Académie Ollphéist

•20•

Nous avançons dans cette forêt depuis au moins cinq minutes, et à chaque seconde qui passe, je sens un léger picotement envahir mes doigts. Ce n'est ni douloureux ni vraiment agréable, mais c'est une sensation étrange qui commence à m'inquiéter. Je préfère ne rien dire, par crainte de les voir paniqués, ce qui risquerait de me faire paniquer et déclencher des éclairs incontrôlables de ma part.

   Soudain, ils s'arrêtent et tendent l'oreille. Je tente de faire de même, mais contrairement à eux, je ne suis pas dotée de leur ouïe surhumaine. Tout ce que j'entends, c'est le murmure de la forêt, un silence presque oppressant où même les oiseaux semblent absents.

— C'est... Je commence à dire, mais Diego plaque rapidement sa main sur ma bouche pour me faire taire.

   Il la retire lentement, restant vigilant devant moi, tandis qu'Aiden se positionne derrière moi, formant une sorte de barrière protectrice. Qu'est-ce qu'ils font ? Le cri soudain et déchirant d'un animal résonne dans l'air, et j'aperçois alors une petite biche, blessée, qui s'effondre devant nous. Diego la fixe, tandis qu'Aiden se place à ses côtés, toujours sur ses gardes.

   La vue de la pauvre créature me serre le cœur, et je fais un pas en avant. Un pas de trop pour les frères qui m'empêchent d'aller plus loin.

— Vous n'allez pas la laisser mourir, pas vrai ?

— Cette biche n'aurait jamais dû s'approcher de nous. Elle a senti notre présence, nous sommes des prédateurs pour elle. Pourtant, elle est ici, devant nous.

   Je les bouscule légèrement pour passer, m'avançant résolument vers la biche. Mais soudain, je sens quelque chose changer en moi. Mes cheveux se soulèvent dans un souffle invisible, et mes vêtements se transforment. Je baisse les yeux pour découvrir que je porte maintenant une armure, féminine certes, mais bien trop révélatrice. Ma poitrine, à peine cachée par des lacets, mes épaules, mes bras, mon abdomen, tout est à peine couvert. Une jupe courte cache mon intimité, et mes jambes sont protégées par des pièces d'armure.

    Le gémissement de la biche me ramène à la réalité, et je me précipite à ses côtés, m'accroupissant pour lui permettre de sentir ma main et la rassurer.

— Thémis, reviens. La voix de Diego devient pressante. Thémis, c'est dangereux...

   Je l'ignore, concentrée sur la biche. Elle a une petite morsure sur le flanc, et sa patte arrière semble foulée. Je ne sais pas comment l'aider, mais je ne peux pas la laisser ainsi.

— Thémis. M'appellent-ils, avec anxiété.

   Un bruit sourd émerge des profondeurs de la forêt, me figeant sur place. La biche se tend, tout comme moi, et probablement les deux loups aussi.

— Viens ici, dépêche-toi. Ordonne Diego, la panique perçant dans sa voix.

— Tu ne peux rien faire pour elle. Ajoute Aiden.

— Viens derrière la barrière, doucement, sans geste brusque. Le prédateur de cette biche est tout proche.

   Je caresse la tête de l'animal, refusant de la laisser à son sort.

— La biche doit passer de l'autre côté de la barrière. Je chuchote.

— Elle ne peut pas, à moins d'être invitée par Madame Widney,. Explique Diego. C'est la loi de la nature, Thémis. Reviens.

   Fais chier. C'est tellement injuste! Pourquoi est-ce toujours les plus beaux êtres qui doivent souffrir ? Ces deux-là peuvent bien me traiter de folle, mais je ne peux me résoudre à abandonner cette biche.