Les pistolets hurlaient.
Les canons rugissaient.
Les sabres s’entrechoquaient entre eux dans des bruits assourdissants. Les voix des marins venaient remplir les deux ponts. Les équipages s’étaient mélangés et la pluie continuait d’offrir un chant de claquement sur le bois, pourtant elle n’arrivait plus à couvrir les sons.
Les marins du Red Edan se battaient du mieux qu’ils le pouvaient pour résister à la force de la mort. Marie avait elle aussi dégainé son sabre. Face à la jeune, deux squelettes lui barraient la route. Leurs visages étaient affreux, presque pourrissants. Ils n’avaient aucune paupière, aucune peau, leur globes oculaires avaient l’air de flotter dans leurs sphénoïdes.
- Bonsoir ma jolie, fit l’un d’eux ce qui lui offrit un frisson horrible.
Alors qu’elle les fixait encore sous le choc de ce qu’elle voyait, le deuxième commença à attaquer. Par chance elle se défendit instinctivement, son sabre la protégeant de l’épée du non-vivant. Elle fit quelques pas arrières pour s’écarter au plus. Mais bientôt elle toucherait de son dos le bastingage et il était évidemment hors de question pour elle de repasser par dessus bord. S’agrippant encore plus à la fusée de son sabre, il était temps pour elle de défier les morts.
Elle prit appui sur ses jambes, fixant les deux non-vivants face à elle. La pluie battante glissait le long de son visage. Le temps était toujours aussi sombre, seulement les fanaux des deux navires étaient visibles. Les lampes à huile étaient leur seule source de lumière. Tandis que tout l’équipage autour d’elle se battait pour leur vie, elle allait elle aussi devoir se défendre.
Mais pour ne pas arranger les choses, la fatigue prenait le dessus petit à petit. Bien que Marie était éveillée, tout son corps lui souffrait. L’entraînement plus tôt l’avait déjà affaiblie, la tempête n’avait pas aidé non plus… mais tenir un combat contre un mort ? Arrivera-t-elle à survivre ?
La jeune pirate ne réfléchit pas plus longtemps. Elle s’élança vers les deux morts pour leur asséner quelques coups qu’ils ne prirent même pas la peine d’arrêter. Le sabre rouge de la femme venait se fracasser contre les os de ses adversaires sans pour autant leur faire ne serait-ce qu’une seule égratignure. Et même si c’était le cas, que le tranchant de l’épée marquait son passage, ils ne ressentaient rien. Aucune douleur. Ils ne ressentaient pas le doux glissement de l’eau, le vent qui caressait leurs vêtements et même la fatigue.
Tout cela leur était devenu étranger. Ils n’étaient plus que des tas d’os qui avaient encore un léger brin de vie pour être animés.
Les deux hommes se mirent à lui rire au visage, après tout, elle ne leur faisait rien. Aucun de ses coups n’avait porté ses fruits. Alors qu’elle réalisait qu’elle était piégée entre eux et le bastingage, les deux non vivants s’approchèrent de plus en plus.
- Cela ne sert à rien de courir poupée, nous sommes immortels, claqua la mâchoire de l’un d’eux leur yeux rouges toujours posés sur elle.
Elle fit quelques mouvements avec son sabre pour que les deux hommes reculent mais c’était sans grand succès. Ils n’avaient pas pour but de la laisser en vie. Alors qu’elle se pensait perdue à tout jamais, perdue dans ce triangle, un coup de feu retentit près de son oreille.
Les deux squelettes s’arrêtèrent ne bougeant plus, celui de droite possédait un trou en plein milieu du crâne. Il se tourna pour regarder qui était le fou qui venait de réveiller sa fureur. Marie en profita pour s’échapper de cette prison qu’ils avaient formé sur elle. Ses jambes en feu, elle zigzaguait entre les combattants. Évitant de peu chaque coup, elle atteignit la barre de l’Edan.
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Abyss, Partie 1 : Le Red Edan
RomanceDans les années mille-sept-cents, les mariages arrangés étaient plus que courants. C'était le cas de Marie-Louise, qui, lorsqu'elle descendit vivre près du port - où demeurait son fiancé - se retrouva confrontée aux forbans sans cœurs ; des pirates...