Chapitre 7 : Juste une immensité sombre

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Dehors, c'est le début de l'apocalypse. Je voyais de mes yeux ce que ce virus avait fait du monde, mais je ne parvenais pas à y croire. Se dire que tout ce qu'on avait connu était à présent fini et sûrement pour toujours était beaucoup trop dur à imaginer.

J'avais 23 ans et je travaillais dans une grande entreprise, assise tous les jours derrière un ordinateur à lécher les bottes du patron pour avoir une promotion. Voilà de quoi étaient faites mes journées avant la fin du monde. Par chance, j'avais mon collègue, Raphaël. Il ne savait jamais être sérieux et il était mon rayon de soleil dans mes matinées les plus sombres.

Je nous revois sortir de l'immeuble qui était en train de se faire attaquer par ces choses, prendre la voiture de Raphaël et filer chez lui pour trouver de quoi survivre. Ensuite, j'ai fait mes adieux à mon ancienne vie et l'on a pris la route. Sur le chemin, juste devant l'école du quartier, il y avait un petit garçon blond tout bouclé qui pleurait. Je n'ai pas pu le laisser là-bas. On l'a pris avec nous et depuis ce jour, nous étions devenus tous les trois inséparables.

- Hey ! Jenny, ouvre les yeux ! Donnez-moi de la morphine, il faut l'opérer !

Il y avait du monde autour de moi. Une lumière me faisait mal aux yeux ce qui me faisait les plisser. Je me sentais libre, je n'avais plus peur de la mort depuis longtemps : plus de douleurs, plus de craintes, plus besoin de courir pour survivre... plus rien juste une immensité sombre. Je me revoyais vivre mon histoire d'avant, avec ma famille. Tout ça est donc vrai, on reconsidère toute notre vie avant de mourir.

La morphine fit vite effet et je me sentais partir dans un grand calme et une forte sérénité.

- Jenny ! Qu'est-ce qu'il lui est arrivé ! cria mon meilleur ami. Personne ne lui répondait, ils étaient tous occupés à me sauver la vie.

Je tournais ma tête vers Raphaël, il était si inquiet ! J'essayais de lui murmurer de ne pas s'inquiéter que j'avais bien vécu, mais aucun bruit ne sortait de ma bouche. Je regardais autour de moi : il y avait Daryl couvert de mon sang, le docteur, Michonne et d'autres dans le fond de la pièce que je ne parvenais pas à distinguer. Avant que mes yeux ne se ferment, je vis Negan. Il semblait aussi inquiet. En même temps, perdre la seule personne qui ne le détestait pas, ça doit être frustrant...




- Elle n'est toujours pas réveillée ?

- Non, elle dort encore.

- Ça ne sert à rien de t'en faire pour l'instant. Laisse-lui du temps, Raphaël, ça ne fait que deux jours.

- Je sais, mais tu penses qu'elle va tenir, Siddiq ?

- On a stoppé l'hémorragie et il n'y avait pas d'organe touché, ça va aller !

J'arrivai à entendre des bribes de conversation, mais mes yeux ne voulaient pas s'ouvrir et aucun mot ne traversait mes lèvres.




La lumière du jour se posa sur mes paupières. Je les ouvris lentement pour laisser le temps à mes yeux de s'y habituer. Je sentis une douleur à mon abdomen ce qui me rappela que j'avais reçu un sacré coup de couteau qui m'avait bien amochée.

J'étais allongée à l'infirmerie de la ville. Il y avait à mes côtés Raphaël qui dormait sur une chaise. Le voir à mon chevet me fit sourire.

- Hey, dis-je dans un murmure n'ayant plus parlé depuis un petit moment.

Il se releva net et lorsque ses yeux se posèrent sur moi, des larmes se mirent à couler le long de ses joues.

- Jennifer, tu es réveillée... ça fait tellement longtemps que je voulais revoir le bleu de tes yeux... dit-il en pleurant. Il vint s'asseoir sur mon lit et posa sa main sur la mienne.

- Profites-en, je suis crevée ! Il rigola à ma remarque puis ajouta :

- Ça fait une semaine que tu dors et tu es encore fatiguée. Je te reconnais bien, là !

Je me mis à rigoler avec lui, mais le fait de contracter mon abdomen me fit sortir quelques injures :

- Oh putain de merde ! Je sens que je ne vais pas rire avant un petit bout de temps. J'ai raté la foire avec tout ça, non ? lui demandais-je

Lorsque je vis son expression passer de la joie de me revoir à la tête qu'il faisait maintenant, je compris que quelque chose était arrivé. Mon cœur se sera, j'avais peur de poser la question qui me brulait les lèvres. Je n'eus pas besoin de la formuler, Raphaël devina que je voulais savoir ce qu'il s'était passé.

- Alpha, la chef des chuchoteurs, s'est introduite à la foire sans qu'on ne la voie. Certains de ses mots coinçaient dans sa gorge et il s'arrêta, ce qui me laissait dire que cela n'était que le début des mauvaises nouvelles. Après un court instant, il reprit en plantant ses yeux dans les miens. Elle a kidnappé plusieurs d'entre nous et elle... Elle les a... décapité pour mettre leur tête à... des pics.

J'eus des frissons dans tout mon corps. Une boule encore plus grosse se fit dans mon estomac. Je parviens tout de même à articuler quelques mots face à cette nouvelle :

- Qui ? Qui est mort ?

Il continua à me fixer, son regard n'ayant plus aucune expression. Lorsque je vis ses yeux verts se remplir de larmes, j'eus du mal à avaler. Mais quand il prononça son nom, mon cœur se brisa :

- Elle a tué Éméric. Éméric est... Il est mort et d'autres aussi. Je suis désolé. J'aurais dû...

Il continua à parler, mais je ne l'entendais plus. Je refusais d'accepter ce qu'il venait de dire. Il me regardait tout en continuant de parler et je sentais que mes yeux se remplissaient de larmes. La seule chose que je faisais face à cette nouvelle était de secouer ma tête de gauche à droite, ce qu'il disait ne pouvait pas être vrai...

- Je suis désolé. Tellement désolé de ne pas avoir été là pour le protéger !

Je ne pouvais pas rester là sans rien faire. Je me levai contre avis du docteur. Mon ami avait essayé de me retenir, mais je voulais, je devais aller à la maison voir si ce qu'il disait était vrai. À chaque pas qui me rapprochait de notre demeure, mon cœur se serait. Quand je poussai la porte et que je criai après Émeric, il ne venait pas. Je fis toutes les pièces en l'appelant avant de retourner dehors et de hurler son nom.

Toujours sans réponses, je m'effondrai au sol. Des larmes chaudes se remirent à couler le long de mes joues. Il n'était pas mon fils biologique, mais je l'avais sauvé à ses quatre ans et je l'avais protégé comme mon propre enfant... Je l'avais perdu et m'étais fait une raison, il n'aurait pas pu survivre seul. Mais je l'avais retrouvé alors que je croyais tout espoir perdu... Et là, on me l'enlève pour toujours et je n'ai pas pu lui dire adieu !

Raphaël s'était accroupi à mes côtés me prenant dans ses bras pour calmer ma peine, mais c'était une cause perdue. On avait tué mon fils... Et cela ne restera pas impuni !

All I want, is youOù les histoires vivent. Découvrez maintenant