Chapitre 30.2 - Une prison dorée

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La bibliothèque est plus sombre que dans mon souvenir. Les centaines de bougies sur les chandeliers sont pratiquement toutes arrivées à leur fin de vie et personne n'est venu pour les changer. D'un geste vif, Timéo allume à l'unisson toutes les bougies viables et redonne vie à la pièce.

— Alors pourquoi m'as-tu fait venir ici ? dit-il, en s'asseyant sur le rebord de la première table qui croise son chemin.

— J'avais juste envie de passer un moment tranquille avec toi et de te dire un truc important... Dis-je, en me forçant à sourire.

— Hum. Je te trouve bien étrange ce soir.

— Je suis fatiguée. J'ai passé ma nuit à lire un livre. La principale raison de ta venue ici.

— Quel livre ?

Comme prévu, Timéo vient de mordre à l'hameçon.

— Oh, un livre qui appartenait au premier élu Salvatorebano. J'ai découvert que c'est lui-même qui avait caché la dague d'Athamée. Tu sais. Celle que je dois retrouver avant... mon... enfin le maître des ténèbres.

Ses yeux s'illuminent. Je sais qu'il attend que je lui dévoile l'endroit où elle se cache. Même si je ne connais pas le lieu précisément. Mais ça, il ne le sait pas. Il a juste besoin de le croire.

— Alors ? demande-t-il, pressé. Tu sais où la trouver ?

— Oui, avoué-je sans hésiter.

Il ne bouge plus. Il attend simplement que je prononce son emplacement. L'effet de surprise est la meilleure attaque. Je prends un petit élan. Je me mets sur la pointe des pieds pour être à la hauteur de son visage. Je pose mes lèvres sur les siennes. Un instant surprit, il s'écarte. Mais, il finit par me rendre mon baiser oubliant le reste. C'est maintenant. Je saisis discrètement son poignet et glisse le bracelet de Lilith autour. Un éclat doré illumine autour de nous. Timéo surpris, s'écarte brusquement pour observer l'objet coupable. Il ne cesse d'intervertir son regard entre moi et le bracelet.

— Mais qu'est-ce ?

Le bracelet devient vivant. Il s'agrippe autour de son possesseur comme un serpent s'enroulant autour de sa proie pour l'étouffer avant de lui porter un coup fatal. Lorsque les fines lianes dorées s'immiscent dans sa chair, Timéo pousse un cri strident. Il se tord de douleurs, et pose une main sur son cœur.

— Ah... tu... aaah ! rugit-il, les yeux fermés tournés vers le plafond.

Le bracelet se forme. Il se lie autour de son poignet pour ne faire qu'un avec son hôte. La bouche entrouverte, il dévisage sa main emprisonnée avec douleur.

— Qu'est-ce que tu m'as fait ? dit-il, ses yeux rouges remplis de fureur. Qu'est-ce que c'est ça !

— Le bracelet de Lilith, avoué-je le cœur lourd. Tu ne pourras plus me faire de mal. C'est fini.

— Le bracelet de Lilith ? souffle-t-il, ses yeux rivés vers l'objet maudit. Ce n'est pas vrai...

Il m'attrape fermement par les bras.

— Quoi ? Tu... es fâché ? balbutié-je. De toute façon, tu ne peux plus me faire de mal. Je sais très bien qui tu es véritablement... Sale traître ! Haussé-je le ton, pour qu'il m'entende très clairement.

Il me fusille du regard. Je peux sentir sa colère rien qu'en croisant ses pupilles noires.

— Mais comment tu ?

— Je sais tout ! crié-je, haut et fort. Je voulais te rendre ta sacoche ! Celle que tu avais laissée dans la bibliothèque ! C'est là que j'ai découvert, en renversant de l'eau sans le vouloir sur ton carnet...

— Mon carnet ?

— Oui, ton carnet. Pas celui avec tes dessins, mais un autre...

— Je ne vois pas de quoi tu parles. Alors tu vas vite fais retirer ce machin de mon poignet crie-t-il, furieux.

— C'est fini tes mensonges ! Je sais que grâce au carnet magique tu communiques avec le maître des ténèbres pour lui relater mes moindres faits et gestes ! Tu es son espion, sale TRAITRE !

Le poids de ce mot fait écho dans l'immense bibliothèque. Je sens mon visage devenir tout rouge. Mon corps s'est littéralement embrassé à cause de ma colère envers lui. J'explose sous ses yeux. L'éclat brillant du bracelet s'estompe. La douleur de celui-ci s'efface petit à petit. Il avance tout en arborant son masque impassible et froid.

— C'est vrai... je ne peux plus te faire de mal... eh oui, petite maline. Je suis du côté du maître des ténèbres. Mais maintenant, à cause de toi, je ne peux plus accomplir ma mission. À cause de toi, je souffrirai dès que tu seras en danger. Comme en ce moment. Ne sois pas bête, retire-le. Tu as déjà perdu face à lui. Ton père est bien plus fort que toi. L'armée rouge et tout le reste aussi. Pourquoi ne pas simplement être de son côté ? Tu n'as pas de famille. Mais lui, ton sang coule dans tes veines. Vous êtes liés que tu le veuilles ou non. Sinon, pourquoi m'avoir piégé ? Ta haine ressemble étrangement à celle de ton père. Tu ne crois pas ? Tu commences à basculer. Ton côté sombre émerge petit à petit et ne cessera de grandir.

Il se rapproche de moi, et il me chuchote à l'oreille.

— La question que je me pose, c'est. Qu'est-ce que tu vas faire maintenant ?

Sang d'ébèneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant