Discrimination, comment ça marche? Je vais vous le dire. Quand Florent s'est marié avec son conjoint de longue date il avait plus de cinquante ans et l'encre de la loi sur le mariage pour tous était à peine sèche. Il avait droit à des jours de congé qu'il aurait pu prendre mais qu'il n'a pas pris. Et pourquoi? Je vais vous le dire. Ces jours de congé il aurait fallu qu'il les pose et donc qu'il explique un peu sa situation qui n'avait jamais été étalée. Son entourage professionnel en mourait d'envie? Tu parles! Son mari qui travaillait dans une PME fit la même chose et ne souffla mot à son employeur.
Il se souvenait encore d'une soirée pas si lointaine ou sa patronne avait fait un tour de table pour savoir qui était marié, pacsé, ou à la colle. Entre nous soit dit quel sujet de conversation pour un dîner de travail! Curieusement elle avait sauté le tour de Florent, évitant un sujet qui de ce fait devenait connu de tous! Vous ne voulez pas en parler? Le non dit sera plus bavard que tout le reste! Voilà un comportement de discrimination.
L'expression « discrimination raciale » désigne toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l'ascendance, l'origine nationale ou ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice, dans des conditions d'égalité, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique.
La convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale est entrée en vigueur le 4 janvier 1969.
Et la vie privée?
Chauncey l'explique dans « pourquoi le mariage? », la première revendication des noirs et leur première conquête après la guerre de sécession fut le droit à se marier librement. Et c'est cette conquête qui servira plus tard aux juges américains pour reconnaître que les gays et lesbiennes ont droit au mariage. Ainsi les luttes de nos frères de couleur sont les nôtres. Dans Philadelphia l'avocat qui défend la cause d'Andrew Beckett est noir. Le malheur des autres avant nous finira par faire notre bonheur!
Vous connaissez The Economist n'est-ce pas? Pas plus sérieux que ce magazine anglo-saxon à la ligne libérale depuis le début. Pas plus gay non plus? Depuis quand? Florent ne savait dire si c'était depuis toujours. Mais à présent je vous demande pardon! Pas une occasion de manquée à vous raconter tout ce que vous devez savoir sur le sujet : les mauvaises idées de Poutine, des Polonais, des autres...Mais je m'égare.
The Economist, donc explique que les Irlandais sont devenus gay friendly, certes parce que tant d'Irlandais vivent ailleurs, et d'abord aux États-Unis, que cette famille lointaine leur a fait comprendre qu'il fallait se décontracter sur le sujet. Mais surtout à cause du discrédit de l'église catholique qui disait tant que l'amour et le mariage étaient réservé à ceux qui sont de sexe opposé, alors que pas mal de ses ressortissants abusaient salement des jeunes garçons. Faites ce que je dis et laissez moi faire ce que me dicte mes pires névroses!
Donc ce ne sont pas les militants gays qui ont fait bouger les lignes mais les lignes qui ont bougé toutes seules sous l'influence d'évènements tout à fait exogènes. Ici revient l'histoire avec ses mouvements lents et profonds qui se combinent pour changer la société. Nous sommes le produit de l'histoire avant d'être le produit de notre histoire. Le propos est moins de l'infléchir que d'en comprendre les courants pour mieux naviguer sans se laisser emporter.
L'histoire a une fin? Bien sûr que non puisque tout a une fin! Vous me suivez? Non? Je vous ai perdu...Je veux vous dire que l'histoire des hommes n'a pas de fin, que ses mouvements lents continueront jusqu'à temps qu'il fasse peter la terre avec l'une de ses inventions diaboliques ou juste par bêtise et négligence. Et si d'aventure il dure assez longtemps, le soleil, devenu une géante rouge, le fera rôtir sur sa planète bleue devenue rouge. Reste donc à savoir quels seront les derniers méandres de l'histoire et si l'homosexualite sera reconnue comme un bienfait de la nature ou éradiquée comme fantaisie malsaine et sans intérêt. La sélection est-elle une discrimination?Discrimination. Des choses insignifiantes, tout à fait ordinaires. C'est comme ça que sa fonctionne. Le diable est dans les détails. Comment ça? Mais c'est pour tout le monde la même chose...Florent avait voulu mettre son mari sur sa mutuelle. C'est marqué dans votre contrat Monsieur, vous devez déclarer tout changement dans votre situation familiale. Vous avez transmis directement à la mutuelle? Peine perdue...d'ailleurs ils m'ont appelé. Ils ne peuvent pas prendre en compte votre demande. Vous devez passer par nous. Et il nous faut un justificatif de vie commune. Ah, vous êtes mariés? Livret de famille Monsieur! Envoyez moi ça.
Tout ça dans l'open Space du service paye bien entendu. Toutes les filles en rang, la grande ouverture sur le couloir. Parfait pour communiquer.
Dis-donc Ginette, tu savais que FD est pede? Ah ben ça alors...mais non je plaisante, tout le monde est au courant. C'est comme les cocus, y a que lui qui pense que personne le sait. Tu parles de nos jours..., des trucs qui traînent sur les réseaux sociaux, pas très joli il paraît. Enfin je suis pas allé voir...Je n'ai pas pas cette curiosité malsaine. Enfin, ça discute, ça circule...une petite remarque au passage, tu vois le genre.
Pourtant ça faisait belle lurette que les prestataires y avaient pensé à cette question. Du temps où les agences de voyage existaient encore les employés savaient y faire. Ils ne demandaient pas à Florent : quel est le prénom de madame? Ils avaient appris. Quel est le nom de la personne qui vous accompagne? C'était dans les années 90. Mais attention, il y avait du fric en jeu. Pas question de faire un faux pas. Même dans les petits commerces ils y faisaient attention. En France du moins. Il y avait des pays plus arriérés. Tenez la Suisse par exemple. Florent et son mari, c'était au tout début de leur relation, s'étaient offert une semaine dans un petit hôtel très modeste. Des gens très gentils. Et là ils s'étaient bien marrés . En arrivant à la table du dîner il y avait un rond de serviette avec le nom de Monsieur et Madame D. Frau D n'avait pas de couettes, ça non. Le second soir cette bévue avait disparu de la table. Des gens bien gentils, ils n'avaient jamais été confrontés à cette situation voilà tout. Tout doit être pensé et réfléchi.
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Gay Paris
General FictionGeorges CHAUNCEY n'a pas encore publié la suite de Gay New York. Le personnage de cette biographie a tant attendu ce deuxième tome. Il désespère. Alors il a écrit une histoire, sur le dos ce qu'il a vécu. Regard personnel mais aussi réflexion socio...