'aide au café, qu'il l'admette ou non. Lui allait quitter la ville et Amaya était bien trop occupée pour travailler bénévolement sur son temps libre. À Tokyo, Hinata n'avait personne d'autre. C'était donc assez naturellement que Kenma était arrivé à la dernière option, rendue flagrante par son récent retour dans la vie de Hinata.
Il baissa les yeux vers son téléphone, où était noté le numéro de Kageyama. Il avait profité d'un moment d'inattention de Hinata pour lui piquer son téléphone et pouvoir récupérer le numéro. Il avait ensuite remis l'objet à sa place comme si rien ne s'était passé.
Kenma hésitait. Hinata allait sûrement lui en vouloir s'il faisait ce qu'il comptait faire sans même lui en parler. Mais s'il lui en parlait, il refuserait la proposition. C'était sûr et certain. Malheureusement, ce n'était pas un luxe que Hinata pouvait se permettre. Alors Kenma balaya ses derniers doutes et appela le numéro.

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