Elle n’avait pas exactement compris ce qu’il entendait par là. Que voulait-il dire exactement par prendre une vie ? Il avait tué quelqu’un pour ce poste ? N’avait-il pas été choisi ? Était-ce donc pour cela que beaucoup des marins de l’équipage avait peur de lui ? Était-ce pour cela qu’il restait souvent dans sa cabine seul plutôt qu’avec eux ?
Alors qu’elle comptait s’écarter de lui afin de le regarder dans les yeux, il ne fit que se serrer à elle encore plus fort. Gardant son visage encré dans le cou de la jeune, il n’avait pas pour but de se montrer à elle de la sorte. Il restait donc caché, à fuir, encore une fois. Maintenant qu’il lui avait dit, il fallait qu’il raconte l’histoire entière. Alexandre savait qu’elle ne le laisserait guère tranquille maintenant qu’il venait de lancer la conversation. Après tout, c’est lui même qui lui avait dit que tuer n’était pas son grand plaisir. Savoir donc qu’il avait eu ce poste en prenant une vie revenait à se contredire lui-même.
- Je suis né dans une famille noble, tout comme toi, commença-t-il. Mes parents étaient des personnes fabuleuses et moi j’étais heureux.
Il venait de dire « étaient ». Elle avait bien compris ce que cela signifiait vraiment. Et rien que d’y penser un frisson douloureux parcourra son dos.- J’ai donc apprit à lire, à écrire, les manières. Mais sans que je ne sache pourquoi, l’année de mes onze ans, nous nous sommes fait attaquer. Les gardes royaux ont pénétré dans notre maison, détruisant tout sur leur passage. Fouillant la demeure, ils s’approchaient de plus en plus de nous. Mes parents ont décidé de me protéger avant leur propre vie. Je me suis caché sous leurs ordres. Ils étaient face à moi, entrain de se débattre de toutes leurs forces, et je ne pouvais rien faire. Parce que l’enfant stupide que j’étais n’avait pas assez de force, de courage… j’étais tétanisé, condamné à les voir souffrir. Mais le pire était de voir mon oncle du côté de ses gardes. C’était lui le traître, pas nous. Celui-ci m’a vu et à ordonné mon arrestation aussi. Je me suis levé et j’ai couru du mieux que je le pouvais pour leur échapper. Et j’ai réussi.
L’homme reprit son souffle avant de continuer. Marie sentait dans sa voix qu’il lui était vraiment difficile de dire tout celà.
- J’ai erré dans la ville en me cachant comme un voleur. Alors que j’étais innocent. Puis, il passa moins d’une semaine avant que je ne me retrouve mêlé à une foule excitée. Je ne comprenait pas. Je m’étais éloigné pour voir ce qui les rendait si joyeux. Et c’est là que je les ai vu. Tout deux face à une corde. Les mains liées par des chaînes. Un homme cria leur méfait. Ils étaient accusé de piraterie par mon oncle lui même. Je ne sais pas pourquoi il a fait ça. Mais très vite, les cordes furent accrochées à leur cou, et ils pendaient dans le vide. Des yeux globuleux et violacés par la mort elle-même. Mes parents venaient de mourir face à moi. Et je n’avais rien pu faire. J’étais effrayé. Je ne voulais pas vivre cela aussi. Alors comme un lâche, j’ai fuit encore une fois. Je suis parti en courant sans but. Durant des semaines j’ai marché dans la rue et volé pour survivre.
La jeune femme sentait le visage d’Alexandre se crisper sur son cou. Elle ne savait ce qui allait suivre dans son histoire, pourtant elle avait bien compris que le malheur n’en était pas encore à son paroxysme, surtout pour un enfant de onze ans.
- Tout le monde me regardait comme si j’étais une erreur. Jusqu’au jour où cet homme arriva. Il était affreux, visage déformé, habits sales… et il m’a prit. Je ne savais pas qui il était et ma vie ne mit pas longtemps à devenir encore bien plus noire. L’étranger m’avait emmené dans un camp d’esclave où je fus vite vendu pour peu cher. Un noble était heureux d’avoir un nouvel arrivant, qui plus est jeune.
Il prit une grande respiration. Le capitaine se détendit doucement et redressa enfin la tête pour poser son front sur celui de son joli cœur. Ses yeux à lui étaient fermés de souffrance qui refaisait surface. Marie, quant à elle, ne lâcha pas le visage du pirate de ses yeux océans.
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Abyss, Partie 1 : Le Red Edan
RomanceDans les années mille-sept-cents, les mariages arrangés étaient plus que courants. C'était le cas de Marie-Louise, qui, lorsqu'elle descendit vivre près du port - où demeurait son fiancé - se retrouva confrontée aux forbans sans cœurs ; des pirates...