CHAPITRE 60 : ABANDON

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D'un pas excessivement énergique, Hinata marchait jusqu'à son café, encore complètement retourné d'avoir vu Kageyama. Il ouvrit la porte de son commerce avec une brusquerie non nécessaire et s'avança droit jusqu'au comptoir avant de se laisser tomber sur une chaise haute sous le regard inquiet de Kenma.

- Déjà rentré ? Tout s'est bien passé ? demanda ce dernier après quelques secondes de silence.
- Kageyama était là ! explosa alors Hinata avant de se rappeler qu'il y avait des clients. Kageyama était là et je suis parti sans même me renseigner sur les formations existantes parce que je suis un crétin, ajouta-t-il entre ses dents serrées.

Kenma haussa les sourcils et s'accouda aussitôt au comptoir pour se rapprocher de Hinata.

- Vas-y, je t'écoute. Raconte-moi tout.

Oscillant entre l'exaspération et le désespoir, Hinata relata rapidement sa rencontre avec Kageyama. Sur le chemin du retour, il s'était rendu compte qu'il avait quitté l'université tellement vite qu'il n'était pas du tout passé par les services de scolarité pour se renseigner sur les formations de coach. Il l'avait réalisé bien trop tard pour avoir le courage d'y retourner. Alors entre ça et Kageyama, il avait l'impression de s'être déplacé pour rien, d'avoir dérangé Kenma pour rien et cela le déprimait.

- Amaya va être dégoûtée d'avoir manqué ça, dit simplement Kenma avec un petit rire quand Hinata eut fini de parler.

Ce dernier le fusilla du regard, si bien qu'il ajouta :

- Mais sinon, avant de refuser son aide, vois ce qu'il peut faire pour toi. Ce serait débile de rater une opportunité.
- Quoi, t'es d'accord avec lui ?

Hinata se sentit outré de voir Kenma lever les yeux au ciel puis le regarder comme s'il était le dernier des idiots.

- Il faut être pragmatique dans la vie, Shoyo. S'il te propose un coup de pouce qui ne te coûte rien et qui pourrait vraiment te faire avancer, tu serais vraiment un gros crétin de ne pas l'accepter. Je sais pas si t'as remarqué mais la vie, ça se passe pas souvent comme prévu et les opportunités, ça nous tombe pas dessus tous les jours. Alors arrête d'être immature et s'il te recontacte, écoute au moins ce qu'il a à dire.

Hinata poussa un long soupir et s'affala sur le comptoir, dépité.

- Depuis quand t'es aussi raisonnable, toi ? Je croyais que tu détestais Kageyama et que c'était mieux pour moi de rester loin de lui.
- J'ai bien compris que vous vouliez pas vous lâcher, alors autant que tu en profites, répliqua Kenma comme si c'était une évidence.
- Tu es diabolique.
- Pragmatique, Shoyo. Pragmatique. Sur ce, je dois aller servir tes clients puisque t'es trop occupé à chouiner sur le fait qu'une star du volley veut t'aider à devenir coach.

Kenma s'éloigna du comptoir et Hinata soupira une nouvelle fois. Il réfléchissait à s'en faire des nœuds au cerveau et cela l'épuisait. Avec un peu de chance, Kageyama n'était pas sérieux et ne lui proposerait jamais son aide. Ainsi, Hinata n'aurait pas à choisir entre son ego et le bon sens.

*

C'était un soir de plus où Hinata fermait le café. Comme toujours lorsqu'il avait fini le nettoyage de la salle, il avait tout éteint excepté la lumière au-dessus du comptoir, plongeant la pièce dans une semi-obscurité. Les stores étaient baissés, si bien qu'il n'avait aucun état d'âme à s'affaler sur son comptoir, assis sur une chaise haute.
Quelques jours étaient passés depuis sa petite visite à l'université et depuis, son humeur était encore plus maussade qu'avant, bien qu'il n'eût pas cru cela possible. D'une part, être au café l'ennuyait de plus en plus et d'autre part, Kageyama hantait ses pensées en permanence maintenant qu'il l'avait revu et cela devenait franchement invivable. Il aurait rêvé pouvoir débrancher son cerveau de temps à autre.
Alors qu'il contemplait le vide, sa lourde tête pesant sur ses bras, Hinata sursauta en entendant des coups secs frappés à la porte du café. Le coeur battant à toute allure, il attendit une seconde avant de se retourner, durant laquelle il pensa qu'il ne pouvait y avoir qu'une personne pour toquer à la porte de son café à une heure aussi tardive.
Après une grande inspiration et une main passée dans ses cheveux ébouriffés pour tenter de les aplatir, Hinata descendit de sa chaise haute et avança jusqu'à la porte dont le store était également baissé. Il distinguait vaguement une silhouette. Sans plus y réfléchir, il tira le verrou et ouvrit.
Ce fut sans surprise qu'il posa son regard sur Kageyama, qui se tenait devant la porte dans la pénombre de la rue. Son visage impénétrable était encadré par ses cheveux lâchés qui virevoltaient au gré de la brise qui passait. Hinata sentit son coeur battre un peu plus fort devant cette vision digne d'une œuvre d'art, ce qui ne l'empêcha pas de demander d'un ton sec :

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