•48•

2.6K 217 2
                                    





Comme un réflexe, je me précipite vers Ayana. À l'instant où je franchis la barrière, je sens un changement s'opérer sur mon corps, ou plutôt sur mes vêtements. Le temps presse, je n'ai pas le loisir de m'attarder sur cette sensation, car je la plaque au sol avec force. Un bruit sourd résonne à travers mes petites oreilles, et je jette un coup d'œil rapide en direction de l'objet qui a frappé la barrière.

  Une sentinelle. Elle se relève, prête à foncer sur nous, mais trois loups surgissent, la déchiquetant avant qu'elle n'ait le temps de réagir. Pourquoi trois pour une seule sentinelle ? Est-elle si puissante ?

— Thémis. Murmure Ayana, attirant mon attention. Tu portes ta tenue de guerre.

   Je baisse les yeux, découvrant une armure lourde et féminine sur mon corps épuisé, comme la dernière fois. Elle couvre à peine ma poitrine, un laçage dissimulant le décolleté, mes épaules, mes bras, mon abdomen, tandis qu'une jupe protège mon intimité et mon fessier. Mes jambes sont, heureusement, bien protégées par l'armure.

— Elle te va invariablement bien. Ajoute-t-elle.

— Ce n'est pas vraiment le moment de s'extasier sur ma tenue. Je rétorque en l'aidant à se relever.

— Je sens d'autres présences approcher. Annonce Madame Widney. Trois auras beaucoup plus puissantes.

— Prévenez l'école, élèves et professeurs. Nous aurons besoin d'eux. Conseille Ayana. Nous ne serons pas de trop avec eux.

— Artémis ne peut pas combattre. Intervient une voix que je ne reconnais pas.

   Nous nous tournons vers un professeur que je ne connais pas.

— Regardez dans quel état elle est. Continue-t-il. Elle est chancelante, en sueur et essoufflée depuis son arrivée.

   Merde. J'espérais pouvoir le cacher suffisamment pour ne pas attirer l'attention.

— Sandro nous avait prévenus. Il nous avait dit qu'il arriverait plus tôt. Dis-je pour détourner l'attention.

— Il a raison. Déclare Adamski, toujours nu comme un ver. Artémis est bien trop affaiblie pour se battre.

   Ça commence à m'énerver. La frustration monte en moi. Oui, je ne suis pas au sommet de ma forme, mais je suis encore capable de me battre. Que voulez-vous que je fasse ? Dire à Hadès : "Désolé, ta nièce n'est pas en forme aujourd'hui, reviens demain" ?

   Madame Tourel propose que nous franchissions tous la barrière pour nous mettre en sécurité, insistant pour que la directrice laisse Ayana nous rejoindre. S'ils craignent que la barrière s'affaiblisse en la franchissant, faire passer cinq personnes de plus pourrait en effet diminuer son pouvoir.

   Alors que nous passons de l'autre côté, des bruits étranges et des auras se rapprochent. Mon cœur se serre à la vue qui s'offre à nous. Une centaine, voire plus, de sentinelles apparaissent, se dressant en face de nous à plusieurs mètres.

— Il n'y a qu'Alix et Artémis qui ont des pouvoirs d'attaque à distance. Constate Madame Tourel, avec une pointe de panique dans la voix.

   Je jette un regard à Alix qui en fait de même. Avons-nous la même idée ? Elle se tourne vers sa mère :

— Alerte les autres de rappliquer le plus rapidement possible, dis-leur que l'école est attaquée. Thémis et moi allons retarder un peu l'avancée du camp adverse.

   Les deux frères, encore sous forme lupine, grognent, mécontents d'être laissés de côté.

— Artémis n'est pas au sommet de sa forme. Répète l'inconnu.

   C'est qui, lui, au juste ? Il parle de moi comme s'il me connaissait alors que je ne l'ai jamais vu. Je ne le connais ni d'Adam ni d'Eve.

— Ça va, de toute façon, c'est mon combat à la base.

   Je m'approche de Diego, ou plutôt de son loup. Je caresse son crâne, ne sachant pas qui je tente de rassurer, lui ou moi. Je gratte doucement sous son museau avant de m'éloigner avec un sourire. Tout ira bien.

   Alix et moi avançons. Les professeurs semblent élaborer un plan. Nous ne franchissons pas la barrière, mais nous en sommes proches. Je lève une main.

— Artémis, n'utilise pas qu'une seule main. Intervient Adamski. Tu as déjà perdu trop de magie dans cette attaque, et tu ne contrôles pas encore cette puissance à grande distance.

   Je l'écoute et lève l'autre main. J'écarte les bras à 180 degrés. Je ne sais pas exactement ce que je fais, mais ça semble naturel.

— Artémis. M'appelle doucement Ayana, comme pour me dissuader.

   Je joins mes paumes brusquement, et des éclairs jaillissent, frappant nos ennemis qui avancent lentement. Ils sont désintégrés sur le coup. Je suis surprise. D'où me vient cette attaque ?

— Thémis, depuis quand sais-tu faire ça ? S'étonne le professeur de défense.

— C'est l'une de ses attaques fétiches. Explique la sorcière de ma famille. Je suppose que c'est un réflexe, ou elle s'en est souvenu.

   N'ayant éliminé que la première ligne, les autres ont perdu leurs avancées. Même si les arbres font office, un peu, d'obstacles, il semblerait qu'ils ralentissent.

— À mon tour.

   Alix lève les bras, et un mur d'eau se dresse devant les assaillants.

— Nous gagnerons un peu de temps. Mais faites vite.

   Je remarque déjà la sueur perler sur son front. Cet acte lui coûte beaucoup d'énergie.

   Je me tourne vers Diego, son frère et le professeur de défense, qui sont tous en forme lupine, grognant vers la droite. Un homme se tient près de la barrière.

— Artémis, je suis si heureux de te revoir, ma fille.

   Mon père ? Je fais quelques pas en avant, franchissant la barrière. Il ouvre les bras, m'invitant à l'étreindre. Où est Apollon ?

   Quelqu'un parle, mais je ne comprends pas. C'est comme si c'était dans une langue étrangère. Je l'ignore, trop absorbée par l'homme en face de moi. Cheveux noirs comme les ténèbres, barbichette, longue tunique noire... Dans mes souvenirs, ses cheveux étaient plus clairs, il n'avait pas de barbe et ne portait certainement pas une tenue noire.

   Plusieurs voix s'élèvent autour de moi, incompréhensibles. Puis, je réalise :

— Vous êtes un imposteur.

   L'homme ricane, tendant le bras vers moi. En un éclair, je me retrouve à sa merci, sa main serrant ma gorge tandis que j'essaie désespérément de l'électriser avec mes mains.

— Si quelqu'un approche, je lui brise la nuque. Déclare-t-il d'une voix acerbe.

≈≈≈

Académie OllphéistOù les histoires vivent. Découvrez maintenant