La mere

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Jamais enfanter ne lui vint à l'esprit.
Le foutre jeté à tout vent jamais ne coula dans une vallée enchantée pour y faire pousser des choux ou des roses.
Il séchait au soleil de l'été et finissait par laisser sur la peau rien d'autre qu'une bave d'escargot.
Sa mère, toujours le regardait comme une branche morte.
Mais cette tige était bien vivante, raide et cinglante quand le soleil se levait, raide et cinglante quand le soleil s'affaissait derrière l'horizon.
La lune encore s'étonnait de tant de vitalité.
Il se reconnaissait dans les enfants des autres et avoir des enfants comme on a des meubles lui avait toujours paru stupide et incongru.
La semence coule (ou jaillit) de l'urètre épanoui
Et dans la nuit profonde elle tombe sur le corps tendre d'un amant réjoui,
Qui ne songe à rien d'autre que de prendre sommeil.
Récompense du plaisir longtemps attendu.
Le foutre coule sur les draps, le matin en sera témoin.
Sa mère, toujours le regardait comme une branche morte.
Elle lui parlait d'héritage et de descendance
Comme les rois et les reines s'inquiètent de la naissance d'un dauphin.
Raison d'Etat dont Florent n'avait que faire.
Il errait sur la lande sans but et sans fin, c'était comme un fils mort.
Le bateau avait lâché l'amarre et voguait sur les flots d'une mer incertaine.
Prise mâle qui jamais ne rencontra de femelle.
Roi maudit!
Héritage et descendance, ainsi la mère exerce son implacable pouvoir.
Sur des temps lointains qu'elle ne peut voir.
L'horizon, d'un coup, s'est éteint.
Ainsi vient la nuit.
Ainsi vient le jour pour celui qui se libère des chaînes et regarde la vie sous un angle nouveau.
La mère bornée, obstinée, frappe des poings dans la nuit.
Vengeance!
Héritage et descendance...
Petite bourgeoisie morte et stérile qui s'angoisse de la fin d'une lignée!
Les enfants de Florent sont les enfants du monde, de diverses couleurs, mais toujours avec le sourire, et la vitalité du soleil qui se lève.
A quoi bon lui faire le reproche de ne rien posséder quand la vie n'est pas faite uniquement de choses matérielles?
Douleur de la mère d'avoir souffert d'enfanter pour rien.
Pour rien?
Douleur sournoise, plaie profonde qui jamais ne guérira.
Il faudra enterrer la mère avec ses regrets.
Dans la tombe encore elle étouffera de rage.
Elle poursuivra le fils de sa haine tenace.
Le fils qui lui échappé et réussit à être ce qu'il voulait être
Le fils étranger
Il défie le monde, le fait tourner à l'envers et le rend beau comme le soleil.
La mère refuse de lui en rendre grâce.
Son obstination est sa perte mais elle ne voit que son chemin étroit.
Les yeux fermés elle entrera dans la tombe.
Les yeux ouverts encore, elle n'y voit guère, car en son âme il fait sombre.
La mère ne croit pas à l'enfer,
Mais à l'impérieuse nécessité de la descendance.
Elle est son chapelet.
Sur le sol de marbre elle le laissera tomber après avoir abandonné toute espérance.
A jamais les persiennes restent  fermées.

Gay Paris Où les histoires vivent. Découvrez maintenant