DERNIER SET

CHAPITRE 33 : À CŒUR OUVERT

4 ans plus tôt

Kenma avait un mauvais pressentiment. Toute la matinée, il avait tenté de l'ignorer en s'occupant l'esprit mais rien n'y faisait, la sensation persistait et lui tordait l'estomac.
Ces derniers temps, Hinata allait mal. À vrai dire, cela faisait des années qu'il n'avait pas vu Hinata heureux. Depuis qu'il s'était blessé, Kenma l'avait vu s'enfoncer dans un gouffre sans fond et tous ses efforts pour l'en extirper avaient été vains.
Mais ces dernières semaines, sans qu'il ne comprenne pourquoi, la dépression dans laquelle était plongé Hinata semblait s'être aggravée. Ce dernier ne sortait plus, passait ses journées au lit, s'alimentait à peine et semblait avoir abandonné toute hygiène de vie. Kenma avait fait de son mieux pour l'aider mais la dépression était une maladie et face à cela, il n'était pas armé. Il avait essayé de le convaincre de ne pas abandonner la thérapie mais il n'était pas retourné voir sa psychologue depuis bien trop longtemps. Il se sentait désemparé et ne savait pas quoi faire de plus. Il ne s'était jamais senti aussi inutile de sa vie.
Kenma soupira en balançant le livre qu'il essayait de lire depuis un moment sans réussir à se concentrer. Il fallait qu'il aille voir Hinata. Il n'avait pas eu de ses nouvelles depuis la veille et il était injoignable. Ce n'était pas si inhabituel mais l'angoisse qui lui prenait peu à peu la gorge commençait à le rendre fou. Il avait besoin d'aller s'assurer par lui-même que son ami allait bien.
Après avoir pris le métro et marché un peu, Kenma se retrouva devant la porte de l'appartement de Hinata et frappa avec force. Il attendit, tendant l'oreille à l'affût du moindre bruit, mais il n'entendait qu'un silence assourdissant. Il répéta ce manège plusieurs fois, en criant son nom en plus, sans succès. La porte était bien sûr verrouillée, balayant le maigre espoir qui lui restait. Il essayait de rester calme mais l'angoisse s'était transformée en véritable panique.
Il essayait de rester rationnel en se disant que Hinata était peut-être tout simplement sorti, mais son instinct le poussait à vouloir entrer dans cet appartement coûte que coûte.
Il arrêta donc de tambouriner à la porte et passa à une méthode plus brutale en envoyant de grands coups de pied dedans. L'immeuble de Hinata était vieux et mal entretenu, la porte allait bien finir par céder, tôt ou tard. Et plus rapidement qu'il ne l'aurait pensé, la porte céda effectivement et il se rua dans l'appartement.
En à peine quelques secondes, Kenma prit conscience de l'ampleur du cauchemar qui s'étalait devant ses yeux. Hinata était inconscient sur son lit, d'une pâleur extrême. À côté du lit, sur la table de nuit, se trouvait le flacon de ses antidouleurs.

- Shoyo ! Shoyo ! s'écria Kenma en se précipitant vers lui.

En un coup d'œil, il vit que le flacon était vide et eut l'impression de se prendre un seau d'eau glacée sur le crâne.

- Non, non, non... Shoyo... Mais qu'est-ce que t'as fait ? Non, non... Pas ça, murmura-t-il en essayant de réveiller Hinata en le secouant.

Rien n'y faisait. Hinata ne se réveillait pas. Kenma avait l'impression d'être dans une dimension parallèle. Ce ne pouvait pas être réel. C'était impossible.
Il s'accorda une seconde pour prendre une grande inspiration. Il devait garder son sang-froid, c'était une question de vie ou de mort.
Alors la vue brouillée, les mains tremblantes, il positionna deux doigts au niveau du cou de Hinata et fut légèrement rassuré de constater qu'il sentait un pouls, même s'il semblait plutôt faible. Il s'empara ensuite de son téléphone et dut s'y reprendre à deux fois pour appeler les urgences. Il mit aussitôt l'appel en haut parleur et laissa son téléphone à côté de lui avant de poser de nouveau ses doigts sur le cou de Hinata afin de s'assurer que le pouls était toujours bien présent.

- Allô bonjour, je suis l'opératrice des services de secours. Quelle est votre urgence ? demanda une voix féminine à l'appareil.
- Mon ami... il a pris des médicaments, il est... il est inconscient, expliqua Kenma, la voix entrecoupée par des sanglots.
- Monsieur, est-ce que votre ami respire ?
- Je... je crois, je sens son pouls mais... vraiment pas beaucoup. J'ai... j'ai besoin d'aide... vite !
- Donnez-moi votre adresse actuelle, une équipe sera bientôt sur place.