Chapitre 19

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Alexandre - bien trop enfoncé par ses mauvais souvenirs - reprit conscience de cela, de cette partie de son enfance où il n’avait pas fuit. 

- Ne parle pas de cette époque Powell, se leva Alexandre pour regarder son marin droit dans les yeux. 

Mais le maître d’équipage n’en fit rien. Il continua donc son discours.

- Vous avez sauvé des centaines d’esclaves alors que vous n’étiez qu’un enfant âgé de quinze ans. Votre courage était bien plus grand que celui de chacun des hommes réunis. 

Powell posa les mains sur le bureau, avançant son visage vers son capitaine.

- Où est-il passé ? fit-il d’une voix douce et calme mais qui se voulait insistante.

- Je n’ai fait cela que pour sauver ma propre vie, vous n’étiez que le résultat de mes actes, argua-t-il comme pour donner une raison valable de son geste passé.

- Mais vous avez choisi de nous libérer de nos chaînes, continua Powell en se redressant. Si ce que vous dites est vrai, alors vous n’auriez jamais volé les clefs pour nous affranchir de ces liens de fer. 

Alexandre grimaça. Son maître d’équipage avait raison. Le pirate écarlate avait effectivement sauvé une centaine de vies humaines, seize ans auparavant. Il ne pouvait pas seulement remettre cela sur un résultat pour sauver sa propre vie.

Car ce n’était pas le cas.

Il s’était senti coupable de partir sans ces hommes qui avaient veillé sur lui durant les quelques années enchaîné comme un esclave. Alexandre avait donc prit la décision que s'il quittait ces lieux, c’était avec tous ces hommes. L’adolescent de quinze avait donc fait demi tour. Récupéré au péril de sa vie, les clefs et avait libéré chaque homme, un par un. Ce qui lui avait valu un nom : l’enfant libérateur. Powell faisait parti de ces esclaves. L’homme, depuis ce jour, vouait sa vie à son jeune capitaine. 

- Vous m’aviez raconté que, lorsque vous aviez onze ans, votre famille fut attaquée. Vous obligeant à fuir ceux qui tenaient à votre cœur, continua Powell voyant évidemment qu’une ouverture se formait peu à peu dans le cœur du capitaine écarlate. Durant les longues années qui ont suivit votre esprit a été torturé par ce jour. Celui où vous vous êtes retrouvé seul.

Alexandre l’écoutait attentivement. Il buvait chaque parole que prononçait son matelot. Celui-ci le connaissait que trop bien, surtout son douloureux passé qui refaisait surface. Une preuve demeurait encore visible, une preuve de cet acte héroïque, une cicatrice présente sur son visage. 

Seize ans auparavant, l’adolescent qu’était Henderson avait réussi à se libérer de ses chaînes. Mais lorsque la fuite était enfin possible, l’hésitation l’avait prit de toute part. Il savait. Il savait que s'il partait il aurait la vie sauve. En revanche, il avait aussi la possibilité de tous les sauver. Mais à quel prix ? L’enfant n’avait pas mis trop de temps à réfléchir, les mouvements venant instinctivement. Il s’était mis à courir dans cet horrible endroit, courir jusqu’au bureau d’un homme. Il ne savait exactement qui il était mais cet homme possédait la clef. La liberté.

L’adolescent avait ouvert la porte, sa lourde pioche encore dans les mains. L’inconnu s’était levé un sabre à sa ceinture qu’il prit en à peine quelques secondes. L’enfant ne savait comment réagir. Il s’était vu asséné de coup avant de pouvoir faire quou que ce soit, une fureur rouge dans ses yeux. Alexandre blessa - de sa pioche - l’homme avant qu’il ne tombe au sol de douleur. Le petit avait ensuite attrapé un pistolet. L’inconnu réussi tout de même à blesser le jeune par une dague cachée entre ses mains. Le visage douloureux, le sang coulant sur sa joue, Alexandre tremblait. Il avait entre ses mains la vie d’un homme. Mais que vallait-il contre une centaine d’autre ? L’enfant ne réfléchît pas plus et tira une balle dans la tête de l’homme qui s’effondra au sol. L’adolescent prit les clefs qu’il utilisa le plus vite possible, libérant Powell en premier. L'esclave le remercia, mais la seule chose qu’avait répondu l’enfant était : “Prenez ces clefs et libérez les autres, ne m’attendez pas, vous êtes libre”. Sur ce, Alexandre était parti en courant vers un autre étage pour libérer les suivant. 

Abyss, Partie 1 : Le Red EdanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant