DERNIER SET

CHAPITRE 24 : VIRÉE À SHIZUOKA (2)

Hinata et Kageyama s'étaient promenés un moment dans la ville de Shizuoka. La balade avait été agréable mais l'ambiance détendue qui les avait animés au marché les avait quittés. Et pour une fois, la tension entre eux ne venait pas de Hinata, mais bien de Kageyama. Depuis son attaque de panique, il avait compensé son embarras par une froideur hostile et Hinata ne le savait que trop bien. Ses mécanismes de défense n'avaient visiblement pas changé et lui donnaient l'impression de toujours le connaître par cœur.
Mais Hinata était fatigué de marcher. Il était fatigué de cette atmosphère où une conversation banale devenait une véritable montagne à gravir. Pour autant, il n'avait pas envie de rentrer maintenant. Il ne voulait pas que cette journée, qui avait été bien plus sympathique qu'il ne l'avait envisagé, se finisse sur cette note.

- Tu veux pas qu'on aille se poser ? proposa-t-il alors, brisant le silence qui s'était installé. Pourquoi pas sur la plage ? On est en fin d'après-midi, on pourra voir le coucher de soleil, ça peut être sympa.
- Si tu veux, grommela Kageyama en haussant les épaules d'un air maussade.

Hinata soupira. Cette affaire n'était pas gagnée d'avance. Ce fut donc en silence qu'ils marchèrent jusqu'à la plage. Une fois sur place, ils s'assirent côte à côte dans le sable, à quelques mètres de là où venaient mourir les vagues.
Hinata inspira profondément l'air marin, prenant le temps de le savourer. Il se sentait bien. Ses mains s'enfonçaient dans le sable froid et la sensation des grains qui roulaient entre ses doigts le détendait. La mer s'étalait devant lui, scintillant sous le soleil couchant. La plage était vide, aucune personne ne se détachant à l'horizon. Il se sentait apaisé et en paix. Il jeta un coup d'œil à Kageyama qui prenait soin d'éviter son regard, le visage fermé. Il soupira de nouveau. Il se sentait presque apaisé et en paix.

- Écoute, Kageyama, dit-il un instant plus tard, le regard rivé sur la mer. Tu as fait une crise d'angoisse. Ça arrive. T'as pas à être aussi gêné.
- Pourtant, c'est embarrassant. Et puis tu dois mourir d'envie de me poser des questions, dit-il avec amertume, fixant lui aussi la mer.
- Ce n'est pas embarrassant. Et tu ne me dois aucune explication là-dessus. Donc je ne t'en demanderai pas. Mais si tu veux en parler... tu peux.

Hinata se tourna vers Kageyama avec un petit sourire et celui-ci hocha la tête. Il était cependant toujours mal à l'aise, cela se voyait parfaitement. Hinata eut alors une petite idée de ce qu'il pourrait lui dire pour l'aider à se détendre. Il prit une grande inspiration pour se donner du courage parce que s'ouvrir, ne serait-ce qu'un peu, était difficile pour lui aussi.

- Tu sais quoi ? Je sais un truc sur toi que tu trouves embarrassant. Alors je vais te raconter un truc sur moi que je trouve embarrassant, dit-il d'un ton qui perdait peu à peu de son assurance, le regard de nouveau rivé sur l'horizon. Après m'être blessé, il m'a fallu trois ans pour pouvoir retourner dans un gymnase avec un terrain de volley. Trois ans, Kageyama.

Il rit d'un rire qui sonnait faux.

- La simple idée de retourner à quelques mètres d'un terrain de volley, même en tant que spectateur, me faisait faire des crises d'angoisse. Pathétique, non ? Tout ça pour dire que... voilà, je connais ça. Et je sais que c'est vraiment gênant quand ça arrive au mauvais moment.

Hinata regardait toujours droit devant lui mais voyait en vision périphérique le visage de Kageyama tourné vers lui. Pourtant, incapable d'affronter son regard, il resta immobile.

- Tu n'es pas pathétique, dit Kageyama avec douceur en posant une main réconfortante sur son épaule. Tu es fort.

Un frisson parcourut le corps de Hinata. Était-ce dû à cette main, à ces mots ou tout simplement au vent frais s'insinuant entre ses vêtements ? Il ne le savait pas. Il se sentait bien et c'était tout ce qui comptait. Il ne voulait pas en savoir plus. Il voulait juste profiter de cet instant agréable.