Religion

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Que peut la science contre la religion? Rien si elle n'est pas une explication totale du monde. Et si elle y parvenait? L'angoisse des prêtres de toutes les religions a toujours été le savoir.
La religion a toujours voulu être une réponse simple aux angoisses du monde.
Quitte à se prendre les pieds dans le tapis. Lors d'une petite escapade de fin d'année, Florent et son mari avaient passé quelques jours à Bourges. Ils étaient rentrés dans la cathédrale au moment du sermon et ils avaient pris place. Nous étions en plein débat sur le mariage gay. Du haut de sa chaire le prêtre expliquait sans rire au parterre docile des fidèles que Jesus avait une famille normale, avec un père et une mère. Depuis des siècles les croyants sont censés être crédules et ignares. Joseph avait quand même un moment pensé à répudier sa femme car il n'était pas le père. Et la mère qui n'avait jamais vu le loup? Le prêtre ne voyait-il pas que son argument était faible et que le toit de l'église pouvait lui tomber sur la tête? Écœuré par tant de bêtises , Florent et son mari sont sortis de l'église.
La science est-elle meilleure? N'est elle pas, elle-même, inféodée à la morale?
Lorsque le père de Florent découvrit bêtement l'homosexualité de son fils en fouillant dans ses papiers, il décida, avec sa mère, que la science pouvait les aider. Comment cela se fit? Pour les details, Florent l'ignorait encore. Assez vite et avec le pragmatisme qui caractérisait sa mère. Il est probable qu'ils demandèrent au médecin de famille de leur indiquer un psychologue. Autant que Florent s'en souvienne, il rencontra d'abord un homme avec ses parents et ce dernier les orienta vers une femme auprès de laquelle il prit rendez-vous. Florent avait compris à demi-mot que le praticien avait voulu rassurer ses parents en leur laissant entendre que l'adolescence était la période des expériences et que la situation était vraisemblablement plastique. La bonne blague. Florent n'avait que seize ans mais déjà pas mal d'heures de vol. De plus il n'avait aucun doute sur la nature de ses désirs. La psychothérapie démarra sur un malentendu qui convenait à tout le monde car on évitait ainsi la confrontation directe. Le problème était externalisé, éloigné, neutralisé.
La psychologue chargée de l'affaire voulut l'embrigader : pour que la thérapie fonctionnât, il fallait que Florent participe financièrement, en versant une partie de son argent de poche. Il refusa tout net. Ses parents avaient un problème à régler, pas lui.
Après plusieurs séances Florent fut étonné de constater que les conversations ne tournaient nullement autour de son homosexualité, mais concernaient l'opinion très négative qu'il avait de ses parents et en particulier de son père. Ces causeries au coin du feu n'étaient pas désagréables (il faisait souvent rire son interlocutrice). Elles lui permirent de mieux situer le rôle respectif de son père et de sa mère.
L'aventure prit fin lorsque son père eut le courage de lui demander si ces causeries étaient vraiment utiles. Avait-il réfléchi que c'était peine perdue? Et de l'argent jeté par la fenêtre? Florent n'avait certes rien changé à son mode de vie. S'en était-il rendu compte? Que leur avait-on vendu? Une thérapie de conversion? La proposition n'avait sans doute pas été aussi radicale. Ses parents avaient veillé à une éducation catholique pour leurs enfants mais c'était pour la galerie. En réalité ils étaient athées, et même, son père était assez anti-clérical. Donc leur intervention n'avait pas de fondement religieux et Florent avait échappé à la torture morale d'une réorientation forcée appuyée sur des principes moraux conservateurs. Que s'était-il passé entre le praticien et ses parents? Marché de dupes? La réalité est que Florent n'en avait cure. La paix lui était offerte en sortant la question du cadre et cela lui convenait.

Mais je vous parle de science là où je voulais vous parler de religion!
Il est écrit dans l'évangile de Matthieu : « for there are eunuch who were born that way from their mother's womb. And there are eunuchs who were made eunuchs by men. And there are also eunuchs who made themselves eunuchs for the sake of the kingdom of heaven. He who is able to accept this, let him accept it. »
La version anglaise est la meilleure, bien meilleure que le texte français qui dit: que celui qui peut comprendre ceci le comprenne. Comprendre est une chose, l'accepter en est une autre.
Bien entendu c'est la meilleure citation qui soit, pleine d'entendement sur la nature exacte de l'orientation sexuelle. Pour un peu on se mettrait à croire, devant tant de science. En acceptant tout de même d'être traités d'eunuques, ce qui n'est pas rien. La science est de voir que tout est joué à la naissance, ce qui rejoint les travaux les plus modernes. Mais voilà que je recommence à vous parler de science au lieu de religion!Peste!
Mais ce que l'inquisition vous mettra sous le nez ce n'est pas ce texte clairvoyant mais un interdit livré tout cru et plein de cruauté pour ceux qu'il condamne, quand ils sont innocents : « si un homme couche avec un homme comme on couche avec une femme, ils ont fait tous deux une chose abominable ; il seront punis de mort, leur sang retombera sur eux. » (Levitique). Sang contaminé, châtiment annoncé! Vous crèverez mes frères dans d'atroces souffrances. Physiques et morales! Famille je vous hais, la religion aussi!
La religion ne vous donne pas à réfléchir mais vous dit ce que vous devez faire.
Le monde enfin devenu simple, réduit à quelques préceptes. Hygiène de vie, hygiène sociale. Enfin ce serait la religion idéale...
La vérité est plus humaine, car la « parole de Dieu » s'entend par les oreilles humaines qui n'aiment rien tant que la musique qui leur est agréable et sert leurs interêts. Aussi des générations de prêtres y sont allés de leurs commentaires et interprétations, pour adapter la religion au monde toujours changeant et plein de turpitudes.
Des siècles de chicane, à qui sera le plus tordu! Pas un fil de la couverture qui n'ait été tiré par l'un de ces gloseurs vous expliquant la vie, et votre mort, ce qu'il y a après. Ce qu'ils en savent! Âmes perverses, âmes perdues...

Gay Paris Où les histoires vivent. Découvrez maintenant