Chapitre 9

74 8 11
                                    

En réalité, Alexandre était surpris par la question de joli cœur. Il ne pensait pas qu’elle ferait attention à ce détail mais cela ne l’étonnait guère que le navire fantôme ne soit pas loin d’eux. Il continua donc son explication, sentant le regard interrogateur de Marie sur lui.

- Nous sommes près du triangle des Bermudes. Une légende raconte qu’un navire fantôme y serait enfermé, le Princess Augusta. Un équipage prit dans la tempête et prisonnier du triangle. Un vaisseau fantôme empêchant les autres bâtiments d’entrer, une mort assurée si vous voulez mon avis. 
 
- Un bateau fantôme ? Ça existe vraiment ? Ce ne sont pas que des histoires pour effrayer les enfants ? s’inquiéta la jeune. 

- Croyez-vous que je vous mens, joli cœur ? rétorqua le capitaine. 

Un frisson vint parcourir l’échine de la noble, une sensation désagréable. Elle avait vu des fantômes… comment pouvait-elle y croire ? Pourtant, elle avait une entière confiance en ses yeux, en ce qu’elle avait vu… et étrangement, Marie savait qu’Alexandre ne mentait pas.

- Non, mais puis-je vraiment vous faire confiance ? continua-t-elle en baissant les yeux. Après tout, vous êtes un pirate. Et tout le monde sait que les pirates ne sont que du côté qui les arrange. 

- Évidemment, nous ne sommes que des forbans sans cœur, fit Alexandre en détournant à contre cœur son regard de la jeune.

Était-il déçu de cette réponse ? Il n’en savait rien, mais cela lui importait peu. L’homme se concentra vite sur autre chose que cette belle noble qui se trouvait à ses côtés.

- Où allons-nous ? ajouta-t-elle en se tournant à son tour vers l’horizon. 

Elle avait recommencé à parler. Les pensées du pirate furent encore décorées d’un sujet qu'il essayait d'éviter : joli cœur. Il se mit pourtant à sourire à cette question, non parce qu’elle avait continué la conversation de son plein grès. Mais bien parce que la réponse n’allait pas plaire à la jeune. Et il savait déjà qu’il trouvera drôle le moment où elle connaîtra l’île vers laquelle ils se dirigaient.

- Nous y serons bientôt, pas d’impatience. C’est une île qui sûrement vous plaira, fit-il gardant son sourire sur ses lèvres. 

Marie se demandait ce qu’il avait en tête et ce qu’il voulait vraiment par là. Mais elle n’était pas bête au point de tout prendre au mot. La noble savait pertinemment que le voyage n’allait pas être agréable, peut-être même pire sur cette île ? Elle ne rajouta rien pour autant. Ne sachant pas quoi faire du temps qu’il restait avant leur arrivée à destination, elle quitta le capitaine pour se diriger à la poupe du navire. Marie se plaça, encore une fois, sur le bastingage balayant son regard du dos du capitaine aux matelots en mouvement sur le pont. 

Les minutes passèrent et l’ombre d’une île commençaient à se dessiner sur l’horizon, le bleuté foncé sortant de l’océan au loin. Plus ils s’approchaient, plus elle se demandait où ils pouvaient bien accoster. Mais elle savait qu'elle n'allait pas apprécier ce voyage.

Alexandre de son côté ferma le compas d’une main tout en regardant l’île, le sourire toujours présent. Il prit une inspiration, préparant sa voix pour donner enfin les ordres à ses marins.

- Mathurins, carguez les voiles ! Embraquez les cordages ! cria-t-il tandis que le maître d’équipage se contentait de répéter les ordres.

Le bruit avait augmenté, sortant rapidement Marie de ses pensées. Elle vit Alexandre les bras croisés. Il venait de donner les ordres et chaque marin s’était mit au travail pour ralentir au mieux leur bâtiment. Elle qui venait de passer une journée et une nuit avec eux, n’avait rien fait. Elle s'était seulement contentée de trembler dans son coin. 

Abyss, Partie 1 : Le Red EdanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant