Alexandre pagayait depuis une bonne dizaine de minutes, l’île devenait de plus en plus visible. Marie n’était pas sereine et le capitaine l’avait vite remarqué. Ne serait-ce que par ces légers mouvements créés avec la peur et ces yeux bleus qui ne cessaient de fixer l'eau en attente de monstre marin.
- Tout va bien se passer, je crois en vous, la rassura-t-il entre deux efforts.
Elle ne répondît rien gardant ses pupilles plantés sur les vagues bousculées par les rames de bois. L’océan était foncé, le fond encore invisible, mais il arrivait parfois qu’elle aperçoive une méduse ou un petit poisson. Pourtant, plus ils se rapprochaient de l’île plus les êtres vivants aquatique disparaissaient.
Le capitaine ralentissait aussi de plus en plus.
- Nous y sommes, demanda Marie en voyant pertinemment qu’Alexandre surveillait les alentours à la recherche d’un quelconque monstre au beau visage.
- Sûrement, avoua l’homme en continuant ses mouvements de rames.
Il avait pour but de minimiser le travail de joli cœur, pour cela il se devait de pagayer le plus loin possible. Il savait que la tâche allait être dure une fois qu’il perdra la raison. Alexandre détestait plus que tout la voir aussi silencieuse et neutre, mais il en comprenait la raison.
Au moment même où il s’apprêtait à lui parler, quelque chose attira leur attention à tous les deux. Ils se retournèrent pour fixer leur invité.
Une jeune femme. Un visage presque parfait. Des traits fins. De beaux yeux bleu ciel accompagnés de cheveux roux tombant dans l’eau. La sirène regardait Alexandre avec attention, comme un prédateur face à sa proie, tout cela caché par un doux regard.
Pourtant, le capitaine n’y fit guère attention, continuant sa route vers l’île en se focalisant sur ce qui se trouvait face à lui. Ou alors était-il seulement trop concentré pour y voir le décors alentour ?
Marie qui n’avait rien d’autre à faire que de regarder ces monstres apparaître les une après les autres. Chacune remontait la tête vers la surface pour fixer leur chaloupe. Elle avait peur, peur que la partie de chasse commence d’une minute à l’autre. Et l’attente ne fut pas longue, car l’une d’entre elle commença à murmurer une chanson.
Plus les paroles avançaient, plus le visage du capitaine se crispait. Il luttait. Son visage le faisait bien comprendre.
- La plage… commença-t-il entre deux râles. Elle est notre seul refuge… désormais…
Son cœur fit un bon, une douleur et une peur qu’elle ne put réellement qualifier. La chasse venait de commencer. Alexandre perdait peu à peu ses esprits pour sombrer dans l’hypnose de ces monstres marins. D’ici seulement quelques minutes - si ce n’était avant - Marie allait se retrouver seule.
Le capitaine avait beau se concentrer sur ses rames, sur l’île qu’il se devait d’atteindre au plus vite, il n’arrivait tout de même pas à contrer ce chant mélodieux. Un chant d’une douceur qu’il ne connaissait guère, d’une beauté sans pareille, de tentation. Il n’y arrivait plus. Il avait beau lutter de toutes ses forces, c’était bien trop puissant lui. Il voulait lâcher prise, écouter plus encore cette musique, cette voix, cette sirène…
Alexandre venait d’abandonner sa conscience.
Son corps entier venait s’emplir d’une chaleur qu’il n’avait jamais ressenti… ou peut-être que si ? En tout cas, il ne s’en soucia plus. Laissant son esprit divaguer. Laissant ses muscles lâcher prise. Laissant tout son corps se noyer dans cet endroit qu’il ne connaissait guère. Il était bien. Mais une envie encore plus puissante lui prit son être. Cette sirène. Cette chanteuse. Il la voulait. Il voulait être à elle. Se laisser tomber dans ses bras. Voir son beau visage. Écouter sa voix encore et encore sans jamais s’arrêter.
VOUS LISEZ
Abyss, Partie 1 : Le Red Edan
Roman d'amourDans les années mille-sept-cents, les mariages arrangés étaient plus que courants. C'était le cas de Marie-Louise, qui, lorsqu'elle descendit vivre près du port - où demeurait son fiancé - se retrouva confrontée aux forbans sans cœurs ; des pirates...